October 2017 /267
Semaine de l’enseignement : 4 jours pour oserApprendre à l’université, un métier à réinventer
Comment enseigner aujourd’hui à l’Université ? L’interrogation – un peu iconoclaste au sein de l’Alma mater – a le mérite de faire prendre conscience de l’évolution de la profession. De nos jours, transmettre les connaissances ne coule plus de source et l’accord tacite autour de l’école n’est plus. La société a changé, le rapport au savoir a évolué, les relations entre les étudiants et les maîtres se sont modifiées. Ces bouleversements questionnent et passionnent tour à tour. L’ULiège propose de donner la parole à tous ses enseignants le temps d’une “semaine de l’enseignement”, du 21 au 24 novembre prochains. Avec audace. Pour le premier vice-recteur Éric Haubruge, à l’initiative de la “Semaine de l’enseignement”, nous sommes à la croisée des chemins. « Le modèle actuel est ébranlé, d’une part parce que des formations existent en dehors des structures officielles et, d’autre part, parce que les métiers de demain sont à inventer. Ils requerront probablement davantage de capacités à apprendre que de diplômes… » À modèle nouveau, réponses plurielles et originales. Et si bon nombre de professeurs ont déjà repensé leurs méthodes et modifié leurs cours, l’objectif des trois journées est de proposer des échanges, des espaces de rencontres et de réflexions sur les “bonnes pratiques” mises en place çà et là, ainsi que de recueillir et de partager entre pairs les idées, les ambitions, voire les rêves des enseignants. RICHESSE DES INTERACTIONSManifestement, la génération baptisée “Y” ou encore “milléniale” (née entre 1980 et 2000) se différencie de ses aînées en ce sens qu’elle a grandi avec les nouvelles technologies. Ce sont des digital natives ! Non seulement internet et les réseaux sociaux font partie de leurs réflexes, mais en outre cette génération a accédé de manière précoce à une grande autonomie. Le changement ne lui fait pas peur : il fait partie de son quotidien. Comment les jeunes vont-ils alors acquérir les connaissances, en sachant qu’ils se démarquent aussi de leurs parents – et de leurs maîtres – en souhaitant modifier durablement la société dans laquelle ils vivent ? « Les paradoxes sont étonnants, explique Robert Charlier, président de l’Ifres et coorganisateur de la manifestation. Alors que le web leur permet de travailler de manière indépendante devant leur écran, ils sont légion à s’installer dans les bibliothèques pendant la bloque et ils restent davantage dans les salles de cours après ceux-ci. Aux réseaux sociaux (qu’ils utilisent énormément), ils préfèrent les interactions humaines et leur démarche est certainement plus collaborative qu’auparavant. » Les universités ont donc encore de beaux jours devant elles, mais elles doivent réinventer leurs méthodes, incorporant progressivement les pédagogies innovantes [voir ci-contre, quelques exemples], lesquelles permettent des interactions rapides avec le savoir, avec d’autres étudiants, d’autres intervenants. Les autorités ont d’ailleurs décidé des investissements en ce sens [voir la présentation du plan stratégique]. L’objectif de ces quatre jours “de pause” n’est pas de proposer des leçons de pédagogie, mais de mutualiser des éclairages novateurs, originaux, sur ses propres expertises. Ateliers et séances plénières rythmeront ainsi les journées consacrées à trois thématiques principales : le décloisonnement des cursus, les nouvelles technologies, le métier de professeur à l’Université. AU PROGRAMME« Concevoir des cours plus interdépendants, mettre en évidence les ponts entre disciplines cela augure d’une construction plus globale du savoir, mieux intégrée », expose Robert Charlier. Qui de mieux pour évoquer le décloisonnement que le Pr Patrick Aebischer, président de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) jusqu’à l’an dernier ? « En 2000, Patrick Aebischer a introduit les sciences de la vie au cœur des sciences de l’ingénieur, résume Éric Haubruge. Il a travaillé de concert avec les entreprises locales. Auprès des académiques, il a soutenu les projets de recherche interdisciplinaires et, globalement, a développé des structures horizontales. Son impulsion a été décisive pour hisser son École au rang d’université de premier plan. » Il ouvrira les débats le mercredi 22 novembre avec une communication sur “Les nouvelles technologies : une opportunité pour promouvoir le décloisonnement des universités ?”. Plusieurs témoignages de “décloisonnement” nourriront ensuite les échanges et l’on parlera de scénarisation nouvelle, combinaison de disciplines et classes inversées, notamment. Les nouvelles technologies constitueront un autre temps fort de ces rencontres, l’occasion de cerner leur pertinence et de mettre en avant les outils made in ULiège. Les MOOCs par exemple. « Non seulement ces cours en ligne peuvent toucher un très large public, mais ils constituent des outils intéressants pour concrétiser les “classes inversées” : l’étudiant visionne la matière et vient au cours avec des questions, des remarques, etc. L’échange est alors plus fructueux et l’apport du professeur, indéniable », souligne le Pr Charlier. Des ateliers seront animés par des chercheurs ayant une expertise dans le traitement de l’image, de la réalité virtuelle et de la simulation numérique. Le service général d’informatique (Segi), le réseau des bibliothèques et l’administration des ressources immobilières (ARI) viendront aussi faire montre de leurs réalisations et projets à disposition des enseignants. Last but not least, des tables rondes avec des étudiants sont prévues afin d’écouter leurs desiderata, leurs avis sur les formations. « Notre ambition est de concevoir des infrastructures multifonctionnelles, à la fois lieux d’apprentissage, de collaboration et de détente. Il faut stimuler le partage, l’innovation, l’interaction. D’où notre volonté de construire le “Smart Learning Center” à Liège dans plusieurs points de la ville, avec une identité spécifique pour chacun : les amphithéâtres du futur au Val-Benoît, la culture numérique et la réalité virtuelle à Bavière, le fablab au Sart-Tilman, entre autres exemples », précise encore le premier vice-Recteur. QUE LA PAROLE CIRCULE !Enfin, le vendredi matin sera consacré aux évolutions du métier d’enseignant universitaire. Quelques professeurs proposeront leur vision et leurs points de vue seront confrontés à la large enquête réalisée récemment à la demande de l’association des professeurs de l’ULiège qui a permis de mettre en évidence les regards, les perceptions des académiques sur les diverses facettes de leur profession. La Pr Gaële Goastellec, sociologue à l’université de Lausanne, directrice de l’unité de recherche “politiques et organisations de l’enseignement supérieur” et spécialiste notamment des carrières académiques et du recrutement universitaire, clôturera la Semaine de l’enseignement en évoquant le rôle, les missions et les spécificités de l’université aujourd’hui.
Patricia Janssens
Photos : Cellule eCampus - Ifres
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