Avril 2008 /173
Avril 2008 /173

Pensée standardisée ?

Coups de projecteur sur les discours universitaires

 

salle aca018
©J.-L. Wertz
 

Compétence, compétitivité, excellence, flexibilité, globalisation, harmonisation, libéralisation, savoir-faire et tutti quanti... Notre quotidien résonne de ces mots-massues qui nous intiment de nous adapter sous peine d'être relégués comme des has been. Partie prenante d'une époque en proie à une mutation galopante, l'université n'échappe évidemment pas aux exigences sans cesse plus prégnantes que véhiculent ces termes. Le processus de Bologne, lancé en mai 1998, se voulait déjà une réponse "incontournable" aux nouvelles demandes de la société de la connaissance.

Il est par contre plus rare que le monde universitaire, contraint de s'internationaliser, s'interroge sur les discours qu'il produit et diffuse, ceux-ci pouvant indistinctement émaner de ses enseignants, chercheurs et étudiants dans l'exercice de leurs fonctions. Les 24, 25 et 26 avril prochains cependant - à l'occasion d'un colloque organisé par l'ULB, l'ULg et l'UCL -, il se propose de remédier à cette lacune en se donnant un objectif ambitieux : procéder à l'analyse de ses productions linguistiques et discursives.

« Cette rencontre interacadémique donnera aux universitaires la possibilité d'examiner à la loupe leur outil de travail en général et, plus particulièrement, les enjeux - notamment épistémologiques et idéologiques - d'une uniformisation des discours scientifiques », annonce Jean-Marc Defays, directeur de l'Institut supérieur des langues vivantes (ISLV) et membre du comité organisateur du colloque. Car, ajoute-t-il, « il ne faudrait pas que l'internationalisation aboutisse insidieusement à une standardisation ou normalisation rampante des discours, voire à un formatage de la pensée ». Et de se demander si, aujourd'hui, Descartes trouverait un éditeur...

C'est que, à l'heure du triomphe de l'anglais, des contraintes technologiques et de la rentabilité à court terme, être publié pourrait devenir de plus en plus difficile, surtout si l'on continue de privilégier dans ses démarches le qualitatif plutôt que le quantitatif. « Les recherches dépourvues de valeurs numériques ne sont pas prises au sérieux », regrette Jean-Marc Defays. Qui observe, en guise de pari sur l'avenir, que « la créativité se fait toujours, peu ou prou, en-dehors des normes et que l'esprit inventif n'a pas à se laisser corseter par des exigences et autres présupposés technico-économiques. » C'est donc tout à l'honneur de l'institution universitaire de se préoccuper des caractéristiques, modalités et finalités des discours qu'elle façonne et qui - dimension non négligeable - la façonnent.

Henri Deleersnijder

 

 

"Les discours universitaires : formes, pratiques, mutations"

Colloque international organisé par l'ULB, l'ULg et l'UCL du 24 au 26 avril.

Fondation universitaire, rue d'Egmont 11, 1000 Bruxelles

 

 

 

www.ulb.ac.be/philo/dll/colloques/discours_universitaire/
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