« Mettez-moi cinq culots de O-négatif en perf ! » Jusqu'ici cantonnée aux séries américaines et aux salles d'urgence des hôpitaux, cette petite phrase pourrait désormais s'entendre, à peu de choses près, dans les cliniques vétérinaires. La transfusion sanguine pour les chiens et les chats se développe en effet à grand pas. L'université de Liège n'y est pas étrangère puisqu'une banque de sang y est installée.
Huit pour le chien, trois pour le chat
Si la chose peut surprendre au premier abord, le principe de la transfusion pour les chiens et les chats est comparable à celui de l'homme, moyennant quelques subtilités supplémentaires. A la différence des humains, il existe en effet huit groupes sanguins chez le chien contre trois chez le chat. Un casse-tête en perspective pour déterminer le bon groupe à transfuser ? Pas vraiment, car le chien ne possède en général pas d'anticorps anti-globules rouges tant qu'il n'a pas reçu de sang d'un donneur extérieur. La première transfusion peut donc se faire avec le sang de n'importe quel autre chien, peu importe sa race, ce qui favorise évidemment la rapidité d'action. Le chat, par contre, dispose d'anticorps naturels contre le groupe qu'il ne possède pas.
Sans test préalable, la transfusion avec le sang d'un autre groupe peut s'avérer fatale pour l'animal. Indiquée dans de nombreux cas, elle est requise lors de problèmes chirurgicaux, d'empoisonnement ou d'anémie mais n'est utilisée qu'en cas d'urgence, les stocks à disposition ne permettant pas un traitement systématique. Car qui dit don de sang suppose donneur. Et c'est là où le bât blesse.
Arrivé en droite ligne de la faculté de Médecine vétérinaire de Gand, Kris Gommeren a importé cette technique de transfusion et l'a développée à l'ULg. En place depuis plus de deux ans, le service de transfusion ne faisait jusqu'ici appel qu'aux propriétaires de chiens et chats, bien souvent des étudiants et membres du personnel. Devant la demande sans cesse croissante et une certaine pénurie, l'appel au don a récemment été ouvert au grand public. Si les volontaires à quatre pattes ne se pressent pas encore devant les portes de l'école vétérinaire, cet apport extérieur permet déjà un certain renouvellement des stocks. « Une poche de sang ne peut se conserver que quatre semaines maximum, un apport régulier de sang neuf est donc primordial car nous consommons quatre à cinq poches par semaine. On essaye bien sûr d'être économe, de ne transfuser que lorsque c'est nécessaire mais nous avons besoin de nouveaux donneurs », précise le Dr Gommeren.
Et pour convaincre de nouveaux propriétaires, rien de tel que le bouche à oreille. Si un chien ou un chat est sauvé grâce à une transfusion, son maître se sentira d'autant plus concerné et sensibilisé à la problématique. « Il viendra peut-être donner le sang d'un autre de ses animaux et parlera autour de lui de l'importance de la transfusion. Il est certain que les mentalités doivent encore vraiment évoluer sur cette question, mais les choses changent, petit à petit. » Comme chez l'homme, le don de sang chez les animaux sauve des vies, même si l'opération a un coût. « Peu de propriétaires souscrivent une mutuelle pour leurs animaux ; ils prennent en charge la totalité des frais, ce qui est parfois un frein aux soins apportés. » En effet, à 150 euros la poche transfusée, la facture devient rapidement salée pour le propriétaire, surtout qu'un chien a parfois besoin de plusieurs poches...
Don de vie
« Il ne faut pas non plus perdre de vue qu'en plus de sauver des vies, les transfusions nous permettent de faire avancer la recherche en la matière, conclut Kris Gommeren. Les techniques évoluent, les manipulations également et de nouveaux protocoles peuvent ainsi être mis en place, développés, grâce aux dons de sang. » Pour l'heure, si les transfusions ne concernent encore que les chiens et les chats, la Faculté étudie la possibilité d'adapter la technique pour les équidés. Mais face à la taille des animaux, le matériel devra sensiblement être adapté.
François Colmant
Don de sang le mercredi, sur rendez-vous, tél. 04.366.42.00, courriel banquedesang@live.be