Mars 2014 /232

Interactivités

Les prévisions des climatologues sont alarmistes pour certains pays d’Asie et d’Afrique.
Pensez-vous que la Belgique est à l’abri? Que faire pour éviter un scénario catastrophe ?

DufranneSamuelJe ne pense pas que la Belgique soit à l’abri, et ce sur deux plans.

Premièrement, directement chez nous : les années météo anormales se succèdent, avec leurs lots de tempêtes, intempéries et dégâts divers. La Grande-Bretagne passe l’hiver les pieds dans l’eau. Je pense que cela se répercutera, de manière très concrète, p.ex. dans des augmentations de prime d’assurance habitation, vu le risque croissant de voir sa toiture arrachée ou sa cave inondée.

Deuxièmement, ce qui arrive en Asie ou en Afrique nous touche toujours même indirectement. Les productions sont mondialisées : si une région cesse de produire, cela peut faire trembler notre économie. Par ailleurs, la montée des eaux consécutive au réchauffement va entraîner de grands exodes et déstabiliser des régions entières. De nouveau, cela nous impactera : le prix des matières premières, p.ex., est toujours fonction des équilibres géopolitiques.

Pour éviter le scénario catastrophe, il faut donner plus de voix aux mouvements qui agissent pour une sortie du modèle néo-libéral, et qui proposent de développer une approche durable, c.à.d. qui prend en compte la question des ressources au moment de poser tout type de choix. Chacun là où il vit peut poser des choix simples : p.ex. le vélo ou le transport en commun plutôt que l’auto, l’achat local et qualitatif plutôt que la surconsommation et la malbouffe. Et en même temps redécouvrir le bonheur simple d’un vivre-ensemble plus chaleureux et solidaire.
Samuel Dufranne, alumni (licence en information et communication, 2003)

florianne simon 2Alors oui, c’est certain. Le réchauffement climatique est à nos portes. Tous les modèles mathématiques s’accordent sur ce fait. Bientôt palmiers et bananiers orneront les plages de la Mer du Nord. Blankenberge et Ostende, villes englouties, offriront leurs charmes aux touristes en combinaison de plongée Flamands et wallons cohabiteront de manière constructive et fraternelle dans ce qui restera de la Belgique.

Il vous faut une preuve ? Et bien, dites-moi où est passé l’hiver ? Parce qu’il semble avoir raté le rendez-vous cette année ! Donc, oui. Nous allons au devant de jours sombres. Oui, nous courrons à la catastrophe. Alors, oui, tremblons ! Vivons dans l’angoisse d’une apocalypse imminente et consommons compulsivement. Noyons nos craintes dans la consommation débridée (de produits éco-friendly à la production allégée en CO2 bien sûr!), car si cela n’est d’aucune aide au problème qui nous préoccupe, cela aura, au moins, le mérite de soutenir notre sacro-sainte croissance économique.

Ouste aux septiques, au diable l’effet papillon, terreur des modèles mathématiques, nous l’avons notre démon de Laplace : le réchauffement climatique est certain, tout autant que la cause humaine, reste juste à s’entendre sur le nombre de degrés et de centimètres (mètres?) qu’on va prendre.

Erreur !! Ce serait aller un peu vite en besogne ! Ce serait oublier qu’on ne peut extrapoler qu’à partir de faits connus vers des conséquences connues. Ce serait oublier que l’histoire de la mesure et de l’enregistrement des données climatiques est fort courte et que prédire l’avenir sur cette base est un peu présomptueux.

Mais, halte là, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Je ne nie pas le réchauffement global : les mesures sont là pour le démontrer. Je mets en doute la prédiction des conséquences ! Car, après tout, cela pourrait même être pire que prévu. Certains scientifiques pensent que ce réchauffement brutal aurait une incidence sur toute la circulation atmosphérique et océanique et que cela pourrait provoquer le déclenchement d’une nouvelle ère glaciaire (pour rappel, nous vivons actuellement dans une période interglaciaire, donc “chaude”, qu’on appelle Holocène). Pour avoir une idée, sans trop entrer dans les détails, en Europe au plus fort de la dernière glaciation, la Scandinavie, l’Islande, l’Irlande et la majeure partie du Royaume-Uni, ainsi que les chaînes de montagnes étaient recouvertes par des calottes glaciaires (comme l’Antarctique à l’heure actuelle)... Pire, je vous disais !

