Décembre 2009 /189
Décembre 2009 /189

De l’or dans le blé

Le pouvoir antioxydant des céréales intéresse les chercheurs

BleTout le monde connaît le stress. Mais le stress oxydatif ? « Causé par une déficience d'enzymes antioxydantes, ce stress peut léser nos cellules et provoquer de nombreuses pathologies », explique Joël Pincemail, chercheur au Centre de recherche expérimentale du département de chirurgie cardiovasculaire (Credec), dirigé par le Pr Jean-Olivier Defraigne. Les molécules antioxydantes s'avèrent donc très précieuses pour la santé : les scientifiques ont déjà constaté qu'un individu ayant un taux d'antioxydants élevé présentait moins de risque potentiel de déficiences cardiaques, notamment.

Plan Marshall Wagralim
Présentes essentiellement dans les fruits et les légumes (la myrtille, la mûre, l'artichaut et les choux en général) mais aussi dans les céréales, certaines de ces molécules sont déjà utilisées en pharmacie et dans les cosmétiques. « On sait que les polyphénols ont une action décisive dans la prévention des cancers et des maladies neuro-dégénératives, affirme Joël Pincemail, et la littérature scientifique montre que les composés phénoliques dans les sons de céréales ont des effets favorables sur le vieillissement, les maladies coronariennes et aussi sur le contrôle de la glycémie. »

Fortes de ce constat, trois entreprises wallonnes* ont contacté le Credec de l'ULg, bien connu pour son expertise dans le domaine du stress oxydant et des antioxydants, afin de voir s'il ne serait pas judicieux de valoriser les sons des céréales aujourd'hui recyclés en aliments pour bétail ou en combustibles. « Non seulement ces coproduits regorgent de polyphénols mais ils constituent des déchets coûteux pour les industries, reprend le Dr Pincemail. Chaque année ce sont des milliers de tonnes qui doivent être stockées puis transportées en Wallonie. »

Séduit par l'initiative, le Credec - en partenariat avec les industriels, le laboratoire de biologie moléculaire et biotechnologie végétales (Pr Jacques Dommes) et l'unité de technologie des IAA (Gembloux Agro Bio-Tech - ULg, Pr Blecker) - a soumis, l'an dernier, dans le cadre du plan Marshall (pôle de compétitivité agro-industrie Wagralim), un projet intitulé "valorisation du potentiel antioxydant des céréales par cracking". Accepté en 2009, ce projet de 1 500 000 euros a commencé le 1er octobre dernier. « Il prendra fin en 2012, précise le Dr Joël Pincemail, son responsable scientifique, et concerne six personnes à l'heure actuelle. »

L'objectif est double : d'une part, mesurer la capacité antioxydante des céréales (du blé principalement) et d'autre part, déterminer le procédé le plus efficace d'extraction des polyphénols. « Les entreprises apportent la matière première, développe le chercheur. L'unité de Gembloux utilisera ses compétences dans les procédés d'hydrolyse enzymatique de la matière première. Les extraits obtenus seront ensuite acheminés au Credec qui se chargera de caractériser les échantillons. »

Supplément santé
A terme, l'idée est de produire un complément alimentaire riche en antioxydants. Mais cela ne peut se faire qu'en démontrant l'efficacité des polyphénols issus des céréales sur la santé humaine, comme l'a décidé l'Union européenne. Le Credec doit dès lors mettre en place des tests cliniques chez l'homme pour démontrer l'influence positive du complément alimentaire. « Nous en sommes convaincus, poursuit le chercheur. Les antioxydants protègent les cellules endothéliales, lesquelles assurent la bonne régulation de la pression artérielle sanguine, ce qui est important dans le cadre de la prévention des affections cardiovasculaires. »

Si tout se passe bien, une nouvelle unité d'extraction des polyphénols verra le jour en Wallonie dans un proche avenir.

Patricia Janssens

* Les entreprises Wal.Agri - dont Olivier Roiseux, ingénieur R&D, est le porteur du projet -, Meurens natural et Stiernon.

 

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