Avril 2017 /263
Où va l’europe?L'opinion de Sylvie Goulard
A première vue, la vague semble irrésistible. Dans un certain nombre de pays, les populistes progressent, les valeurs de coopération, de liberté et d’État de droit reculent : victoire du leave au Royaume-Uni, élection de Donald Trump aux États-Unis, durcissement du régime turc mais aussi des gouvernements polonais ou hongrois. Les uns vantent un prétendu âge d’or passé, d’autres remettent en cause des engagements et des projets constructifs (retour sur les engagements environnementaux des États-Unis, retrait de l’Union européenne pour le Royaume-Uni), voire les valeurs fondamentales de l’UE. Désormais, c’est le cadre de coopération construit au lendemain de la Seconde Guerre mondiale (plan Marshall, Communauté européenne du charbon et de l’acier, OTAN) qui est mis à mal. L’heure n’est plus aux discussions sur des mesures techniques mais aux interrogations sur l’Europe et le monde dans lesquels nous voulons vivre. Les Européens devraient prendre conscience du fait que certains songent que la destruction de l’UE pourrait rejoindre leur intérêt. Ted Malloch, qui serait pressenti comme ambassadeur américain auprès de l’UE, a appelé à spéculer contre l’euro sur les marchés. Il a aussi comparé l’UE à l’URSS, en se réjouissant à l’idée de sa destruction. Il n’est pas exclu que des réseaux proches du Kremlin tentent d’influencer le cours de l’élection présidentielle en France, après avoir peut-être pesé sur celui de l’élection américaine. Erdogan a clairement utilisé le climat préélectoral aux Pays-Bas pour galvaniser ses troupes. Dans ce contexte, les Européens gagneraient à s’unir pour défendre leurs intérêts, d’autant plus qu’à l’hostilité de certaines puissances s’ajoute un recul relatif dans le monde globalisé. En 2050, les Européens ne devraient plus représenter que 4% de la population mondiale. Bientôt, aucun État européen ne sera en mesure de faire partie du G20. En 2015, l’entrée de la devise chinoise dans le panier de monnaies de référence du FMI s’est essentiellement faite au détriment de la livre sterling et de l’euro. En matière commerciale comme sur les questions de défense ou de maîtrise des flux migratoires, l’échelon approprié, celui qui nous donne le plus de poids, est assurément le niveau européen. Les électeurs sont en droit d’attendre autre chose des pro-Européens que des arguments défensifs et pessimistes. La campagne du remain au Royaume-Uni, parfois surnommée de “project fear”, a montré les limites d’une telle stratégie. Les bénéfices de la coopération demeurent valables : émulation, économies d’échelle, création de réseaux dynamiques. L’European Research Council qui vient de fêter ses dix ans, donne la preuve que des programmes d’excellence européens permettent de résister dans la globalisation. Enfin, et surtout, quoi qu’on entende partout, la société européenne n’est pas seulement matérialiste et sclérosée. Le monde d’hier n’était pas tout rose. Une prise de conscience écologique est en cours, qui vise à réussir la transition énergétique. L’égalité entre les hommes et les femmes, bien que vulnérable, progresse : pour la moitié de la population européenne, ce continent, en ce moment, est l’un des endroits les plus favorables pour vivre. Enfin, l’économie du partage (de voitures, de prêt d’objets, les réseaux d’échanges de savoir, par exemple) aboutit à recréer des liens sociaux tandis que les entreprises développent leur responsabilité sociétale. Ainsi, les Européens demeurent inventifs et en prise avec leur temps. Ils peuvent avoir confiance en eux.
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