Décembre 2009 /189
Léonard Defrance retrouvéUn tableau du peintre découvert fortuitement
Le 15e jour du mois : Comment avez-vous retrouvé la trace de ce tableau dont on ne faisait que postuler l'existence ? Daniel Droixhe : C'est un pur hasard ! Il y a quelques semaines, je cherchais sur internet une reproduction des trois huiles sur bois de Léonard Defrance représentant l'imprimerie qui serait celle du Liégeois Clément Plomteux. Deux de ces tableaux, montrant un atelier de composition et une salle d'impression, forment un ensemble thématique. Le troisième représentait la seule salle d'impression. J'ai tapé sur Google "Imprimerie Plomteux". Parmi les résultats de la recherche se trouvait la référence au catalogue d'une galerie d'art parisienne qui signalait la mise en vente récente d'un tableau signé Defrance : il s'agissait d'un quatrième tableau représentant un atelier de composition. L'œuvre a été acquise par le musée de Grenoble. Tout fut alors très facile, le musée m'ayant envoyé une reproduction de bonne qualité que j'ai pu examiner avec l'équipe du programme Môriåne d'histoire du livre. Le 15e jour : Quels secrets livre cette œuvre ? D.D. : Aux murs de l'atelier en question figurent des sortes d'affiches (placards) portant des titres d'ouvrages. L'une d'elles mentionne la publication d'un célèbre livre de la décennie prérévolutionnaire, L'Histoire des deux Indes de l'abbé Raynal. Cet écrivain, poursuivi en France pour ses critiques visant l'Église et plus généralement l'Ancien Régime, s'était réfugié à Liège en 1781. Or, notre cité constituait une plaque tournante de l'édition clandestine au XVIIIe siècle. Le placard semble un moyen, pour le propriétaire de l'imprimerie ici représentée, de dire : « Voyez, j'ai publié cette œuvre. » Dans ce tableau figurent également deux placards difficilement lisibles. Le premier se réfère à un ouvrage intitulé L'Antiquité dévoilée par ses usages. Il se pourrait que Plomteux en ait réalisé une contrefaçon conservée à Paris à la Bibliothèque de l'Arsenal. Le second renvoie apparemment à une œuvre de Sébastien Mercier, Le philosophe du port au blé. Il s'agit d'un court texte écrit à l'occasion de la naissance du Dauphin, fils de Louis XVI. L'opuscule a été reproduit dans le célèbre Tableau de Paris de Mercier. Comme cet ouvrage a été contrefait en 1783 par un collaborateur de Plomteux, Jean-Edme Dufour, établi à Maastricht, on peut se demander si la Visite à l'imprimerie ici remise au jour ne représenterait pas plutôt l'atelier de Dufour... Voilà où nous en sommes. Cela fait pour le moins une trentaine d'années, je crois, qu'on n'avait pas redécouvert de tableau de Léonard Defrance. Il en reste certainement d'autres à retrouver, allez savoir... Le 15e jour : Pourquoi ce tableau est-il important dans l'histoire du livre ? D.D. : Il ouvre de nouvelles portes, élargit les perspectives sur l'importance des métiers de la contrefaçon à Liège. Léonard Defrance est l'un des seuls artistes du XVIIIe siècle à avoir donné de telles représentations de l'industrie typographique des Lumières. Ses peintures constituaient-elles, comme il a été avancé, des sortes de cartes de visite remises à des dignitaires étrangers pour faire valoir les réalisations de la ville ? Aujourd'hui, grâce à internet, tout ce foisonnement culturel peut revenir à la lumière. C'est fantastique ! Merci Monsieur Google ! Coralie Solheid Voir aussi les sites www.culture.ulg.ac.be et www.gedhs.ulg.ac.be.
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