Janvier 2015 /240
Sauvons Belspo !Le Pr Rudi Cloots, vice-recteur à la recherche, prend fait et cause
Les temps sont durs. Pour la recherche aussi. Si le gouvernement fédéral semble attentif à la recherche fondamentale et à son nécessaire financement, le texte de l’accord de gouvernement envisage néanmoins la suppression du SPP Politique scientifique fédérale, mieux connu sous le sigle Belspo. Stupeur dans le monde universitaire. « On savait déjà que les Pôles d’attraction interuniversitaire (PAI) étaient très menacés, rappelle le Pr Rudi Cloots, nouveau vice-recteur à la recherche de l’ULg. Le précédent gouvernement avait fixé leur disparition en 2017 alors qu’ils ont prouvé à maintes reprises leur efficacité, y compris sur la scène internationale. Maintenant, la nouvelle équipe gouvernementale veut, en outre, démanteler Belspo, une administration fédérale moderne qui fonctionne très bien, à la satisfaction de l’ensemble des scientifiques. » Une pétition a d’emblée été adressée au Premier ministre Charles Michel*. A ce jour (le 6 janvier), elle compte plus de 16 500 signatures, dont 40% sont celles de chercheurs flamands. Conçue pour financer les activités de la recherche fondamentale, Belspo est une structure assez unique en Belgique dans la mesure où elle associe dans des projets collaboratifs les expertises néerlandophones, francophones et germanophones. Ses services sont actifs au sein des établissements scientifiques fédéraux (l’Institut royal de météorologie, l’Observatoire, les Archives du royaume, les Musées royaux des Beaux-Arts, etc.) ainsi qu’auprès des universités du pays et de la plupart des centres de recherche belges (le centre d’excellence scientifique fédéral sur le climat, par exemple ou, plus récemment, le centre d’excellence fédéral Brout-Englert-Lemaître). Belspo est également à la base de la station de recherche Princesse Elisabeth en Antarctique et du navire océanographique Le Belgica, pour ne citer que ces deux références bien connues du grand public. « Dans les universités, Belspo finance les PAI et les programmes “Brain” dans les domaines de la science et de la médecine. Ces modèles favorisent la collaboration entre les laboratoires de tout le pays. L’ambition étant de permettre aux chercheurs belges de s’insérer dans les programmes européens de plus grande envergure : pour cela, il faut une masse critique suffisante et, dans cette matière aussi, “l’union fait la force” », explique le vice-Recteur. Ne nous trompons pas : l’enjeu est majeur pour les universités. A titre d’exemple, pour la période 2009-2012, Belspo a attribué directement 78,1 millions d’euros à la recherche, soit 6,4% du financement de la recherche des universités et, indirectement via le FNRS/FWO, 76,3 millions d’euros, soit 6,3% de ce même financement. De plus, Belspo finance la contribution belge à l’Agence spatiale européenne, laquelle revient – en partie – aux recherches universitaires par le programme Prodex notamment. Si l’on prend encore en compte les mesures fiscales et parafiscales favorables au budget de la recherche universitaire, Belspo accorde un montant de plus de 225 millions d’euros par an à la recherche, dans les universités. « L’inquiétude est palpable chez les chercheurs », observe Rudi Cloots. Et pourtant, il n’est indiqué nulle part que le budget consacré à la recherche va diminuer, remarque-t-il, « mais la compétence serait confiée aux entités fédérées. S’agit-il seulement d’un transfert de budget ? Mais alors quel est le sens de cette décision qui affaiblira la recherche belge sur le plan international ? » Et le Pr Rudi Cloots de craindre que seule la logique de régionalisation explique pareille décision. « C’est donc un pas de plus vers le confédéralisme, regrette-t-il. C’est impensable et il me semble que le MR ne peut pas rester sourd face à cet argument. » Plaidoyer pour la recherche fondamentaleEgalement président des vice-Recteurs à la recherche en Fédération Wallonie-Bruxelles, le Pr Rudi Cloots a l’intention d’envoyer une “lettre ouverte” à Charles Michel pour tirer la sonnette d’alarme. Des contacts ont été pris également avec les universités de Gand et de Diepenbeek. « D’autant que, cerise sur le gâteau, la Région wallonne a manifesté l’intention de favoriser très clairement la recherche appliquée, commercialisable, note-t-il. Comment va-t-on alors financer la recherche fondamentale qui, comme son nom l’indique, se situe à la basede tous les développements, de toutes les applications ? » Le cabinet de Jean-Claude Marcourt est déjà saisi de la problématique et rendez-vous est pris avec le ministre de l’Enseignement supérieur.
Patricia Janssens
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