On est bien avancé là ! Où ça nous mène tout ça ? A rien, à mon sens... On ne peut pas plus prédire l’avenir avec un modèle mathématique qu’une voyante avec un jeu de cartes. C’est assez radical comme point de vue, je consens. Mais après tout, si on y réfléchit bien, la centrale de Tihange pourrait bien exploser, une guerre éclater, une épidémie décimer la population... sans nous laisser l’occasion de voir les conséquences de ce réchauffement climatique !

Au fond, le problème est ailleurs ! Le problème, ce n’est pas le climat, il a toujours fluctué depuis la nuit des temps et il continuera, avec ou sans nous, à cause de nous ou pour une toute autre raison. Le problème, c’est le mode de fonctionnement de notre société. Et par “société” je ne parle pas d’une entité abstraite et supérieure, je parle de vous et moi ; je parle des actes, des choix, des interactions que tous les êtres humains ont entre eux. Cela implique que chacun d’entre nous porte la responsabilité du fonctionnement de cette société. Et le problème fondamental est le suivant : nous avons oublié que rien n’est jamais acquis, nous avons cru dur comme fer en la supériorité de l’être humain sur tout le reste, nous avons cru que nous pouvions adapter notre environnement à notre guise... Le fait est que notre environnement n’est pas en équilibre statique, il fluctue autour d’un état d’équilibre au gré des modifications qui lui sont imposées. Les modifications ont été nombreuses et les réactions peuvent être plus ou moins violentes.

Il est donc peut être temps de devenir humble, de donner à notre environnement (par environnement, j’entends, tout ce qui nous entoure, vivant ou non, humain ou non) le respect qu’il mérite. Il est temps de comprendre que c’est à nous de nous adapter, de se dire que quand on a construit sa maison sur la plage et que la mer vient lécher le seuil de notre porte, ce n’est pas le moment de faire jouer l’assurance, c’est le moment de déménager... On me répliquera sans doute que ce n’est pas aussi simple... Et je rétorquerai qu’aucun choix n’est simple, tous les choix impliquent des conséquences et une prise de responsabilité...

En conclusion, je pense que oui, sans doute y aura-t-il un réchauffement climatique global, et oui, sans doute y aura-t-il des pertes, des dégâts et des jours sombres. Sans doute ces conséquences se feront sentir plus violemment pour certains que pour d’autres (pensez donc à tous les prospecteurs pétroliers qui se réjouissent déjà de la fonte des glaces en Arctique !). Mais il y a une solution, et elle nous appartient à tous, à notre échelle : la résilience. C’est à dire la capacité à s’adapter à un environnement changeant. Pour une société basée sur les acquis et sur la croissance continue, c’est un changement fondamental... mais nécessaire !
Florianne Simon, alumni (licence en sciences géographiques, 2008)

LeBussyQuentinMa perception mélange deux notions liées mais différentes : climat et météo. Le climat nous influe tous, mais de loin en loin tel le célèbre battement d’aile d’un papillon, tandis que la météo est une préoccupation quotidienne, surtout dans un métier saisonnier comme le mien (et a fortiori quand on a des enfants en bas âge).

Ce qui me marque c’est la fréquence désormais régulière des événements extrêmes, certes dans des pays lointains qui paient le plus lourd tribu à nos comportements : carbone, pollution, etc. Mais également dans nos contrées : tempêtes, inondations à répétition. Ce qui marquera les esprits ce sera je pense quand on aura les premiers feux de forêts estivaux de grande ampleur en Ardenne, comme il y en a déjà en bord de méditerranée chaque été – et je suis persuadé que ça arrivera plus vite qu’on ne le croit. Nous affrontons ça avec notre mentalité et nos moyens, mais surtout je pense avec une responsabilité décuplée : nous avons créé le modèle industriel productiviste qui prend fin aujourd’hui sur une trajectoire schumpéterienne...

Inventons un modèle économique transitionnaire, post-carbone et post-atome pour remplacer le modèle “libéralisme-pétrole-finance” qui est en train de s’écraser sous nos yeux, dans un autodafé de ses propres réussites tant économiques que sociales : fin de la croissance, environnement dégradé, inégalités au sommet, outils industriels abandonnés.
Quentin le Bussy, alumni (licence en histoire, 2002)

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