Septembre 2013 /226

La dynamique des statistiques

Studys, pôle d’attraction interuniversitaire

Développer des méthodes statistiques pour comprendre les systèmes dynamiques complexes, tel est l’objectif de Studys – le pôle d’attraction interuniversitaire (PAI)* – dont trois équipes de l’ULg sont partenaires. Celle du Pr Philippe Lambert, de l’Institut des sciences humaines et sociales, est spécialisée en statistique méthodologique.

Changement d’état

LambertPhilippeImpliqué dans ce programme de recherche depuis 2012, le Pr Philippe Lambert y apporte son expertise. Il vise à développer de nouveaux outils d’analyse des données pour répondre aux problématiques rencontrées dans différents domaines de recherche. « Studys rassemble des équipes dans six universités belges et quatre universités étrangères, lesquelles travaillent sur une grande variété de sujets, tant en sciences sociales qu’en psychométrie, économie, finance, ou encore en sciences médicales, vétérinaires et pharmaceutiques, indique Philippe Lambert qui précise que, malgré la grande diversité des disciplines, les techniques d’analyse statistique développées présentent des similitudes. Il suffit parfois de quelques adaptations pour faire face à des défis techniques du même ordre dans des domaines distincts. »

Philippe Lambert travaille notamment à l’aide d’équations différentielles pour modéliser un changement d’état dans un système donné. « Dans le cas, par exemple en sciences sociales, du statut marital d’une personne : elle peut être célibataire, en couple, mariée, divorcée ou veuve. Ici, l’ambition va être de prédire les probabilités de transition d’un état à un autre en fonction des caractéristiques de la personne telles que l’âge, le nombre d’années passées en couple, les revenus, la consommation d’alcool, etc. Tout le défi, lorsqu’on fait face à des données issues d’enquêtes qui révèlent le statut des individus, est d’estimer ces probabilités de transition sur base des quelques informations collectées », explique-t-il.

Une technique qui pourrait aussi servir dans le domaine médical. En effet, Philippe Lambert a récemment été contacté par un épidémiologiste de l’université catholique de Louvain (UCL) qui travaille sur le traitement de la malaria. « Son objectif est de déterminer comment agir sur le terrain pour diminuer la propagation de cette maladie. Comment et quand faut-il intervenir sur les moustiques ou sur les humains ? », précise-t-il. Ses équations différentielles peuvent être utilisées pour décrire le statut des différents acteurs de l’épidémie. « Un moustique peut être sain, porteur de parasite mais non contaminant, ou contaminant, etc. De même, un humain peut être sain, malade ; il peut guérir ou mourir, ajoute le chercheur. Avec nos équations, et au départ de données empiriques, nous pouvons décrire la vitesse de transition entre ces différents états et mettre cela en relation avec les caractéristiques des sujets et les traitements administrés. »

La polémique autour des femmes allemandes

Autre problématique traitée par Philippe Lambert, en collaboration avec des chercheurs du Max Planck Institute for Demographic Research : l’analyse de la fertilité des populations humaines. « Nous nous penchons entre autres sur une polémique à propos des femmes allemandes. Certains affirment que plus celles-ci sont instruites, moins elles ont tendance à avoir des enfants », explique Philippe Lambert. Confirmer ou infirmer ce genre d’hypothèse est très difficile au vu des règles strictes en matière de protection des données personnelles. Les scientifiques tentent donc de mettre au point des outils d’analyse permettant de croiser les données disponibles avec la probabilité pour une femme d’avoir un enfant. En particulier, l’exploitation correcte de données d’enquête relatives à de jeunes femmes sans enfant s’avère méthodologiquement délicat, car leur statut ultime de mère est encore emprunt d’incertitudes.

Deux autres équipes liégeoises, l’une en sciences mathématiques et l’autre à HEC-ULg, sont aussi impliquées dans le programme Studys. Elles effectuent notamment des recherches en statistique robuste et sur l’analyse semi- et non-paramétrique de données censurées.

* Les pôles d’attraction interuniversitaires sont une initiative de la Politique scientifique fédérale visant à soutenir des équipes d’excellence en recherche fondamentale, appartenant aux différentes Communautés du pays, et à leur permettre de constituer un réseau avec des partenaires étrangers, afin d’accroître leur contribution à l’avancement général de la science.

Concernant Studys, voir les informations sur le site http://iap-studys.be
Audrey Binet
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