Mars 2014 /232
Acte de vieSans le don de corps, les médecins ne pourraient acquérir le savoir anatomique qui leur permet d’exercer leur art. Sans lui, la chirurgie n’aurait pas fait les progrès spectaculaires qu’on lui connaît. Le don de corps est essentiel au maintien d’une médecine de qualité, à son évolution. A l’heure où les étudiants en médecine sont toujours plus nombreux à l’ULg – on en compte 300 en 2e année –, le service d’anatomie humaine lance donc une campagne pour sensibiliser au don de corps. « Nous recevons entre 60 et 80 corps par an, mais c’est vraiment un minimum par rapport aux besoins », explique le Pr Pierre Bonnet. Essentielles dissectionsLe travail de dissection reste incontournable pour les futurs médecins, qui s’y confrontent dès la 2e année de leur cursus. Ils bénéficient d’une salle aménagée à cet effet dans la tour 3 du CHU de Liège. Au-dessus des 16 tables de dissection, des écrans vidéo permettent de recevoir en direct des instructions. Pour autant, la modernité de l’infrastructure ne dispense pas du contact direct avec le corps... « Le travail de dissection reste essentiel, insiste le Pr Pierre Bonnet. D’abord, parce qu’il permet de se rapprocher au plus près de la réalité anatomique à laquelle sont confrontés les médecins. Ensuite, parce que c’est l’occasion de réaliser pour la première fois un certain nombre de gestes techniques : utiliser des ciseaux, un scalpel, suturer. Mais surtout, il s’agit du premier contact avec la mort. C’est donc aussi l’enseignement du respect du corps et de la mort, un aspect éthique fondamental. » Par ailleurs, de nombreux spécialistes ont besoin de travailler sur des corps pour apprendre à maîtriser des techniques complexes, qu’il s’agisse de la chirurgie plastique, urologique, gynécologique, de la neurochirurgie ou même de techniques d’infiltration en médecine générale. Le don de corps permet donc aussi de faire avancer la recherche et de mettre au point de nouvelles solutions thérapeutiques. Beaucoup songent à donner leur corps à la science après avoir éprouvé la maladie ou côtoyé de près la souffrance d’un proche. « Certains donateurs souhaitent aussi laisser quelque chose derrière eux, en particulier lorsqu’ils n’ont pas d’héritage matériel à léguer », observent Alain Botte et Murielle Wouters, prosecteurs chargés de préparer les corps au sein du service d’anatomie humaine mais aussi d’accueillir les personnes intéressées par cette démarche. Certains religieux – nonnes, prêtres – y voient la continuité de leur engagement. Mais la plupart sont des athées qui, ainsi que le suggère Murielle Wouters, souhaitent ritualiser une mort qu’ils conçoivent sans au-delà. Quant aux motivations financières souvent invoquées autrefois – « je donne mon corps pour que mon décès ne coûte rien à mes proches » –, elles n’ont plus cours aujourd’hui : les frais dus à l’entreprise de pompes funèbres sont en effet identiques. Le corps en héritagePratiquement, celui qui décide de léguer son corps à la science doit en faire la déclaration écrite auprès de l’Université. Une décision dont il est conseillé de parler avec ses proches. Le défunt peut en effet rester dans le service entre un mois et trois ans après son décès avant d’être restitué à sa famille, ce qui peut rendre difficile le travail de deuil. « Nous ne laissons jamais repartir un défunt sans mettre un bouquet de fleurs, commente encore Murielle Wouters. Ce n’est pas grand-chose mais cela témoigne du respect que nous avons pour ceux qui ont fait ce geste altruiste. »
Julie Luong
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