Juin 2016 /255
Pédago-entrepreneurD’emblée, on ne voit guère le point commun entre un analyste-programmeur et un formateur en Mind Mapping. Pourtant, il existe. Philippe Packu (diplômé en sciences informatiques, 1994) l’incarne depuis 2013 à travers son ASBL Dessine-moi une idée. L’objectif de celui qui se dit fasciné par la cartographie mentale est d’aider les personnes à acquérir des compétences et à développer leur autonomie. Philippe Packu se souvient des raisons qui, en 1989, l’ont poussé à choisir la filière informatique de l’université de Liège, au sortir du collège Saint-Martin de Seraing : « Outre un intérêt pour cette matière et quelques pas dans la programmation, j’étais passionné par tout ce que la machine pouvait apporter à l’homme mais en même temps un peu effrayé par la tournure fantastique que la “création” pourrait prendre. Pour moi, il était important que l’informatique reste au service de l’individu et ne le remplace pas. » Une idée qui ne l’a d’ailleurs pas quitté aujourd’hui. Ce qu’il a apprécié durant ses études ? La diversité : « Le droit, la cryptographie ou encore l’économie, toutes ces matières m’ont donné cette soif d’apprendre et ce désir de curiosité qui m’habitent encore actuellement. » BUSINESS PLANAu terme de ses études, Philippe Packu – également amateur de badminton – décroche assez rapidement un premier boulot. La structure dans laquelle il évolue durant trois ans est spécialisée dans ce qu’on appellerait maintenant l’intelligence artificielle. Il la quitte pour une autre boite, de consultance cette fois, puis, en 2001, prend la direction de Bruxelles pour travailler chez Sony en qualité de business analyst. Il y reste près de 12 années avant que plusieurs phases de restructuration conduisent à son licenciement. « Or, peu de temps auparavant, se remémore-t-il, j’ai saisi l’opportunité de rencontrer, à Londres, le célèbre psychologue anglais Tony Buzan, instigateur des Mind Maps dans le monde entier. Il m’a formé aux techniques de pensée générative et analytique et m’a délivré une certification dans le domaine. » Cette semaine dans la capitale anglaise a réellement été révélatrice. « J’ai rapidement perçu les potentialités des cartes mentales appliquées aux apprentissages qui, trop souvent, se résument à retenir par cœur un jour et tout oublier le lendemain, ce qui n’a aucun sens. » En effet, le Mind Mapping est particulièrement efficace dans l’acquisition de nouvelles compétences, car il implique que l’apprenant structure la connaissance et établisse des associations cohérentes avec l’existant. Et comme l’élève réalise sa propre carte avec ses propres codes, son apprentissage s’en trouve amélioré et facilité. Du coup, il est plus attentif, retient mieux et plus longtemps. Il s’entraine alors à exploiter le référentiel produit jusqu’à ce qu’il décide que cela n’est plus nécessaire. « Dans le monde de l’entreprise que j’ai côtoyé durant presque deux décennies, développer les compétences est fondamental. On demande de pouvoir gérer une réunion, de présenter un rapport, de faire face au stress… Nous sommes dans une logique “savoir + verbe” et non “savoir”, tout court. Or, un employeur favorisera toujours le savoir-faire et le savoir-être. » QUESTION DE MÉTHODERestait donc à pouvoir concrétiser cette approche innovante en se focalisant sur la réalité et les besoins du terrain. « Heureusement, certains de mes amis enseignants ont accepté de réaliser les tests qui se sont vite avérés concluants. » Les choses commençaient à prendre forme… « J’ai une vision algorithmique des choses, assez différente des enseignants. Je les invite à découvrir, tester et appliquer cette approche dans leur pédagogie. » Aujourd’hui, Philippe Packu observe que le corps professoral est très ouvert et enthousiaste. « C’est d’autant plus vrai que je ne suis pas un des leurs et que je ne débarque pas comme un éléphant dans un magasin de porcelaine : je collabore à la construction de la pédagogie du futur, je suis devenu un pédago-entrepreneur. » « Je suis assez fier de l’ampleur qu’a prise l’ASBL en à peine trois ans, mais je dois dire que j’ai travaillé sans répit, avoue-t-il. Aujourd’hui, je dispense cette formation dans toute la Wallonie et au sein de tous les réseaux d’enseignement, ordinaire et spécialisé, principalement au niveau primaire et maternel. » Concrètement, les formations s’étendent sur deux journées et réunissent des groupes d’une vingtaine d’enseignants, logopèdes et éducateurs. Prochainement, Philippe Packu envisage la formation en entreprise, « mais sous l’angle de l’apprentissage qui reste ma marque de fabrique ».
Pierre Demoitié
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