November 2017 /268

Une fille dans le vent

Lina Rixgens, étudiante sportive

Bien que naviguant depuis l’âge de 7 ans sur diverses coques, notamment en compétition, elle rêvait de traverser l’Atlantique une nouvelle fois et de passer du temps au large. Seule. Sur un voilier. Un désir né en 2010, sur ce même océan au milieu duquel elle naviguait avec une équipe de 24 autres lycéens dans le cadre d’un projet éducatif. Plus de 20 000 miles marins après cette véritable révélation, Lina Rixgens, originaire de Cologne et actuellement étudiante en 4e année de médecine à l’ULiège, a mis à profit son statut d’étudiante sportive pour se fixer temporairement à La Rochelle et s’investir dans la Mini Transat 2017. Il s’agit d’une course en solitaire d’environ 7400 km à bord de bateaux longs d’à peine 6,50 m, en deux étapes : de la Charente-Maritime, où elle a posé son sac… jusqu’à Gran Canaria, avant une seconde manche plus immersive en direction de la Martinique. Nous avons interviewé Lina le 18 octobre, soit quatre jours après son arrivée à la voile à Las Palmas au terme de 12 jours de mer (et une 52e place au classement des bateaux de série). Juste avant le grand saut transatlantique qui durera deux bonnes semaines.

Le 15e jour du mois : Quelles sont tes impressions au terme de cette première étape ?

RixgensLinaLina Rixgens : Après avoir cassé et donc été obligée de réparer l’une des deux barres, j’ai été confrontée à un problème de réglage avec mon pilote automatique. Du coup, le manque de sommeil m’a fait commettre une erreur stratégique au niveau de la météo et je n’ai pas bien profité des zones de vent près des côtes portugaises. Les deux derniers jours, c’était dur psychologiquement car il n’y avait presque plus de vent pour arriver à Las Palmas. Il reste que mon bateau n’est pas de nouvelle génération comme beaucoup d’autres sur la course, ce qui fait que je ne peux de toute façon pas jouer devant. Mais mon objectif est avant tout d’arriver en Martinique et d’être à fond en avançant le plus vite possible.

Le 15e jour : Quel fut le meilleur moment de cette première étape ?

L.R. : La descente depuis Madère. J’ai eu trois jours phénoménaux sous grand spi [ndlr, la voile d’avant gonflée et colorée] avec un vent stable de 15 nœuds et un grand soleil. Cela m’a permis de trouver mon rythme dans la course et de prendre beaucoup de plaisir.

Le 15e jour : Et le pire?

L.R. : Après le Cap Finisterre. Je ne voyais plus clair du tout à cause du manque de sommeil et j’ai eu des hallucinations. J’entendais des voix et des personnes qui me disaient d’arrêter le voilier alors qu’elles venaient de monter dessus. Il m’a fallu deux ou trois heures pour me convaincre que tout ça était faux.

Le 15e jour : N’est-ce pas trop ennuyeux d’attendre, à terre, entre deux étapes ? Tu travailles un peu tes cours d’université?

L.R. : Non (rires). J’ai étalé ma 4e année et, depuis février, je me concentre uniquement sur la voile pendant un an. C’est d’ailleurs une grande chance de pouvoir faire cela grâce au statut d’étudiant sportif car, l’an passé, je devais gérer à la fois des régates en France et la réussite de ma 3e année de médecine. C’était difficile au niveau de la concentration. Donc, pour le moment, je me repose car j’ai du sommeil à récupérer. Et on en profite pour faire quelques petites réparations sur le bateau ; il doit être au top avant de repartir.

Le 15e jour : Cette aventure représente-t-elle un budget important?

L.R. : Je compte plus ou moins 80 000 euros. Une moitié pour les frais de location du voilier pendant deux ans et l’autre pour la logistique, les nouvelles voiles, etc. Mais je suis aidée par des sponsors.

Le 15e jour : Et une fois arrivée?

L.R. : Je serai très contente, naturellement. Et notamment d’être la première Allemande à franchir la ligne d’arrivée de cette course transatlantique Mini Transat ! Mon plan est ensuite de rester deux mois là-bas en Martinique pour profiter d’un peu de vacances avant que les cours ne reprennent au deuxième quadrimestre. Pendant ce temps-là, mon bateau reviendra tout seul, en cargo.


Propos recueillis par Fabrice Terlonge
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