
Créé au cours de l'année académique 1994-95, le Cedem, c'est-à-dire le Centre d'études de l'ethnicité et des migrations de l'ULg, fête aujourd'hui ses 15 ans d'existence. Interfacultaire par nature, il privilégie toute recherche - théorique ou empirique - dans des domaines tels que les migrations humaines, les relations ethniques et le racisme. Il se veut par ailleurs un forum de réflexion et d'information stimulant les investigations relatives aux dynamiques culturelles, identitaires et sociales. C'est dire si les rapports au politique ne lui sont pas étrangers.
« A l'occasion de cet anniversaire, nous avons voulu marquer le coup, observe Marco Martiniello, directeur de recherche du FNRS et président du Cedem depuis sa fondation. Et à cette fin, trois grandes manifestations jalonneront la nouvelle année académique. » Un simple coup d'œil sur chacune d'entre elles en montre toute l'importance. Premier rendez-vous, les lundi 5 et mardi 6 octobre. Le premier jour, réunion du bureau du comité de recherche (RC, pour research committee) spécialisé dans les enjeux majeurs de l'immigration et de l'intégration et faisant partie de l'Association internationale de sociologie. Le deuxième, au soir, sur base d'une note de travail rédigée par ce comité sur ses conclusions de la veille, large débat ouvert au public et avec la participation de décideurs politiques internationaux autant que locaux : le discours introductif de cette rencontre sera prononcé par le Pr Rinus Penninx, coordinateur du réseau d'excellence européen IMISCOE (International Migration and Social Cohesion in Europe) dont le Cedem est membre.
« Au-delà de ces heures prometteuses où vont se parler chercheurs et décideurs, deux autres événements sont également prévus à Liège », poursuit Marco Martiniello. A savoir, en novembre, en collaboration avec le Cripel, quatre soirées de cinéma dans la salle du Théâtre universitaire royal de l'ULg, sur le thème des migrations retenu par le "colloque" d'octobre. Et, en février-mars, avec le concours de l'ambassade du Royaume-Uni, exposition de photos de l'artiste britannique Peter Sanders sur la présence des Musulmans dans la société d'Outre-Manche.
On le voit, la thématique traversant ces diverses manifestations est d'une brûlante actualité. Car il n'est un secret pour personne que les Etats, européens en particulier, sont confrontés à des flux migratoires qui ne sont pas près de s'arrêter, sans même évoquer l'impact prochain sur ceux-ci des changements climatiques en cours. « D'où la nécessité, insiste Marco Martiniello, d'un développement supranational de politiques d'immigration respectant la dignité des personnes, surtout des plus démunies, et la diversité culturelle sans laquelle le vivre-ensemble devient impossible. »
La Belgique, par sa position géopolitique, se situe au carrefour même de l'Europe migratoire. Bien avant la Seconde Guerre mondiale, elle a fait appel à des travailleurs, notamment polonais, et ces migrants se sont intégrés dans la société belge. Il en a été de même après 1945, lorsque l'économie du pays était devenue exsangue et qu'elle a fait appel aux mineurs italiens pour gagner la "bataille du charbon". Puis, après la catastrophe de Marcinelle, elle se tourna vers l'Espagne (1956), la Grèce (1957), le Maroc (1964), etc. Pourquoi ce qui a été réussi autrefois - certes avec parfois des accès de fièvre xénophobe - ne pourrait-il pas l'être à terme de nos jours avec des migrants ou des réfugiés venus de contrées plus lointaines, notamment subsahariennes ? Et ce, en dépit de la crise. « Pour cela, rappelle Marco Martiniello, puisque l'Histoire a toujours connu des déplacements de populations et qu'ils ne sont pas près de s'arrêter, l'Etat et les institutions ont un rôle essentiel à jouer. Sans tarder, bien sûr. » Raison de plus pour estimer bienvenues les initiatives du Cedem qui, à égale distance d'un angélisme irresponsable et d'une perspective d'immigration zéro illusoire, entendent à leur manière éperonner des politiques publiques plus efficaces. Et à dimension humaine.
Henri Deleersnijder
| Migrations et intégration : quels enjeux pour demain? Rencontre les 5 et 6 octobre La partie publique aura lieu le mardi 6 octobre, à 18h. Salle académique, place du 20-Août 7, 4000 Liège |