Et si les années passées à travailler pouvaient servir de tremplin pour retourner à l'Université ? Depuis le fameux décret de Bologne, il est désormais possible de valoriser l'expérience acquise tout au long de sa carrière en vue d'une (ré)admission aux études. Les années passées "sur le terrain" permettent ainsi, selon les cas, d'être soit directement admis en 2e ou 3e année de bachelier, à un master ou à une formation non diplômante (certificat), soit d'obtenir des dispenses au sein de la filière choisie. « Chaque demande est traitée individuellement par un jury compétent qui décide, sur base du dossier, à quelle année d'études le candidat peut être admis, explique Valérie Maillard, conseillère au service "Valorisation des acquis de l'expérience" (VAE) à l'ULg. Et elle précise : « Pour qu'un dossier d'admission dans un programme de master soit recevable, le candidat devra prouver au moins cinq années d'expérience utile, c'est-à-dire en rapport direct avec la filière choisie. » Depuis 2004, l'Université, grâce à la Communauté française et au Fond social européen, a mis en place un service d'aide qui accompagne les candidats désireux de tenter l'aventure.
Si la plupart des candidats motivent leur choix par l'obtention d'un diplôme universitaire souvent nécessaire pour un avancement professionnel, d'autres souhaitent depuis longtemps s'asseoir sur les bancs de l'Université ou approfondir leurs connaissances. Malgré l'envie réelle de réussir, certains impératifs peuvent cependant refroidir les ardeurs des plus courageux : « Les difficultés sont nombreuses, à commencer par l'horaire des cours, poursuit Valérie Maillard. Un petit nombre de filières seulement proposent des plannings décalés, avec des cours en soirée ou le week-end. Parvenir à suivre le cursus peut parfois s'avérer délicat. » Rares sont en effet ceux qui choisissent d'opérer une pause dans leur carrière, la plupart des candidats n'ayant d'autres choix que de combiner les cours avec leur travail... et leur vie de famille. Mais outre la gestion du temps, une crainte majeure des candidats concerne aussi l'intégration parmi des étudiants plus jeunes. « L'âge avançant, on se demande si on aura toujours les mêmes facultés de mémorisation et de concentration, si on pourra suivre le rythme. »
Lancée en 2004, la VAE a déjà permis à plus d'une centaine de personnes d'obtenir un diplôme, ce qui représente plus de la moitié des inscriptions totales. « Cela témoigne de la motivation des candidats, reprend la conseillère. Les personnes qui vont jusqu'au bout sont, en général, celles qui lient la reprise du cursus avec un projet, un objectif professionnel bien défini et qui sont soutenues par leur entourage. »
Patrick Bartholomé, 51 ans et gradué en chimie clinique, a pu s'accommoder des difficultés pratiques lorsqu'il a décidé de reprendre des études en... journalisme : « En tant qu'indépendant, j'ai pu aménager mon horaire de travail assez facilement pour ne léser aucune des deux activités, même si cela demande évidemment une certaine dose d'organisation. J'ai un peu diminué ma charge de travail tandis que mon épouse augmentait la sienne. » Journaliste professionnel depuis de nombreuses années, Patrick n'imaginait pas retourner un jour sur les bancs avant d'apprendre l'existence du programme de la VAE.
« A plusieurs reprises, les postes que je briguais requéraient un diplôme universitaire que je n'avais pas et je trouvais cela un peu frustrant d'être bloqué à cause de ce manque. » Après quelques renseignements et une bonne dose de réflexion, la décision est prise de tenter le coup. Le dossier de candidature est accepté et Patrick entame ses deux années de master en septembre 2009, avec d'emblée une première surprise. « Tout au long de ma carrière, il m'est arrivé d'avoir le sentiment de plafonner, de ne pas arriver à mettre du sens sur mes activités. A l'Université, j'ai finalement découvert quelque chose qui me manquait; j'ai pu appréhender de nouveaux concepts et découvrir une densité dans les matières enseignées, ce que je ne soupçonnais pas. » Après avoir réussi son 1er master, avec grande distinction, Patrick attaque désormais la dernière ligne droite avec confiance, même si le mémoire de fin d'année risque de lui donner quelques soucis d'organisation : « On dormira un petit peu moins », sourit-il.
François Colmant
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