Le 3 juin dernier à Colonster, le Recteur présidait une après-midi de réflexion sur le développement d'Orbi* et les mandats institutionnels Open Access. A cette occasion, l'ULg recevait le Pr Tom Cochrane, vice-chancellor de la Queensland University of Technology à Brisbane (l'une des plus grandes d'Australie, comptant 40 000 étudiants dont 5000 internationaux environ) et principal artisan de la mise en ligne des publications émanant des chercheurs de son université. Son témoignage est sans appel : l'Open Access à Queensland est à la fois une réussite et une vision d'avenir.
Le 15e jour du mois : En 2005, on estimait à 15% le volume des recherches mondiales consultables en Open Access. Qu'en est-il maintenant, cinq ans après la déclaration de Berlin sur le libre accès signée à ce jour par plus de 250 représentants du monde politique scientifique et universitaire à travers le monde, dont l'ULg en 2007 ?
Tom Cochrane : Cela a évolué, mais pas encore assez significativement, car trop peu d'institutions encouragent l'Open Access. Cependant, des décisions importantes ont été prises par des acteurs de premier plan, tels l'université de Harvard et le Massachusetts Institute of Technology (MIT). Si l'on prend le cas de l'université de Liège et de mon université, qui sont en position de leaders dans le domaine, de véritables progrès ont été faits. Chez nous à Queensland, la majorité des publications de nos chercheurs est accessible en Open Access. J'ai réussi à convaincre mes collègues, traditionnellement ouverts aux nouvelles technologies il est vrai, que c'était une tendance inévitable à laquelle il fallait adhérer. Dans la dynamique du développement de l'internet, la solution de l'Open Access est une réponse intelligente à la politique de prix agressive et inique des éditeurs de publications traditionnelles. De plus, elle offre également une visibilité accrue au plan international.
Le 15e jour : La promotion de l'Open Access ne se limite-t-elle pas à une stratégie destinée à mettre la pression sur les éditeurs de publications sur papier afin qu'ils revoient leurs tarifs à la baisse ?
T.C. : C'est un effet souhaitable et voulu. Mais dans une perspective plus lointaine, je suis convaincu que c'est le modèle économique traditionnel lui aussi qui subira une mutation et que les publications en Open Access s'imposeront comme la norme. Si quelque chose peut être publié dans le cadre d'un accord commercial, il n'y a pas de raison pour que ça ne soit pas possible en Open Access.
Le 15e jour : A votre sens, quels sont les principaux freins à cette évolution ?
T.C. : Certains chercheurs et administrateurs ont une idée floue, voire incorrecte sur pas mal de questions, notamment celle des droits d'auteur en Open Access. Il faut réexpliquer sans cesse. Par ailleurs, les éditeurs qui continuent à défendre leur business actuel représentent aussi un blocage. Mais la confusion des genres entre les responsables de revues et certains chercheurs reste pour moi le principal problème.
Le 15e jour : Quels sont néanmoins les institutions qui progressent le plus ?
T.C. : ULg et Queensland ont toutes deux passé le cap des 10 000 publications référencées sur leurs serveurs institutionnels. J'ai déjà évoqué le MIT, aux Etats-Unis. Mais d'autres en Europe, comme l'université de Southampton en Angleterre, sont également bien avancées. Reste que la prochaine étape sera de passer le cap de la publication des principales références des articles pour rendre également accessible en Open Access l'ensemble des données scientifiques. Et de mettre tout ça dans des normes compatibles. C'est un véritable défi technique, juridique et économique.
Le 15e jour : Avez-vous développé des incitants pour encourager vos chercheurs à déposer leurs publications sur votre serveur institutionnel ?
T.C. : Le principal incitant pour les chercheurs consiste dans l'augmentation très nette de la visibilité internationale et donc du nombre de citations de leurs publications que permet le système. Ce gain est très marqué pour les revues avec un haut facteur d'impact. Le Pr Ray Frost, notre recordman en ce qui concerne le nombre de téléchargements de ses publications via notre serveur institutionnel, a vu son nombre de citations relevées par ISI passer de 308 par an à plus de 1700 sur la même période et ce, dès l'instant où il a déposé ses publications en Open Access dans notre QUT ePrints !
Propos recueillis par Fabrice Terlonge
Orbi : Open Repository and Bibliography, http://orbi.ulg.ac.be/
Du côté d'Orbi Nombre de chercheurs ont profité de l'été pour faire leur "devoir de vacances" : le cap des 15 000 références est maintenant dépassé, dont plus de 11 000 avec le texte intégral. Le module de statistiques est désormais disponible et permet de dénombrer déjà plus de 170 000 consultations des publications liégeoises via Orbi (dont ¼ venant des USA !) et plus de 15 000 téléchargements. Certains auteurs ULg ont déjà vu le texte intégral de leurs publications déchargé à partir d'Orbi plus de 500 fois. Les collègues de Gembloux ainsi que les doctorants peuvent à présent également introduire leurs publications dans Orbi. Par ailleurs, les modèles de présentation des listes de publications qui serviront aux comités d'évaluation de dossiers sont en préparation. Ils seront mis en production au début de l'année académique, probablement en octobre. |