Le 8 juin 1976

Si l’écrivain Georges Simenon doit sa renommée internationale à l’invention du célèbre commissaire Maigret, son oeuvre s’étend bien au-delà de ce personnage emblématique des années 30. Cet autodidacte de génie écrivait, en effet, un roman en sept jours. Animé par une frénésie d’écriture compulsive, il a publié plus de 155 nouvelles et 200 romans sous son propre nom et de nombreux autres textes sous divers pseudonymes. Simenon a laissé dans son sillage une production littéraire riche et abondante, dont la majeure partie est détenue par l’université de Liège.

Amitié

Dès son arrivée à l’ULg dans les années 60, le Pr Maurice Piron, spécialisé en littérature contemporaine, a entrepris de développer les études sur la littérature belge. Il a notamment organisé une année de cours entièrement consacrés à Simenon avec l’aide de ses assistants d’alors, Jacques Dubois, Danièle Latin, Claudine Gothot-Mersch et Jean-Marie Klinkenberg ; l’amitié qu’il entretint avec l’écrivain leur donna à tous deux l’idée de rassembler les archives de celui-ci.

Photo : Georges Simenon (à droite) à Lausanne avec le Pr Maurice Piron, le 9 juin 1976.

Comme l’explique le Pr émérite Danielle Bajomée, « à la fin de sa vie, Simenon était reconnu comme un auteur à succès auprès du grand public, mais restait peu étudié par la communauté scientifique ». Cet intérêt nouveau provenant du milieu universitaire l’a véritablement bouleversé. « Il redoutait de plus que son oeuvre soit dispersée après sa mort, poursuit-elle. C’est pourquoi, de son vivant, Simenon a légué à l’Université tous les documents et les manuscrits qu’il avait soigneusement collectés depuis l’âge de 16 ans. »

Cette donation prestigieuse faite en 1976 est à l’origine de la création du Fonds Simenon, lequel a d’abord été conservé à la Bibliothèque générale avant d’être déplacé au château de Colonster. Parmi ce patrimoine considérable figurent notamment 80 manuscrits, des articles de presse, différentes éditions et traductions des oeuvres, des photos prises lors du tour du monde qu’effectua Simenon pour des journaux, des effets personnels comme son bureau, sa machine à écrire, son fétiche africain, le “Tikki”, ses pipes et, enfin, diverses correspondances avec des éditeurs et des personnalités telles que Jean Renoir, Federico Fellini ou encore Jean Cocteau.

Dans la foulée, le conseil d’administration a créé le Centre d’études Georges Simenon, dans le but de faire connaître et de valoriser cette mine d’informations précieuses. Présidé par Danielle Bajomée depuis les années 80, le centre opère avec un grand dynamisme sur le territoire belge mais aussi à sur la scène internationale. Il organise tous les deux ans un colloque rassemblant jeunes chercheurs et spécialistes reconnus. Il publie également la revue annuelle Traces qui regroupe des articles sur le romancier né à Liège, ainsi que les communications prononcées lors des colloques.

Rayonnement de l’oeuvre

Grâce aux activités du centre, le Fonds attire chaque année de nombreux chercheurs et doctorants du monde entier. Il est également sans cesse sollicité pour des prêts, des demandes de collaborations ou encore des adaptations. En 2003, de nombreuses pièces ont été prêtées pour une exposition de photographies au Musée du Jeu de Paume à Paris et pour l’exposition “Simenon..., un siècle”, organisée à Liège à l’occasion du centenaire de la naissance de l’écrivain. Le centre et le Fonds Simenon sont indissociables dans la préservation, la transmission et le rayonnement de l’oeuvre de l’écrivain liégeois. Quant à l’espoir d’un musée Simenon, les discussions et les propositions se multiplient, mais aucune décision n’a encore vu le jour.