Décembre 2017 /269

Prises de décision collectives

Un logiciel aidant aux prises de décision collectives

Dire que les formes de travail au sein des secteurs privés, publics, sociaux – et même dans la recherche – évoluent est un euphémisme. Ces bouleversements questionnent les structures hiérarchiques classiques. Dans cette vaste zone grise, de nouveaux outils et de nouvelles méthodes émergent pour favoriser les directions servant le collectif. C’est le cas de Mesydel, un logiciel d’aide à la prise de décisions collectives et à l’anticipation de tendances. Émanant du Spiral, laboratoire spécialisé dans l’évaluation des politiques publiques et dans l’étude des interactions entre sciences, technologies et société, la spin-off Mesydel a été créée ce 30 novembre. Le projet avait obtenu un financement First Spin-off de la Région wallonne en 2014.

TABLE RONDE ANONYME ET NUMÉRIQUE

Mesydel« Pour nos recherches, nous avons utilisé une méthode de concertation d’experts en vue de créer du consensus : la méthode Delphi, expose Martin Erpicum, chargé de recherche au Spiral et fondateur de Mesydel. Pour la mettre en place, nous avons constitué notre propre plateforme numérique, que nous avons par la suite développée en un produit commercialisable. » La notion d’expert peut prêter à confusion. Elle convoque une qualité technocratique d’un individu qui ferait autorité sur tous les autres. Or il convient ici d’étendre cette notion à tous ceux qui, par leur position, ont une connaissance sur un sujet donné. Cette “expertise d’usage” peut donc englober un très grand nombre de personnes.

Comment fonctionne l’outil ? Les différentes personnes sollicitées pour une prise de décision remplissent anonymement un questionnaire. Les réponses sont compilées et analysées. Des synthèses sont ensuite envoyées aux intervenants pour stimuler l’apprentissage collectif. Après avoir pu en prendre connaissance, chaque intervenant reçoit un second questionnaire, et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’un consensus ait pu être trouvé ou que des tendances suffisamment claires soient identifiées. « Ces différents tours permettent aux gens de se resituer par rapport à l’évolution d’un groupe et d’affiner leur position et leur pensée, remarque Mylène Rivière, cofondatrice et consultante scientifique de Mesydel. Ils favoriseront l’émergence d’une intelligence collective. » En d’autres termes, Mesydel apporte une plus grande transparence aux prises de décisions et les “horizontalise”. « Si on prend l’image d’une table de réunion, plus le nombre de personnes impliquées augmente, plus les processus de discussion sont complexes. Que ce soit pour réunir tout le monde ou pour confronter des points de vue équitablement. Certains seront plus timides, d’autres parleront plus aisément, chacun prêtera une plus grande autorité aux collègues mieux rémunérés… Notre méthodologie palie ces biais tout en permettant la consultation d’un grand nombre d’individus, en garantissant l’anonymat des réponses. Elle libère la parole et fait émerger des idées et des arguments plutôt que les personnes qui les portent. »

GRANDE POLYVALENCE

Les groupes visés sont de tous ordres : experts, groupes devant adopter une décision commune dans des cadres scientifiques ou au sein d’une entreprise, etc. Les clients sont déjà nombreux et leurs profils variés. « Nous avons notamment travaillé sur un projet financé par la fondation Bill & Melinda Gates, illustre Martin Erpicum. Un autre projet s’attache à déterminer des degrés de sévérité de la dengue pour fournir des traitements mieux adaptés. Aucun consensus sur des seuils de gravité de la maladie n’existait jusqu’à aujourd’hui. Une concertation entre une trentaine de médecins a permis d’aboutir à cet accord. » Une autre commande visait à rassembler différents acteurs (designers, ingénieurs, médecins, infirmiers, etc.) pour discuter des contraintes, des réticences et de la faisabilité d’un projet de fabrication de t-shirts connectés à destination des patients en soins intensifs. « Chaque projet est différent, chacun a des contraintes spécifiques. Mais Mesydel n’est pas qu’un logiciel. C’est aussi un service. En tenant compte de ces différentes réalités, nous adaptons l’utilisation de la plateforme à l’objectif de chaque client », conclut Martin Erpicum.

Philippe Lecrenier
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