Novembre 2015 /248

L’église Saint-Jacques et ses soeurs

L’architecture ottonienne au crible des archéologues

Du 24 au 26 novembre prochains, l’université de Liège organise, en collaboration avec la division patrimoine de la Région wallonne, des journées d’étude consacrées à l’architecture monumentale de l’époque ottonienne en Lotharingie. Autrement dit essentiellement aux édifices religieux qui furent construits aux alentours de l’an 1000, comme c’est le cas de l’abbaye Saint-Jacques et de son église, dont Liège commémore cette année le millénaire. Au cours des 30 dernières années, la mise au jour par l’archéologie de vestiges disparus ou ignorés a en effet permis d’enrichir considérablement le corpus des édifices religieux de la période ottonienne, tant en termes de chronologie que de genèse et d’affectation.

Nouvelle méthode de datation

SaintJacquesApparu en 2002, le Corpus Architecturae Religiosae Europeae (corpus en ligne CARE) offre aujourd’hui aux chercheurs européens une base de données des édifices religieux sous forme de notices. « La première journée du colloque sera l’occasion de discuter de l’organisation technique de ce corpus qui présente l’intérêt de rassembler des églises difficiles à documenter et à dater puisque antérieures à l’an 1000, c’est-à-dire antérieures aux édifices pour lesquels on possède des ruines en élévation, en dehors du sol. Il faut donc faire des fouilles pour les connaître, comme pour la cathédrale Saint-Lambert », explique le Pr Patrick Hoffsummer, spécialiste d’archéologie médiévale et intervenant de ce colloque.
La recherche sur ce bâti spécifique nécessite donc un véritable travail en équipe. « Sans l’archéologue, le physicien ne pourra pas prendre l’échantillon carbone 14 au bon endroit. Même chose pour les terres cuites : il n’y a que l’archéologue qui peut dire qu’il ne s’agit pas de matériau de réemploi. » Aux côtés de la dendrochronologie – qui se base sur l’examen des pièces de bois –, les analyses de terres cuites comme les tuiles ou les briques apportent en effet aujourd’hui de nouveaux éléments dans la datation des édifices. « Le champ magnétique de la terre évolue au cours des âges, or l’argile possède en son sein des plaquettes magnétiques qui s’orientent, au moment où elles sont cuites, dans la direction de ce champ, développe Patrick Hoffsummer. Le discours traditionnel de l’histoire de l’art, parfois approximatif, doit donc être mis à jour en regard de ces nouvelles méthodes. »

Le cas liégeois

La deuxième journée d’étude, ouverte au public, présentera ainsi des cas spécifiques d’étude archéologique : Patrick Hoffsummer y parlera pour sa part de la très reconnaissable église de Theux, « seule église-halle romane entre la Loire et le Rhin ». La dernière matinée, consacrée à la médiation et à la transmission par les guides et les bénévoles des données issues des recherches scientifiques vers le grand public, se tiendra, de bon droit, à l’église Saint-Jacques. Car ces journées seront aussi l’occasion de rappeler que Liège fut au coeur de cette architecture ottonienne. « On doit énormément à Notger, mort en 1008, et qui fut à l’initiative de la reconstruction de la cathédrale Saint-Lambert, mais aussi de la construction de Saint-Denis et de Saint-Jean. Or, le projet de restauration de l’avant-cour de Saint-Jean pose de nouveaux problèmes de datation afin de distinguer ce qui est de Notger et ce qui ne l’est pas... » Il reviendra aux scientifiques de remettre, cette fois encore, “l’église au milieu du village”.

L’architecture monumentale de l’époque ottonienne en Lotharingie

Colloque organisé dans le cadre de la célébration du millénaire de l’ancienne abbaye Saint-Jacques à Liège, les 24, 25 et 26 novembre, à la salle académique de l’ULg, place du 20-Août 7, 4000 Liège.

Programme complet et informations sur www.abbaye-saint-jacques.be

 

Julie Luong
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