Décembre 2012 /219

Verdir, un projet innovant pour Liège

RentierBernardRemplacer les friches industrielles désertées par des cultures et utiliser la Meuse pour transporter la récolte en ville : tel est le projet visionnaire de Bernard Rentier, recteur de l’ULg, soutenu par Eric Haubruge, vice-recteur de Gembloux, et le Pr Haissam Jijakli de Gembloux Agro Bio-Tech. “Verdir” est né !

Si les usines sidérurgiques ont fait la prospérité de la région, offrant une large gamme d’aciers plats au carbone à de nombreux secteurs industriels, la baisse progressive de l’activité de l’acier a conduit plusieurs entreprises à fermer leurs portes, laissant derrière elles ce qu’il est convenu d’appeler des “friches industrielles” – soit les terrains, hangars et autre bâtiments – qu’il faut, impérativement, transformer. D’autres villes européennes ont été confrontées au même défi, Sheffield en Angleterre, par exemple, a ainsi dû réhabiliter 300 ha de friches.

Recommandée par la FAO

Que faire ? « Créer des logements, des espaces culturels, des parcs et des galeries commerciales est toujours possible, admet le Recteur, mais on ne peut pas se contenter d’activités du tertiaire, il faut aussi produire. Dans cette optique, l’agriculture urbaine est une piste particulièrement intéressante. » Certes, au cours du siècle dernier, l’agriculture s’est développée à la campagne car elle avait besoin de grandes surfaces de terres arables. Grâce au développement des transports et à l’essor de la grande distribution, les marchandises étaient acheminées en ville. Mais ce temps semble révolu : l’ère de “l’agro-alimentaire globalisé” a vécu. Aujourd’hui les nouvelles techniques de culture permettent de produire des légumes en périphérie des villes, sur des sites désaffectés, au coeur de quartiers habités et d’infrastructures existantes (commerces, écoles, administrations, loisirs, etc.).

« La densification des villes est telle que 75 % de la population y habitera en 2050 », reprend Bernard Rentier. En Belgique – un des pays les plus peuplés d’Europe avec 363 habitants par km² – plus de 95% de la population vit en ville et les surfaces agricoles s’amenuisent.

Si l’on veut continuer à s’alimenter, il faut aussi une “agriculture très proche de la ville”. D’autres pays l’ont fait. Les Etats-Unis notamment où la production agricole urbaine est une réalité depuis les années 1980. « Durant la dernière décennie, 2000 nouveaux marchés fermiers ont été créés dans des grandes villes américaines (New York, Chicago, Detroit, Washington et San Francisco) pour écouler en circuits courts les productions urbaines et périurbaines. Ces marchés, souvent dirigés par les agriculteurs eux-mêmes, sont soutenus par les pouvoirs locaux », renchérit le Recteur. Des initiatives imitées plus près de chez nous : à Berlin, 80 000 personnes travaillent dans les jardins communautaires. L’agriculture urbaine n’est plus un oxymore !

Verdir : valoriser, réhabiliter et innover

Pour Bernard Rentier – et Eric Haubruge – « le bassin liégeois devrait reconvertir certaines de ses friches industrielles (dont ses grands bâtiments) en lieux de production agricoles urbaines et péri-urbaines. » Ce qui permettrait à la fois de lancer une nouvelle activité économique et, pour la population, de se réapproprier ces espaces abandonnés. « Des jardins communautaires seraient réservés aux habitants qui bénéficieraient en outre de parcs de détente.» Le projet “Valorisation de l’environnement par la réhabilitation durable et l’innovation responsable ” (Verdir) s’inscrit dans cette démarche et entend bénéficier des technologies wallonnes de pointe adaptées à ces nouveaux systèmes de production, tels que les aciers luminescents par exemple.

« D’après une étude récente, quatre personnes sont nécessaires pour cultiver 1 ha en ville, poursuit, enthousiaste, le Recteur. On pourrait donc créer quelques milliers d’emplois et donner du travail à la fois à des personnes qualifiées et non qualifiées dans les anciens bâtiments industriels réaménagés. » Sans compter l’amélioration de la qualité de vie pour les riverains qui retrouveraient un paysager agréable et disposeraient d’un accès aisé aux produits frais.

Un “projet-pilote” basé sur l’aquaponie* – rentable très rapidement – envisage la réhabilitation d’un site en bord de Meuse, le fleuve constituant à l’évidence un atout majeur dans le transport des légumes. Les péniches seraient évidemment accessibles à tous les producteurs locaux qui pourraient ainsi bénéficier d’un mode de transport doux vers Liège, Herstal, Visé, Seraing, etc..

Patricia Janssens

*L’aquaponie est la culture de végétaux couplée avec l’élevage de poissons : ce sont les déjections des poissons qui servent d’engrais au végétal.

Valorisation de l’environnement par la réhabilitation durable et l’innovation responsable (Verdir)

Projet fédérateur né de l’initiative de l’université de Liège avec l’appui de la plupart des Facultés, “Verdir” a aussi le soutien du centre de recherche d’Arcelor, des pôles de compétitivité (notamment le pôle Mécatech) et d’ID-Campus.

site : www.ulg.ac.be/verdir

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