Juin 2013 /225

E-commerce, croissance et désillusions

Les bonnes pratiques pour réussir

L’e-commerce a beau connaître une impressionnante phase de croissance en ces temps moroses, l’avenir de ce secteur n’est toutefois pas complètement rose. Beaucoup de sites peinent à être rentables. Mais selon Damien Jacob, professeur invité à l’ULg et auteur du livre E-commerce, les bonnes pratiques pour réussir*, les opportunités resteraient intéressantes. A condition d’éviter certains pièges.

Essais-erreurs

16,5 millions de transactions en 2012. Soit une augmentation de plus de 30% par rapport à l’année précédente pour un montant total de 1,4 milliard d’euros. Et dire qu’il y a cinq ans à peine, Ogone (le leader du paiement en ligne) ne comptabilisait “que” 4,5 millions de transactions réalisées par des consommateurs belges… Chez nous comme ailleurs, l’e-commerce n’en finit plus de connaître une croissance à deux chiffres, là où les magasins traditionnels font plutôt grise mine, crise oblige.

Ce secteur en plein boom ne serait toutefois pas « le nouvel eldorado », selon Damien Jacob, expert en technologies de l’information et de la communication à l’Agence wallonne des télécommunications. Dans son récent ouvrage, il dresse un état des lieux nuancé de la vente en ligne et s’intéresse à ses perspectives d’avenir. La question ne se pose maintenant plus sur l’opportunité ou non de positionner son offre commerciale en ligne, mais sur la façon la plus efficace de le faire, en tenant compte d’une compétition accrue et des évolutions des attentes des consommateurs.

Car aussi jeune soit-il (il a commencé à se développer en Amérique du Nord dès la deuxième moitié des années 90), le commerce électronique mue rapidement. Après les premiers tâtonnements des pionniers et leurs débâcles boursières liées à l’éclatement de la bulle internet en 2000, l’heure serait aujourd’hui à la consolidation. Et à la recherche d’un modèle économiquement viable : au-delà de la brillante réussite de certains sites, (beaucoup) d’autres peinent à être rentables. En France, sur les quelque 117 000 vendeurs online répertoriés en 2012, les 2/3 comptabiliseraient moins de… trois achats par jour. Les problèmes financiers ne toucheraient pas uniquement les petites structures. Amazon ne brille que grâce à la mise à disposition de sa plateforme à des tiers, eBay a vécu des jours difficiles, l’agressivité publicitaire de Zalando ne devrait pas épargner ses résultats…

Changer le braquet

Pourtant, cela n’empêche pas une certaine ruée vers l’or. En Belgique, on estime que cinq nouvelles boutiques virtuelles sont lancées chaque jour. Et notre pays n’est pourtant pas le plus actif sur ce terrain. Par rapport à leurs voisins hollandais, français ou allemands, les entrepreneurs belges se montreraient frileux. La dernière enquête statistique de l’Agence wallonne des télécommunications indique que 3% des PME vendent véritablement en ligne (hors commandes passées par courriels). « Il y a clairement un déficit d’offres, juge Damien Jacob. Vu la petite taille du pays, il devient très compliqué de se lancer si l’on se contente du marché belge francophone. Pour atteindre une taille critique, il faut au moins se tourner vers la France et d’autres pays limitrophes, voire au-delà. » Un pas que les sociétés auraient souvent du mal à franchir. Alors que, pendant ce temps, les Belges effectueraient la moitié de leurs achats en ligne sur des sites étrangers.

Il serait temps de se lancer. Des niches seraient encore disponibles. Et les grandes enseignes, généralement handicapées par leurs lourdes structures opérationnelles et décisionnelles, ne seraient pas les mieux placées. Après avoir mené l’enquête auprès d’une septantaine de points de vente virtuels, Damien Jacob identifie les erreurs à ne pas commettre : se lancer sans avoir un projet solide, avoir mal choisi ses prestataires, croire que le succès sera rapide, négliger la mise en place d’un climat de confiance, ne pas atteindre une taille critique… Il identifie aussi certains facteurs de réussite : se différencier autant que possible au niveau de l’offre avec des gammes de produits en exclusivité, miser sur la fiabilité du service, soigner sa e-notoriété, etc. « Surtout, ne pas oublier que le commerce électronique reste du commerce, qu’il nécessite les mêmes qualités. D’ailleurs, d’ici quelque années, on ne parlera peut-être plus d’e-commerce mais de commerce, tout simplement. »

Mélanie Geelkens

article complet sur le site www.reflexions.ulg.ac.be (rubrique Société/économie)

* Damien Jacob, E-commerce, les bonnes pratiques pour réussir, Edipro, Bruxelles, 2013.

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