Décembre 2009 /189
Décembre 2009 /189

Groupov, une trajectoire

Une journée d'étude à l'intention du spectateur

GroupovAffiche-ptQui, à l'issue d'une représentation théâtrale contemporaine, ne s'est jamais senti déconcerté ? Qui, n'imaginant pas que le théâtre pouvait revêtir de telles formes, n'est jamais resté coi devant le spectacle qui se déroulait sous ses yeux ? Les artistes de théâtre d'aujourd'hui expérimentent sans contraintes, poussant leur art aux confins d'autres disciplines, créant ainsi des univers artistiques très singuliers laissant parfois le public perplexe.

Recevoir un spectacle
Comme l'explique l'attachée scientifique au service d'histoire et d'analyse du théâtre, Laura Van Brabant : « De nos jours, les normes théâtrales ont été complètement chamboulées. Une pièce n'est plus nécessairement un texte mis en scène et le spectateur est souvent surpris par le caractère non linéaire de la représentation. » Parti du constat que le spectateur a besoin de nouvelles grilles de lecture, le service organise le 11 décembre prochain une "Université du spectateur", journée d'étude dont le but est de le guider dans les méandres du théâtre contemporain. « La formation du spectateur constitue un enjeu fondamental pour éviter que ne se creuse un écart toujours plus difficile à combler entre l'expérimentation des artistes et les codes à partir desquels le public reçoit leurs spectacles », poursuit la chercheuse.

Expérimenter, dérouter, emmener le public hors des sentiers battus, telle a toujours été la volonté du Groupov depuis sa création en 1980, marquant ainsi, à l'instar de son fondateur Jacques Delcuvellerie qui eut un rôle-phare au sein de la formation d'acteurs au Conservatoire de Liège, le paysage théâtral belge de ces 30 dernières années. « Depuis ses origines, ce collectif d'artistes interdisciplinaires ou plutôt ce "centre expérimental de culture active", comme il aime à se définir, a mené conjointement des projets expérimentaux et des créations dramatiques originales, des œuvres théâtrales comme l'atteste "Rwanda 94" où il se confronte au génocide rwandais et, au-delà de la tragédie, fonde un travail politique. Le Groupov réfléchit sur le monde, sur les limites de ce qui est représentable, poussant le spectateur jusqu'à ses derniers retranchements. Son approche du théâtre, tant exigeante que dérangeante, sert de base à cette journée d'étude », commente Laura Van Brabant.

En pratique, cette leçon au spectateur s'étendra autour de quatre événements majeurs. En matinée, des experts tels que George Banu, Yannic Mancel, Olivier Neveux et Nancy Delhalle* décortiqueront chacun selon un éclairage particulier la trajectoire du Groupov. L'après-midi débutera par un atelier animé par Alain Chevalier, du TURLg, consacré à la formation d'acteurs : Nathanaël Harcq, Françoise Bloch, Nathalie Mauger, pédagogues à l'Ecole supérieure d'acteurs (Escact), viendront parler de leur expérience quant à la pédagogie de Jacques Delcuvellerie, directeur artistique du Groupov mais aussi pédagogue à l'Escact.

Collectif et individus
Cet atelier sera suivi d'une table ronde d'artistes qui s'attellera à analyser "la dialectique du collectif et des individus" si chère au Groupov. « N'étant ni un nom ni une juxtaposition de personnes, le Groupov fait du collectif une véritable politique tout en préservant l'individualité de chacun des membres », précise Laura Van Brabant. Enfin, la journée se clôturera par la projection du DVD Groupov, une trajectoire, notamment réalisé par Malorie Paulus, une étudiante en 2e master en arts du spectacle de l'ULg, et commenté par Jacques Delcuvellerie lui-même. «Par ce film composé d'archives et d'extraits de spectacles, nous clôturerons la session par une partie plus historique. Le but de cette projection est de fournir un aperçu, à toutes les personnes qui n'ont pas vu tous les spectacles du collectif, des créations du Groupov », indique la scientifique. Bref, une journée à ne pas manquer, indispensable pour ne pas passer à côté d'un spectacle qui en vaut vraiment la peine mais qui, faute de repères, ne laisserait en nous que cet amer sentiment d'avoir perdu son temps.

Martha Regueiro

* Georges Banu, professeur d'études théâtrales à Paris III-Sorbonne Nouvelle; Yannic Mancel, professeur d'histoire du théâtre et dramaturgie à l'université de Lille; Olivier Neveux, maître de conférences en arts du spectacle à l'université de Strasbourg et de cinéma à l'université de Paris Est et Nancy Delhalle, chargée de cours à l'ULg.
Journée d'étude "Groupov, une trajectoire"
Vendredi 11 décembre, 9h30,
Salle Lumière, place du 20-Août 7, 4000 Liège.
Informations et programme sur le site www.chath.ulg.ac.be.
Contacts : courriels ndelhalle@ulg.ac.be et
l.vanbrabant@ulg.ac.be

Une prochaine session de l'Université du spectateur est d'ores et déjà prévue en mars et sera animée par Pippo Delbono, auteur, metteur en scène et comédien italien.

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