Janvier 2014 /230

Spike d’Or 2013

Nafissatou Thiam étudiante-sportive de haut niveau

ThiamNafissatouAllez-vous chercher à faire le meilleur demain ? « Ah ben oui, c’est sûr. Je vais me donner à fond, comme toujours. Je n’ai pas envie de regretter quoi que ce soit ici car ce sont de super conditions pour moi qui suis encore très jeune », s’enthousiasmait Nafissatou Thiam au troisième jour des championnats du monde d’athlétisme du mois d’août à Moscou.

Une réponse à son image. Celle d’une fille douée, sympathique et qui arbore souvent un petit sourire en coin dont on ne sait s’il exprime une note d’espièglerie ou un certain régal à vivre la vie d’une sportive de haut niveau avec le vent en poupe. A 19 ans, cette étudiante de 1er bachelier en géographie a en effet déjà goûté aux podiums et aux records et ne compte pas arrêter sa course, un peu dans le sillage de la championne olympique belge Tia Hellebaut qui avait débuté en heptathlon avant de briller en saut en hauteur.

« On me demande s’il ne serait pas judicieux de me centrer sur la hauteur, qui est mon point fort. On verra… Je suis encore jeune et je n’y pense pas pour le moment. Mais si je commence à sauter deux mètres, c’est sûr que je reconsidérerai la question », ajoute celle qui avait émergé au plan médiatique en établissant un nouveau record du monde junior du pentathlon. 8 secondes 65 au soixante mètres haies, 1 mètre 84 en hauteur, 14 mètres en lancer du poids, 6 mètres 30 en saut en longueur et 2 minutes 21 secondes et 18 centièmes au 800 mètres lui avaient rapporté un total de 4558 points. Mais cette performance réalisée à Gand lors des championnats de Belgique d’épreuves combinées, au mois de février, n’avait pas été validée en l’absence d’un médecin agréé par la Communauté flamande pour effectuer un test anti-dopage le jour du record. Malgré un contrôle négatif effectué le lendemain au domicile, l’Association internationale des fédérations d’athlétisme (IAAF) n’avait pas accepté d’interpréter le règlement en sa faveur.

« Cela va être plaidé devant le tribunal arbitral du sport, mais je crains qu’il ne faille du temps et que nos chances de gagner soient minces», se résigne Nafissatou. Un aquabonisme qui dénote face à la perception que l’on peut avoir d’un tempérament sportif ? « Non! Ça me tient à coeur mais je suis vite passée à autre chose. Il vaut mieux regarder devant que derrière et je comprends la décision comme le règlement, même si ce n’est pas moi qui ai fait la faute. » Son horizon, il est vrai, est nettement plus absorbant que le court sillage laissé par son jeune palmarès. Même s’il n’y a pas de championnats espoirs (sa catégorie) cette année, les championnats d’Europe seniors en Suisse se profilent en août 2014. Et même si elle se refuse toujours à faire des pronostics, par superstition, cette pétulante athlète ne devrait pas y faire du tourisme : « Il y aura des filles plus âgées, avec un meilleur niveau et le top mondial en heptathlon est européen : les dix premières places ne sont donc pas facilement accessibles. Alors je verrai par rapport à mes records personnels. »

Invitée en mars aux championnats d’Europe en salle à Göteborg, elle avait atteint la 6e place en égalant sa meilleure performance à la hauteur en indoor. En juillet, elle décrochait la médaille d’or aux championnats d’Europe juniors à Rieti (en Italie) en battant ses records personnels au 100 mètres haies, au poids, à la longueur, au javelot et au 800 mètres ! Par la même occasion, elle battait le record de Belgique d’heptathlon de Tia Hellebaut.

Pour ce qui est de ses performances futures, Nafissatou Thiam, qui se refuse aussi à conjurer le mauvais sort avec des objets fétiches, en compétition, de peur de les oublier un jour, peut compter sur son statut d’étudiante sportive à l’ULg qui va lui permettre d’étaler son bachelier sur quatre ans. « A la base, j’avais pris 45 crédits sur 60 à la rentrée mais j’ai dû redescendre à 38 car c’est assez dur d’étudier après les entraînements. » Depuis l’an passé, le fait d’avoir emménagé dans un kot lui épargne tout de même les trajets en train entre Rhisnes (près de Namur) et Liège, mais le temps gagné n’ira pas aux loisirs. « Je m’entraîne au RFCL depuis cinq ans et l’athlétisme a toujours été mon seul loisir. Etant d’origine sénégalaise [mais née à Bruxelles, ndlr], j’aurais voulu aller au Sénégal avec mes frères et ma soeur mais ça n’a pas été possible à cause de l’athlétisme. Il me reste quelques sorties, la musique et des festivals en été », résume cette étudiante pas banale, qui vient d’être récompensée par le Spike d’Or 2013.

Par contre, elle ne pourra plus ingurgiter tous les aliments gras ou sucrés dont elle raffole et qui font office de religion culinaire dans les festivals estivaux. Bonbons, chips et autres hamburgers des fast food seront impitoyablement éradiqués par son nutritionniste, dans un nouveau régime visant à améliorer ses performances. Un sacrifice consenti : « J’adore l’athlétisme. Les voyages et la compétition en valent la peine. Ce qu’on vit est incroyable ! Et quand j’ai un coup de mou, dans les moments parfois difficiles, je repense à tout ça. »

Fabrice Terlonge
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