Décembre 2013 /229

Plus de peur que de mal

Une étude évalue l’exposition des Belges au furane

Certains processus de transformation des aliments génèrent des composants indésirables, voire nuisibles. En 2001 notamment, la découverte d’acrylamide (un produit toxique) dans la nourriture a suscité une surveillance accrue du phénomène et a conduit l’Union européenne à fixer des valeurs indicatives pour l’acrylamide dans divers aliments.

Café et petits pots

Le furane, autre contaminant de ce type, n’est pas encore réglementé à ce jour. Bien qu’il soit classé “probablement cancérigène” par l’OMS, les autorités attendent des résultats scientifiques supplémentaires pour se prononcer. Dans le cadre de sa thèse*, Georges Scholl, assistant au Centre de recherche analytique et technologique (Cart), avait pour mission de déterminer le niveau de contamination des denrées alimentaires en Belgique ainsi que le niveau d’exposition au furane des adultes, enfants et bébés.

Le furane est une petite molécule qui se forme lors des processus de chauffe, comme la cuisson ou la stérilisation, de la nourriture. On le retrouve ainsi dans les aliments préemballés ayant subi un traitement thermique. Les deux aliments champions pour leur teneur en furane sont le café torréfié et les petits pots pour bébés

« Les rats exposés au furane développent des cancers, notamment des cholangiocarcinomes et des cancers du foie », observe Georges Scholl. En réalité, ce n’est pas la molécule de furane elle-même qui pose problème mais les produits qui découlent de sa métabolisation au niveau du foie. Afin d’évaluer l’exposition de la population belge au furane, Georges Scholl a développé des méthodes analytiques permettant de mesurer de très faibles niveaux de furane dans les denrées alimentaires.

« Nous avons testé, grâce à des méthodes analytiques très fines, plus de 500 échantillons récoltés entre la côte belge et Arlon pour définir les niveaux de furane dans les différents types d’aliments, indique Georges Scholl. Et à l’aide de données de consommation, on a pu déterminer le niveau d’exposition moyen des Belges. » Selon les résultats obtenus, celui-ci est légèrement plus élevé que le niveau d’exposition moyen européen.

Changer les habitudes

Globalement, les résultats de ces investigations sont plutôt rassurants. La grande majorité de la population belge ne présente pas un haut risque de contamination à cette molécule. L’étude montre également que la consommation de café contribue fortement à l’exposition au furane. Boire quotidiennement une tasse de café de plus ou de moins peut faire monter ou baisser de 20% la quantité de furane ingérée sur la journée !

En ce qui concerne les petits pots pour bébés, même s’ils sont relativement contaminés, ils contribuent étonnamment peu à l’exposition des tout-petits à cette molécule car, contrairement à ce que l’on pourrait penser, les Belges sont très traditionnels quand il s’agit de nourrir leurs bambins. En effet, selon les chiffres de Kind en Gezin (l’équivalent de l’ONE en Flandre), les parents n’ont recours aux petits pots que pour un repas sur trois.

Suite à ces résultats, les chercheurs ont transmis des recommandations au Service public fédéral (SPF). « Il est difficile d’agir au niveau de la production industrielle mais on peut travailler sur les habitudes de préparation des aliments, explique le scientifique. Le furane étant très volatil, il suffit de bien remuer les aliments à l’air libre pour qu’il soit en partie éliminé ». Plus de peur que de mal, semble-t-il.

Article complet sur le site www.reflexions.ulg.ac.be (rubrique Sciences/chimie)

Vidéo sur  UlgTV-LogoFurane-vid

* Thèse financée par le Service public fédéral (SPF) Santé publique, sécurité de la chaîne alimentaire et environnement, supervisée par les Prs Gauthier Eppe et Edwin De Pauw du Cart et Claude Saegerman de l’unité de recherche en epidémiologie et analyse de risques appliquées aux sciences vétérinaires.

Audrey Binet
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