Mai 2014 /234

La bonne dose

Un projet européen pour mieux dispenser les antibiotiques

MedicamentsNous ne sommes pas tous égaux face au risque d’infection nosocomiale. en effet, ce sont les plus faibles qui courent le plus grand risque : les patients en réanimation, les personnes immunodéprimées, âgées ou encore exposées à un dispositif inva- sif comme lors d’une intubation par exemple. Parmi les maladies contractées à l’hôpital, citons les infections pneumo-respiratoires (15%) et surtout les infections urinaires (30%). Avec des consé- quences parfois tragiques. « Dans le cas de patients intubés et ventilés qui ont contracté une pneumonie à l’hôpital, 40% d’entre eux meurent des suites de l’infection nosocomiale », explique le Pr Bernard Joris du Centre d’ingénierie des protéines de l’ULg (CiP). C’est précisément à l’infection nosocomiale et l’amélioration du traitement que Bernard Joris s’est intéressé, en collaboration avec des chercheurs de l’UCL, de l’ULB et de l’UMons dans le cadre du projet medAtr financé par la région wallonne, à l’origine du projet européen MON4STRAT.

Atteindre la dose curative en continu

L’hypothèse des chercheurs était la suivante : si l’on parvenait à admi- nistrer avec plus de justesse les antibiotiques et à adapter rapide- ment la dose en fonction de l’état physiologique des patients admis aux soins intensifs, cela pourrait permettre d’améliorer le taux et la vitesse de leur guérison. l’idéal serait d’atteindre une dose curative d’antibiotiques tout au long du traitement.

Ce n’est pas le cas actuellement, car le volume de distribution des antibiotiques peut varier considérablement selon l’état du malade. Or si une surdose d’antibiotiques garantit l’élimination de la bacté- rie, elle peut aussi être toxique pour le malade. « Et lorsque la dose n’est pas suffisante, l’antibiotique ne vient pas à bout de la bactérie, ce qui d’une part peut conduire à une septicémie et, d’autre part, favorise la résistance des bactéries au médicament », reprend Bernard Joris. L’objectif du projet medATR était donc de mettre au point une méthode rapide de dosage des antibiotiques bêta-lactames au chevet des patients ventilés et intubés atteints d’une infection pneumo-respiratoire nosocomiale. Objectif atteint. un brevet mondial a été déposé dans la foulée (et un accord de licence avec la société wallonne WOW technology) tandis qu’un nouveau projet européen coordonné par Bernard Joris, MON4STRAT, vient d’être lancé au mois de février pour une durée de quatre ans.

Son but est de vérifier l’intérêt thérapeutique de la méthode mise au point dans le cadre de medATR. « Aujourd’hui, pour mesurer la dose d’antibiotiques dans un échantillon, il faut passer par un laboratoire clinique qui utilise la technique HPLC couplée à la spectrométrie de masse. On obtient les résultats environ 24 heures après le prélèvement. C’est trop long, d’autant que ceux-ci ne reflètent parfois plus l’état du patient », explique le Pr Joris.

Un appareil adapté aux soins intensifs

La première étape du projet consistera à créer une machine sur table roulante, adaptée aux services de soins intensifs des hôpitaux. suivront ensuite la validation de la méthode de dosage, la mise au point d’un logiciel d’aide à la prise de décision et la formation des infirmiers à l’utilisation de ce nouvel appareil. le principe en est simple : récolter un échantillon de sang et le faire analyser dans l’appareil. Celui-ci, 30 minutes plus tard, donnera la concentration de l’antibiotique ainsi qu’une proposition d’adaptation de sa dose, en tenant compte de l’état du patient. une fois ces différents aspects réglés, les effets d’une prise en charge quasi instantanée au chevet du patient dans les hôpitaux partenaires du projet à Bruxelles, Madrid, Paris, Lille et Tartu (Estonie) pourront être évalués. les effets bénéfiques de cette méthode seront mesurés au moyen de trois critères : l’augmentation du pourcentage de guérison, la diminution de la durée du traitement antibiotique nécessaire et la diminution du phénomène de résistance des bactéries qui en sont responsables.
 

Audrey Binet
Photos © ULg - Michel Houet
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