C'est l'histoire d'un buzz médiatique de dimension planétaire. L'histoire de Rom Houben, le patient, et de Steven Laureys, neurologue et chercheur au Coma science group (ULg), le médecin qui a démontré en 2006 que Rom n'était pas en état végétatif mais parfaitement conscient. Un buzz qui illustre la puissance du réseau internet qui, en quelques heures à peine, démultiplie à l'échelle mondiale une information. Un cas d'école pour les spécialistes des médias et les journalistes.
Revenons à la chronologie des faits. En juillet dernier, l'équipe du Dr Laureys publie une étude dans la revue BMC Neurology. Les chercheurs y dévoilent que l'erreur diagnostique chez des patients en état de conscience altérée est fréquente et que le recours à un outil d'évaluation standardisée contribuerait à éviter cette erreur. Cette publication importante fait l'objet d'échos médiatiques, surtout dans les milieux médicaux directement concernés.
Ces résultats surprenants attirent aussi l'attention d'un des plus grands magazines allemands, Der Spiegel, qui rencontre Steven Laureys pendant l'été et prend contact avec l'entourage de Rom Houben. L'article sort plusieurs semaines après, le samedi 21 novembre. C'est l'acte originel du buzz. Mais la véritable amplification vient d'un article dans le Daily Mail, relayé sur son site internet dès le lundi 23. Il suscite rapidement l'intérêt des médias anglais. Dès 11h, le service de presse de l'ULg reçoit le premier coup de téléphone, à la recherche du "Belgian Doctor Steven Laureys". Le rythme des appels, tous venant d'Angleterre dans un premier temps, s'accélère rapidement. Au fur et à mesure que les minutes passent, on prend conscience qu'un véritable "phénomène" est en train de naître. La terre entière semble vouloir parler à Steven Laureys. Les autres médias européens prennent le relai; les appels viennent de France, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Espagne, etc. Dans l'après-midi, décalage horaire oblige, c'est la presse américaine qui se presse au portillon.
Le hasard veut que Steven Laureys est dans un avion, de retour de voyage, inaccessible. « J'ai vite compris qu'il se passait quelque chose d'important en rallumant mon gsm ! » Le mardi 24 est une journée de folie pour le médecin-chercheur. C'est un défilé permanent de journalistes, de caméras et de micros au Centre de recherche du Cyclotron, lequel a rarement connu une telle frénésie. Tous les grands médias sont là : CNN, ABCNews, BBC, LCI, TF1, Reuters, RTL, RTBF, VTM, VRT, ... France2 interviewe Steven Laureys en direct en ouverture de son journal de 13h... Le nombre d'appels ne tarit pas. Un déferlement de demandes gérées par les services de presse du CHU et de l'ULg. En soirée, les talk-shows du nord du pays réclament Steven Laureys sur leurs plateaux.
Deux jours après, la tempête s'est un peu calmée. Steven Laureys contemple les 700 mails qui lui restent à lire et fait un premier bilan, entre deux appels de journalistes... Epuisé par ce marathon médiatique mais satisfait que ce buzz bien involontaire lui ait donné l'occasion de mettre spectaculairement en évidence un problème trop longtemps méconnu. C'est sûr, grâce à lui maintenant, le monde entier en est... conscient.
D.M.