Bientôt la Saint-Torè

« C’est nous les étudiants. En ingénieur à Liège. La meilleure Faculté. C’est Polytech vous m’entendez. La meilleure Faculté. C’est les Sciences appliquées. » Dans ses phrases liminaires, le chant facultaire des ingénieurs se révèle plus présomptueux que licencieux. Mais force est de reconnaître que, au fil des années, ces buveurs supposés de perroquets (bière aromatisée au sirop de menthe, couleur de leurs toges) se sont effectivement positionnés comme l’un des comités de baptême les plus sérieux, les plus ouverts et les plus actifs de la sphère folklorique estudiantine. Mais, à lire cette assertion, les Philo, Droit, Archi et autres Médecine mordront la visière de leur penne en jurant qu’ils sont bien sûr respectivement les meilleurs et que les locataires du bâtiment B52 ont aussi le cou au moins aussi large que celui de leur volatile fétiche. Cependant, alors que l’éphéméride est aux célèbres Trottis – l’un des temps forts de la Saint-Torè –, ces derniers ont de quoi remettre les pendules à l’heure en quelques chiffres éloquents : « Les 4h Trottinettes de Liège, c’est 10 000 personnes, 200 participants à la course, 22 000 watts de sono, 14 bars et 10 000 litres de bière », rappelle Valère Hotterbeex, l’actuel président du comité de baptême Ingé, organisateur de l’événement.

D’abord sous-commission de l’Association royale des élèves des écoles spéciales (AEES), qui est quasiment née lors de la création de la Faculté, le comité – devenu indépendant – est donc centenaire et peut également se targuer de n’avoir pas connu d’interruption de ses activités dans les années 80, comme ce fut le cas pour la majorité de ses homologues. « En gros, chez eux, c’est très structuré. Ils ne donnent de toge qu’en 3e année, leurs événements sont hyper bien organisés, ils paient toujours leurs factures et ils ont un vrai esprit de groupe », résume un ancien président de l’Agel toujours actif dans la pérennisation de la guindaille. « Mais ils sont devenus plus financiers que folkloriques », tempère un autre protagoniste des festivités étudiantes.

« Chaque section tient un bar et conserve la majeure partie du bénéfice pour l’organisation du voyage de fin d’études, explique Valère Hotterbeex. Il s’agit de quelques centaines d’euros. Par ailleurs, une partie de ce qui revient au comité de baptême est reversée à la fondation “Salus Sanguinis” qui soutient la recherche dans les maladies du sang, de la moelle osseuse et des ganglions. Chaque année, cela représente un chèque de plus ou moins 1000 euros. »

Plutôt responsables et partageurs de valeurs, les “ingés” sont aussi attachés au maintien d’une continuité. En témoigne leur site internet régulièrement mis à jour depuis des années, qui mentionne le nom des anciens responsables depuis 1988. « Il y a un passage de témoin et un suivi de la part des anciens. On leur demande souvent conseil et ils nous aident à poser des garde-fous », confirme Valère. Une transmission d’expérience qui conduit aussi à des traditions parfois très pragmatiques comme celle qui consiste à dormir chaque année au pied de la célèbre fosse à boue fraîchement creusée et qui transforme chaque année les tabliers blancs en sarcophages boueux à l’odeur fermière. « Certaines années, de petits malins venaient la reboucher avant l’événement. Alors, il fallait bien trouver la parade ! »