Clusters de compétition

Théoriciens et managers se penchent sur les pôles de compétitivité

Fourbir ses armes, surtout dans une conjoncture économique mondiale qui ne s’annonce pas comme des plus favorables, s’impose comme un truisme. Et si l’on considère que chaque région gagne à se spécialiser et à créer un réseau d’entreprises dans les domaines où elle possède un avantage relatif, pour se doter d’une avance concurrentielle, l’on touche à la théorie des pôles de compétence géographique (clustering) dont Michael Porter, professeur à Harvard, est le mentor. Christian Ketels, l’un de ses principaux collaborateurs, devrait justement clôturer le colloque international sur les pôles de compétitivité qui se déroulera dans les bâtiments de l’Ecole de gestion (HEC-ULg), les lundi 2 et mardi 3 mars prochains.

Plan Marschall

Outre qu’il accueillera 60 intervenants académiques internationaux (France, Brésil, Mali, Espagne, Uruguay, Maroc, etc.), la particularité exceptionnelle de ce colloque de haut vol réside dans le fait qu’il scellera, par les praticiens, la confrontation entre les idées des académiques et leur implémentation dans la réalité. En d’autres termes : un brainstorming entre les théoriciens universitaires et les managers des réseaux d’entreprises.

C’est dans le cadre du plan Marshall que la Région wallonne avait sélectionné, en 2005, cinq domaines prioritaires et performants pour impulser sa politique de pôles de compétitivité : Skywin (aéronautique et spatial), Wagalim (agro-industrie), Mecatech (génie mécanique), Biowin (santé) et Logistics in Wallonia (transport et logistique). Mais à côté de ces poids lourds tels que CMI, TNT ou Arcelor, d’autres groupements d’entreprises wallonnes, spécialisées dans des domaines d’activités plus pointus (l’optométrie ou certains types de plastiques, par exemple) se sont également rapprochés en clusters, des réseaux moins formels favorisant l’organisation concertée de conférences, de bourses ou de campagnes de promotion.

C’est cette dynamique qui a poussé Jean-Claude Marcourt, ministre de l’Economie, de l’Emploi et du Commerce extérieur de la Région wallonne, à encourager et à soutenir financièrement l’organisation d’un colloque ouvert sur les pôles.

Du côté académique, on retrouve Henri Capron, professeur à l’ULB. « Il est un peu comme le père du plan Marshall. C’est au départ de l’une de ses études qu’ont été définis les pôles de compétitivités wallons », souligne le Pr Allard Van Riel (HEC-ULg). Avec Alain Schoon, professeur à la Fucam et directeur du Serp (Systèmes économiques, régionaux et publics), le trio constitue le comité scientifique du colloque.

« Le rôle des pôles, c’est de réunir les différents acteurs d’un domaine, de renforcer la collaboration, même entre concurrents au sein d’une même aire géographique et de définir un calibrage international , explique le professeur. Ce dernier point est d’ailleurs l’une des questions-phares adhérant aux enjeux actuels des politiques de clustering, puisque l’une des ambitions de la Commission européenne repose sur la création de “world-class clusters”. »

Niveau mondial

Comment réussir à créer ces clusters de classe mondiale, comme il n’en existe encore nulle part ? Cette question sera disséquée, parmi d’autres, au cours des quatre tables rondes organisées le mardi, et qui rassembleront chacune un représentant des cinq pôles de compétitivité autour des divers participants académiques et acteurs économiques. Au menu : gouvernance des réseaux d’entreprises, internationalisation, développement des compétences dans ou par les pôles, et rôle des PME dans ces structures. Quatre thèmes auront également été débattus la veille, jour uniquement réservé aux académiques où l’on parlera aussi des questions relatives à l’évaluation, à l’innovation et à la pertinence de la politique publique de clustering en tant qu’outil de développement régional.

Enfin, des navettes établiront un pont entre le lieu du colloque et le Palais des congrès où se tiendra Créawal, le forum des acteurs d’entreprises. Histoire de réaffirmer le caractère transversal du colloque.

Fabrice Terlonge