Décembre 2015 /249

L’architecture à deux c'est mieux

Caroline Goffinet, diplômée en architecture en 1999

GoffinetCarolineSix à sept tasses par jour : étudiante, Caroline Goffinet carburait à la caféine, histoire de tenir le coup face à tous les travaux à mener et les nuits blanches souvent passées à les concrétiser. 16 ans plus tard, l’architecte y va désormais mollo. Mais ces soirées passées à bûcher sur des projets n’ont pas disparu. Surtout depuis qu’elle s’est associée avec son époux, Nicolas Csik. « Une fois les enfants au lit, on peut passer des heures à bosser. Comme quand on était étudiants ! » Le couple s’était pourtant juré de ne jamais travailler ensemble. Et a tenu sa promesse durant plusieurs années. Caroline Goffinet avait été la première à obtenir son diplôme à Saint-Luc, en 1999. L’architecture était son rêve d’enfant. « Petite, je construisais des maisons pour mes poupées, se souvient-elle. En première secondaire, lors d’un cours de techno, une amie avait apporté la maquette de sa maison. Ce fut le déclic. » Après ses études, cette Cinacienne ne retourna pas dans sa ville d’origine mais resta à Liège auprès de Nicolas, qui devait encore achever son cursus. « Du coup, j’ai dû m’assumer rapidement et, pour commencer mon stage obligatoire de deux ans, j’ai saisi la première opportunité qui se présentait. » Chez un architecte qui travaillait seul. Un bon moyen d’apprendre « tout ce qui n’est pas enseigné à l’école », comme l’élaboration d’un métré et les autres aspects techniques du métier.

BESOIN DE TERRAIN

Pour sa deuxième année de stage, elle intégre L’Atelier, un gros bureau liégeois d’architecture et d’urbanisme repris aujourd’hui par Assar, bureau qui signa notamment les Galeries Saint-Lambert, Ikea à Hognoul et une station balnéaire au Maroc. Caroline Goffinet y restera trois ans, se consacrant essentiellement aux projets urbanistiques et d’aménagement du territoire. « Contrairement à mon premier job, j’ai appris à travailler en équipe. Puis ,l’un des associés est parti pour fonder son propre bureau [Pluris, ndlr] et je l’ai suivi. » Elle y restera un an, essentiellement à effectuer de la cartographie et du travail d’analyse. Trop théorique pour elle : l’aspect créatif lui manquait.

« Je voulais faire plus de terrain, raconte-t-elle. Je suis donc entrée chez Triangulum. L’équipe était plus petite et les projets variés. » Sa première mission : la construction d’une école à Jambes. Un chantier à 3 millions d’euros, qu’elle suivit presque de A à Z. « Ensuite, j’ai eu envie d’évoluer, d’avoir plus de responsabilités. Chez Triangulum, il y avait déjà trois associés, c’était difficile de se faire une place. » Le désir de se lancer seule la tenaillait. Mais pas du jour au lendemain. Pour tâter le terrain, elle trouva une place chez AAVT (Atelier d’architectes pour la ville et le territoire) à mi-temps. Trois jours par semaine au bureau à oeuvrer surtout sur des concours dans le cadre de marchés publics et du suivi de chantier, deux jours à bosser sur ses propres projets.

« Au bout d’un an, j’ai commencé à avoir trop de boulot pour moi. J’ai donc décidé de me lancer. J’ai intégré Air Lab, le bureau que Nicolas avait fondé avec un ami. Ils se sont ensuite séparés et, depuis, nous sommes tous les deux. » La collaboration se passe mieux que ce qu’ils avaient craint. « Au départ, on ne voulait pas travailler ensemble car chacun essayait d’avoir le dernier mot, d’imposer ses idées… Aujourd’hui, il arrive qu’on se chamaille, mais ça va de mieux en mieux ! Par ailleurs, l’arrivée récente d’un stagiaire a fait évoluer ce binôme dans la sérénité. »

UN MÉTIER DE CONTACTS

Pour Caroline Goffinet, travailler seule serait impensable. « C’est un métier de contacts, d’échanges ». Entre confrères mais surtout pour se construire une clientèle. Le bouche-à-oreille, il n’y a que ça qui fonctionne ! Mieux vaut dès lors connaître pas mal de monde. « Trouver ses propres projets, ce n’est pas simple. Il faut vraiment se débrouiller. » L’architecte a aussi pu compter sur ses précédents confrères, avec qui elle a gardé de bons contacts et qui n’ont pas manqué de lui envoyer des clients, en matière de consultance énergétique notamment. « Passer par plusieurs bureaux m’a à chaque fois permis d’apprendre de nouvelles choses », avoue-t-elle.

Seule lui manquait la consultance énergétique. Une corde qu’elle a depuis ajoutée à son arc, en suivant des formations spécifiques pour devenir auditeur énergétique. Un aspect du métier qui était quasi inexistant au début des années 2000. Signe parmi d’autres d’une profession en pleines mutations, auxquelles Caroline Goffinet tente de s’adapter en permanence.

« J’ai vraiment adoré mes études même si ce fût éprouvant. J’ai tissé des liens très fort avec d’autres étudiants et nous sommes restés amis. Mais ce sont des études où peut aussi régner une certaine concurrence... Etant donné que la réussite de l’année se base essentiellement sur le cours de projet, certains la jouent un peu «perso» et cela peut parfois créer des tensions au sein de la classe. Paradoxalement, ce sont des études où l’on peut aussi trouver beaucoup de solidarité. En 1re année, les anciens de 3e, 4e ou 5e nous donnaient volontier un coup de main. En échange, on venait les aider à faire leur maquette lorsqu’ils rendaient leur projet de fin d’études. »

Mélanie Geelkens
Photo : Stéphane Risack
|
Egalement dans le n°269
Éric Tamigneaux vient de recevoir le prix ACFAS Denise-Barbeau
D'un slogan à l'autre
Résultats de l'enquête auprès de "primo-arrivants" en faculté des Sciences
21 questions que se posent les Belges
Le nouveau programme fait la part belle à l’histoire de la cité
Panorama des jobs d'étudiants