Mars 2017 /262

Des minerais dans le gsm

Le Printemps des sciences aura lieu du 20 au 26 mars : des activités sont organisées à Arlon, à Gembloux, à La Reid, au Mont Rigi, à Saint-Hubert et à Virton.

MineraisQuels métaux composent nos gsm ? Sous la coque familière d’un téléphone, l’or, l’argent, le cuivre ou le lithium sont autant de témoins d’une histoire industrielle palpitante. Ce récit, le Pr Éric Pirard et Anna Arque, du département de génie minéral, matériaux et environnement (Gemme) de l’ULg, le racontent au cours d’ateliers ludiques. Ils démantèlent ces téléphones devant des classes et retracent un itinéraire à rebours, de la poche aux gisements de minerais. S’ils abordent leur impact écologique, ils évoquent aussi notre responsabilité de consommateurs et les conséquences géopolitiques d’une Europe qui s’est détournée des secteurs miniers et métallurgiques. Une activité dispensée dans le cadre de “Raw Materials at Schools” (RM@schools), laquelle sera proposée également lors du prochain Printemps des sciences.

DE L’ÉNERGIE JETABLE

« Un gsm est un objet familier, introduit Éric Pirard. Pourtant, la plupart des gens en savent très peu sur l’origine des matières qui le composent, leurs transports et leurs multiples transformations. » Anna Arque pose et ouvre une boîte sur la table. Elle en sort un gsm dépiauté, des lamelles de cuivre et d’aluminium, quelques pierres, des morceaux de roches et des fiches, qui énumèrent les affectations de différents matériaux : le silicium et l’indium pour l’écran, le cuivre comme conducteur, le gallium pour l’éclairage, l’or et l’argent pour les connectiques, le tungstène pour le vibreur, le lithium pour conserver et libérer l’électricité de la batterie, etc. Si la liste des matériaux est impressionnante, ils sont utilisés en quantité négligeable. La valeur résiduelle d’un gsm ne dépasse pas un dollar.

PirardEricCe gain financier dérisoire n’incite pas au recyclage qui reste lacunaire. Ce phénomène, doublé d’une espérance de vie très courte – en moyenne 18 mois pour un smartphone –, relève d’une aberration écologique sidérante. Car la route est longue jusqu’à ce qu’un téléphone soit opérationnel. Elle commence dans les mines, où sont extraites différentes roches piégeant les métaux : de la bauxite pour l’aluminium, du quartz pour l’or, de l’hématite pour le fer.… Le minerai de cuivre, par exemple, est moucheté de petites pellicules dorées composées de cuivre, de fer et de soufre (la chalcopyrite). Dans un kilogramme de ce minerai, cette petite constellation ne pèse que dix grammes. « Une fois la roche prélevée, on doit la broyer pour libérer et séparer les différents éléments. Une activité qui consomme à elle seule 1 à 2% de l’énergie produite mondialement. » Il faudra encore isoler le soufre et le fer pour arriver à une poudre composée de 99,9% de cuivre. Pour passer de la poudre à la feuille, une dernière opération est nécessaire. « Pour l’aluminium par exemple, cette étape se fait par électrolyse et consomme 15Kw/h par kilo. À une échelle industrielle, c’est énorme. Une feuille d’aluminium, c’est avant tout de l’énergie. La jeter, c’est jeter de l’électricité. Un recyclage efficace serait une première étape, mais l’idéal serait de produire des technologies durables ou facilement réparables. »

UNE PLACE À PRENDRE POUR L’EUROPE

L’atelier amène aussi une réflexion sur les activités encadrant l’exploitation de ces matières premières.
« L’Europe consomme à elle seule 20% de ces métaux et n’en produit que très peu. Elle se retrouve dans une forte position de dépendance et doit redévelopper une stratégie géopolitique concrète autour de ces activités industrielles. L’un des futurs possibles, c’est de rouvrir les mines en Europe », conclut le Pr Piard.

Le Printemps des sciences

Du 20 au 26 mars.

Programme scolaire pendant la semaine, pour le grand public durant le week-end.

* sciences.ulg.ac.be



Philippe Lecrenier
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