Décembre 2009 /189

Le plein d’énergie

La thermodynamique toujours plus efficace

EnergieSolaireA côté du transport, c'est dans le secteur de l'habitat résidentiel ou non que l'on s'apprête à réaliser d'importantes économies d'énergie. Si l'objectif environnemental est aujourd'hui mieux intégré, encore faut-il doter les concepteurs et gestionnaires de bâtiments d'informations fiables et de conseils efficaces. C'est le but que s'assigne le laboratoire de thermodynamique appliquée de l'ULg, aujourd'hui dirigé par Vincent Lemort, récemment nommé chargé de cours à la faculté des Sciences appliquées, succédant ainsi au Pr Jean Lebrun. L'équipe s'appuie sur sept ingénieurs, davantage "expérimentalistes" que théoriciens comme ils se définissent eux-mêmes, fortement impliqués dans des projets concrets de portée régionale et internationale.

Le bâtiment en chantier
Le laboratoire déploie ses activités dans trois domaines très interdépendants, du plus global (l'efficacité énergétique des bâtiments) au plus spécifique (le développement de prototypes de cogénération petite et moyenne puissance basés sur le cycle Rankine), en passant par l'analyse des équipements Heating Ventilation & Air-Conditioning (HVAC) des bâtiments. Les recherches débouchent le plus souvent sur la mise au point d'outils d'analyse et de modélisation mis à la disposition des architectes et des bureaux d'études, mais aussi sur des prototypes.

Le chantier de l'efficacité énergétique des bâtiments est encore béant : alors que dans nos pays la population reste stable globalement et que les techniques disponibles se perfectionnent, la consommation d'énergie continue, elle, pourtant de progresser. C'est donc le comportement des utilisateurs des bâtiments qu'il faut interroger. A la sensibilisation nécessaire, les ingénieurs privilégieront l'analyse et la modélisation des comportements afin d'en déduire l'impact sur la consommation. C'est le sens du projet Annex 53 développé par l'Agence internationale de l'énergie et auquel participe activement l'équipe de Vincent Lemort. Dans ce domaine, l'équipe liégeoise peut notamment s'appuyer sur des outils déjà développés comme Simaudit, un logiciel libre qui assiste le professionnel dans l'audit énergétique du bâtiment tertiaire (non-résidentiel). « Ce logiciel, que nous ne cessons de faire évoluer, offre l'avantage d'extraire un maximum de conclusions sur l'utilisation réelle des équipements à partir d'informations souvent incomplètes, incertaines et parfois même contradictoires », commente Stéphane Bertagnolio, doctorant au laboratoire.

La conception de ces outils d'analyse prend tout son sens à la suite de la directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments et les normes qu'elle impose en termes de réduction des consommations. Un projet comme Epicool, développé en consortium avec d'autres universités belges, vise pour les systèmes de réfrigération des habitats à définir des méthodes de calcul harmonisées. Avec Sisal, projet développé dans le cadre d'EnergyWall, le laboratoire a participé au développement d'un outil en ligne permettant le calcul rapide des performances énergétiques d'un bâtiment en fonction des installations envisagées. Par ailleurs, le laboratoire étudie la meilleure intégration possible des pompes à chaleur dans les bâtiments de bureaux, en particulier les systèmes réversibles de fourniture, successive ou concomitante, de chaud ou de froid. De leur côté, les particuliers devraient bientôt se voir proposer un nouveau type de châssis intégrant dans la structure un échangeur récupératif, assurant l'échange de chaleur entre l'air intérieur et l'air entrant, une solution idéale et simple pour la rénovation du bâtiment développée avec une société liégeoise.

Reconnu pour ses grandes compétences, le laboratoire de thermodynamique peut se flatter de poursuivre des collaborations avec des partenaires prestigieux, comme l'Ecole des mines de Paris, l'université de Tsinghua en Chine ou la Purdue University. Avec eux notamment, les ingénieurs liégeois modélisent et testent des groupes frigorifiques pour le bâtiment mais aussi pour des systèmes embarqués dans l'automobile, les trains, les rames de métro (par exemple, celui de Dubai) et même dans l'espace pour des satellites !

Electricité low cost
Ne pas gaspiller l'énergie, c'est aussi récupérer de la chaleur et s'en servir pour la convertir en énergie, mécanique ou électrique. Le principe de cette cogénération est connu depuis le XIXe siècle et a été étudié par le physicien anglais William Rankine. Il a donné son nom à un cycle thermodynamique célèbre, "le cycle de Rankine", à l'œuvre dans les bonnes vieilles machines à vapeur, celles qui ont fait la fortune de nos industries... Ce cycle est loin d'être démodé ; il est couramment utilisé dans les centrales électriques et, dans le laboratoire de Vincent Lemort, il fait l'objet de nombreuses sollicitations. « Nous cherchons en particulier comment exploiter des sources de chaleur basse température, ce qui nous amène aussi à étudier le comportement de fluides alternatifs à l'eau, des fluides organiques dont la température d'ébullition est plus basse, pour le cycle de vapeur. » Au registre des innovations du cycle de Rankine, le laboratoire s'intéresse beaucoup à la conception de micro-centrales de cogénération à partir de la biomasse ou de l'énergie solaire. « Ces systèmes seraient, par exemple, parfaitement adaptés pour satisfaire les besoins de petites communautés isolées et permettraient de produire de l'électricité "low cost". Un de nos doctorants, Sylvain Quoilin, poursuit un projet en ce sens au Lesotho », conclut Vincent Lemort.

Didier Moreau

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