Novembre 2015 /248

Espoir d’un nouveau traitement

Le laboratoire de recherche sur les métastases du GIGA-ULg entrouve une piste sérieuse pour un prochain traitement.

Parmi les cancers du sein, celui dit “triple négatif”, résiste à l’arsenal thérapeutique actuel. L’équipe d’Andrei Turtoi, du laboratoire de recherche sur les métastases du GIGA-ULg, entrouve une piste sérieuse pour un prochain traitement.

CancerSeinParue dans la revue prestigieuse Plos-Medicine, l’étude dirigée par Andrei Turtoi laisse entrevoir un espoir dans la lutte contre le cancer du sein triple négatif. Alors qu’il concerne 15% des patientes, il ne bénéficie que de traitements standards – chimiothérapie, radiothérapie et/ou chirurgie –, contrairement aux cancers présentant des récepteurs aux hormones (oestrogènes et progestérone) contre lesquels nous disposons des thérapeutiques hormonales ciblées. Idem lorsque la tumeur possède des récepteurs à l’oncogène HER-2 en trop grandes quantités, ce qui favorise la prolifération des cellules cancéreuses. « Au fil de nos recherches, notre attention a été attirée par l’asporine, une molécule – dont l’un des variants avait déjà été mis au jour par une équipe japonaise – impliquée dans des maladies articulaires comme l’arthrite. Mais son rôle ou son implication dans le cancer était jusqu’à ce jour inconnus », explique le Pr Vincent Castronovo, qui a supervisé l’étude.

Eficacité de l’asporine

« Cette molécule est produite par les fibroblastes du stroma du sein, lorsque des cellules cancéreuses essayent de se développer, confie Andrei Turtoi. L’asporine joue alors le rôle de mur protecteur pour empêcher les cellules cancéreuses de proliférer, d’envahir les tissus sains et de former des métastases. Le stroma essaye donc de nous protéger. Pourtant, certaines cellules malignes parviennent à le forcer, à l’utiliser pour favoriser leur prolifération, notamment en lui ordonnant de ne pas produire d’asporine. C’est le cas des cellules cancéreuses les plus agressives qui vont alors envahir le sein et former des métastases, même à distance. C’est ce qui explique l’agressivité de ce type de cancer. »

Ces recherches ont mis en évidence que, dans le cas de cancers hormonodépendants, l’ordre de ne pas produire d’asporine n’est pas donné : du coup, chez les souris, leur taux est quatre fois supérieur à ceux des souris qui ont un cancer du sein triple négatif ou HER-2+. Et une étude examinant la survie de 375 patientes atteintes d’un cancer triple négatif sur une période de 25 ans montre que le taux de survie est 42% moindre chez celles qui présentent des taux d’asporine faibles.

C’est le TGF-β1, un facteur de croissance, qui est chargé d’inciter les fibroblastes du stroma à produire l’asporine. Or, même si on en injecte à la souris atteinte de cancer triple négatif, on n’assiste pas à une production accrue d’asporine. Cette injection ne suffit donc pas à contrer l’ordre donné par les cellules cancéreuses, dont le message est transmis par l’interleukine-1β (IL-1β), une substance bien connue impliquée dans les mécanismes inflammatoires. Or, cette IL-1β est également produite par les cellules cancéreuses les plus agressives. « En bloquant cette IL-1β, les fibroblastes du sein vont pouvoir produire librement l’asporine, et ainsi pouvoir “construire” ce mur biologique protecteur et, de là, fortement ralentir la progression cancéreuse ainsi que la formation de métastases », poursuit le Pr Castronovo. Les tests sur des souris sont sont en cours pour vérifier l’efficacité du blocage de l’activité de l’IL-1ß chez les porteuses de cellules cancéreuses triples.

Négociations

Le plus encourageant est de savoir que ce traitement existe bel et bien et est déjà commercialisé, puisqu’il est aujourd’hui prescrit à des personnes atteintes de maladies inflammatoires articulaires, en particulier l’arthrite. « Tester rapidement ce remède sur des femmes atteintes d’un cancer du sein triple négatif est envisageable. Je pense qu’endéans six mois nous pourrons clairement démontrer son efficacité chez la souris et, qu’après ce délai, il pourrait être possible de passer à une administration chez les femmes. » Les négociations avec le laboratoire pharmaceutique qui commercialise ce traitement sont en cours.

article complet sur www.reflexions.ulg.ac.be
(rubrique Vivant/médecine)

Carine Maillard
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