Qui aurait cru que d'irréductibles différences culturelles rendraient problématique la communication entre ressortissants de régions linguistiques pourtant géographiquement très proches ? C'est cependant bien ce qui se passe dans l'Euregio Meuse-Rhin. Pour remédier au problème, InterReg innove : le projet IntercCom met en partenariat plusieurs hautes écoles et universités. Déjà impliquée dans quelques projets InterReg qui visent à promouvoir la création d'emplois pour les jeunes, l'ULg est bien sûr de la partie, via l'Institut supérieur des langues vivantes (ISLV)*.
L'Euregio regroupe le Limbourg belge, le Limbourg hollandais, la région germanophone de Belgique, celle d'Aix-la-Chapelle et la région liégeoise. Un espace où trois langues européennes se côtoient, et autant de cultures singulières. Le projet IntercCom a pour ambition de faciliter l'intégration des étudiants de l'enseignement supérieur qui seront amenés à travailler ou à suivre des études dans une des autres régions. « L'idée n'est pas seulement de développer un apprentissage ou un perfectionnement des compétences linguistiques, mais aussi d'initier les candidats à la mobilité et à la dimension interculturelle », explique Catherine Peeters, enseignante de néerlandais à l'ISLV. Il ne suffit pas de bien connaître la langue pour évoluer professionnellement dans un milieu étranger ; encore faut-il en percevoir le bon usage dans le bon contexte : c'est ce que l'on nomme la pragmatique.
Entre les faux amis et les marques de familiarité - telles que le tutoiement, courant entre professeur et étudiants dans certaines contrées, et pas du tout chez nous -, les interférences linguistiques sont nombreuses et à l'origine de quiproquos, voire de malencontreuses erreurs. Par ailleurs, il est grandement souhaitable de connaître les us et coutumes en vigueur dans chaque région : arriver en retard à une réunion à Aix-la-Chapelle est considéré comme une impolitesse majeure alors que la chose est tolérée à Liège, moyennant des excuses acceptables.
Plus spécifiquement, la formation proposée (par modules) sera axée sur tous les aspects de la vie étudiante. « Comment les étudiants font la fête dans le Limbourg et comment ils la font à Liège, comment fonctionnent les études, quand ont lieu les sessions d'examen, ce qu'il en est du logement et des transports, etc. : tous ces points seront abordés dans les modules d'apprentissage », précise Catherine Peeters. Outre les étudiants de l'Euregio, le projet IntercCom aura également pour cible des ressortissants turcs et polonais qui, selon des pronostics fiables de migration, devraient affluer de façon massive vers les universités et hautes écoles de l'Europe de l'Ouest dans les prochaines années.
Les modules - qui devraient être en place en 2012 - se présenteront sous la forme d'exercices, de scénarios et de dialogues, téléchargeables sur internet et entièrement gratuits durant les cinq premières années. Si les compétences de l'ISLV sont sollicitées pour œuvrer à l'élaboration de ces logiciels, c'est, selon Jean-Marc Defays, directeur de l'Institut, « parce qu'on nous reconnaît déjà une grande expertise en matière d'enseignement à distance, notamment avec le programme @LTER ».
Sur un total de 25 000 modules, le cinquième a été attribué à la région liégeoise. L'ULg déterminera elle-même le nombre qui sera mis à la disposition de ses propres étudiants francophones ou allophones. « Il faut se rendre compte, se réjouit Jean-Marc Defays, de la chance que tout cet éventail de cours et de formations linguistiques représente pour l'Université. » Un bel encouragement à la mobilité.
Bérénice Vignol
* Partenaires du projet à l'ISLV : Jean-Marc Defays, Claudine Colin, Lilian Ghelen, Catherine Peeters, Laurence Wery et Anne Pellizzer (secrétaire).