Les revues électroniques, d’accès libre et gratuit, ont la cote depuis un certain temps. Celle appelée Interval(le)s* émane du Centre interdisciplinaire de poétique appliquée (Cipa). Elle consacre chacun de ses numéros, à concurrence de deux par an, à un thème fédérateur autour duquel se rencontrent des chercheurs issus de disciplines différentes. Les deux derniers numéros parus sont consacrés respectivement au “Ventre de l’écrivain” et à l’œuvre d’Emilio Salgari, un numéro co-dirigé par Luciano Curreri, professeur de langue et littérature italiennes et Fabrizio Foni, titulaire d’une bourse de post-doctorat à l’ULg.
« L’interdisciplinarité est le maître mot de notre démarche et le Cipa est né de cette exigence, insiste d’emblée Michel Deville, directeur de la revue et professeur de littérature anglaise moderne et de littérature comparée à l’ULg. Débordant du champ littéraire proprement dit, la poétique – conçue en tant que théorie générale des formes d’expression artistiques – s’applique en fait à plusieurs domaines de la création artistique et en appelle dès lors à divers paradigmes théoriques, lesquels dépassent nécessairement les clivages instaurés par les branches traditionnelles de la connaissance. Plus concrètement, notre centre donne l’occasion à des membres de la Faculté de s’associer dans un projet de réflexion commune. » Initiative d’autant plus intéressante que, dans l’Institution et ailleurs dans le monde universitaire, l’heure est à l’émergence de nouvelles filières “mixtes” permettant aux étudiants de combiner plusieurs secteurs d’études.
Les colloques organisés à ce jour par l’équipe du Cipa – réunissant des chercheurs de l’ULg mais aussi des collaborateurs extérieurs – témoignent de cette volonté de se faire croiser des méthodes tentant d’étudier les langages littéraires, musicaux et plastiques à la fois dans leur spécificité et dans leurs problématiques transversales. Tel était le cas, en 2004, de celui consacré à la “Mosaïque” et de celui de 2007 intitulé “Détail et totalité”. Et Michel Delville de dévoiler le thème du colloque de l’année prochaine: « C’est la “boucle” qui, cette fois, a été retenue, conçue comme une forme de répétition faisant retour sur elle-même. Impossible d’envisager ce phénomène sans faire appel à la dimension historique.Avec ce genre de sujets susceptibles à coup sûr d’amener plusieurs experts autour d’une table, c’est manifestement le travail en équipe qui prévaut. On arrive alors à faire dialoguer les gens, ce qui est différent de l’aspect dual du comparatisme: là sont simplement confrontés, portés par des individus, deux textes, deux tableaux, deux domaines culturels, etc. A quoi il convient d’ajouter la dimension théorique de l’interdisciplinarité qui devient elle-même un sujet d’investigation, à la façon d’une mise en abîme. « Dans cette optique, on peut partir d’un écrit de Kant ou de Hegel et essayer d’utiliser les conclusions auxquelles sont arrivées ces philosophes dans le cadre de l’analyse de textes littéraires ou d’objets visuels », conclut Michel Delville qui ne manque pas de faire observer que d’autres projets, aussi novateurs, sont en cours.
Henri Deleersnijder
* Interval(le)s en ligne à l’adresse www.cipa.ulg.ac.be