December 2016 /259

Kot intergénérationnel

Accord d’âges pour loyer modéré

Il s’agit à la fois d’un kot et de la continuité de l’habitation familiale. Un peu pour les deux protagonistes, d’ailleurs. « Le profil type de l’étudiant est celui qui n’aime pas le bruit pour pouvoir rester concentré au maximum sur ses études et qui n’a pas envie d’habiter en kot communautaire. Certains ont aussi besoin de conserver des repères et un pilier, comme à la maison », décrit Marie Bukowicz, responsable à Liège de “1 toit 2 âges”, la seule association qui concrétise, à l’heure actuelle, le logement intergénérationnel pour des étudiants en Cité ardente. Née en 2009 à Bruxelles, cette ASBL propose un véritable projet gagnant-gagnant, en permettant à des étudiants d’habiter dans le logement de personnes plus âgées (entre 55 et 75 ans) avec le double objectif de rompre la solitude de ces dernières et de faciliter l’accès au logement pour les premiers. « En réalité, ce sont principalement des seniors encore relativement jeunes et assez actifs qui se sont retrouvés seuls à la suite d’un veuvage ou d’un divorce et dont les grands enfants, s’ils en ont eu, ont quitté la maison pour vivre leur vie », précise la cheville ouvrière liégeoise d’“1 toit 2 âges”.

À l’heure actuelle, ils sont 21 binômes (80% de filles) disséminés entre Liège, Herstal, Ans, Ougrée et Boncelles. C’est dans cette dernière zone que nous avons rencontré Pascale (70 ans) et Audrey (29 ans, étudiante en master psychologie) autour de la table de séjour d’une petite maison tranquille baignée de quiétude et de petites habitudes, complétée par la présence de deux chiens et d’un chat. Toutes les deux n’aiment pas le poulet et rient beaucoup. Vraiment. Pascale se souvient : « Mes filles m’ont suggéré de prendre quelqu’un pour animer mes soirées lorsque je me suis retrouvée seule dans cette habitation de trois chambres. Il a suffi d’un coup de fil à l’association, après avoir entendu une émission radio sur le logement intergénérationnel, pour qu’une première étudiante en médecine vienne habiter pendant 4quatre ans ». Audrey est arrivée juste après, en septembre de cette année, au lendemain d’une première rencontre confirmant que le courant passait bien entre ces deux fumeuses. Car, naturellement, dans ce genre de cohabitation nourrie de confiance, de respect et de sérénité, où l’on partage certains repas, la salle de bains, le salon, des confidences et quelques petites courses, il vaut mieux ne pas avoir des goûts et des caractères trop diamétralement opposés.

Et, dans la grande majorité des cas, cela fonctionne bien.« On sait mieux communiquer et il y a moins de soucis qu’avec des jeunes plus festifs. Je gagne donc du temps pour me concentrer davantage sur mes études, d’autant que je ne dois faire ni les courses ni le ménage… même si je ne suis pas contre le fait de donner un coup de main », apprécie l’étudiante qui retourne dans sa famille à Charleroi tous les week-ends. Et puis, au bout du compte, c’est aussi beaucoup moins cher qu’un kot. À Liège, le montant varie entre 180 euros et 250 euros par mois, charges comprises : eau, gaz, électricité et internet. « Pour ce qui est de la nourriture, on fait un petit compte à la fin de la semaine ou tous les 15 jours mais cela ne représente guère plus que 50 ou 60 euros par mois », assure Pascale. Et à tout cela, il faut ajouter une cotisation annuelle à l’association de 250 euros.

À ce tarif-là, il y a naturellement quelques règles évidentes de savoir-vivre et de convivialité, ou même certaines habitudes convenues à respecter. « Elle peut sortir quand elle veut, inviter d’autre étudiants à la maison pour des travaux de groupes et même ramener son petit copain pour autant que ce ne soit pas un différent chaque semaine. Mais j’aime bien qu’elle prévienne si elle rentre tard ou en retard, pour ne pas que je m’inquiète », confie la logeuse. Entérinant cette optique plus relationnelle et rassurante, le prix du loyer atteint d’ailleurs la tranche la plus basse lorsque l’étudiant(e) s’engage davantage au niveau de tâches à effectuer ou de services à rendre tels que cuisiner, faire la lecture, sortir les poubelles, accompagner la personne chez le médecin ou dans certains de ses loisirs, l’aider dans ses papiers administratifs… Mais ce qui se tisse entre ceux et celles qui partagent le même toit dépasse bien entendu le simple cadre contractuel.

* informations sur www.1toit2ages.be

Fabrice Terlonge
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