Sous les pavés, la paille

Gembloux : un pavillon conçu avec des agromatériaux

Voilà une petite cabane en bois qui, dans ses parures d’hiver, confèrera peut-être des allures canadiennes à l’entrée principale de Gembloux Agro-Bio Tech. Pourtant, c’est aux terres africaines que le visiteur est appelé à penser pour le 150e anniversaire de ce que l’on appelait, avant octobre 2009, la Faculté universitaire des Sciences agronomiques. Car le pavillon expérimental bâti par Samuel Dubois, étudiant fraîchement diplômé, sous le houlette de Frédéric Lebeau, chargé de cours à l’unité mécanique et construction, vise à délivrer ce message : le bois tropical certifié peut être acheté sans culpabilité tout en assurant la sauvegarde des exceptionnelles forêts d’Afrique centrale, comme l’explique en concomitance l’exposition “Africasylves” coordonnée par le Pr Jean-Louis Doucet, directeur du  laboratoire de foresterie des régions tropicales et subtropicales.

Vitrine verte
« Très souvent le consommateur pense qu’acheter du bois tropical participe à la déforestation. Or ce n’est pas le cas, dans la mesure où l’exploitation certifiée de ces forêts tropicales denses humides contribue plutôt à la sauvegarde de ces espaces naturels. Si elles perdent cette valeur économique, elles tendent en effet à être transformées en bois de cuisson ou remplacés par des cultures », explique Frédéric Lebeau. Et de citer l’exemple de l’extension de la culture du palmier à huile, considérée comme la principale menace actuelle pour les forêts d’Asie du Sud-Est. Le principal reproche fondé pourrait se situer au niveau du transport mais comme le bois tropical (dans le cas du pavillon le Tali, le Padouk, le Sapelli et le Kosipo) est transporté par bateau, son importation induit une empreinte écologique relativement faible, améliorée encore par la durabilité du matériau.

C’est dans le cadre de son mémoire que Samuel Dubois a conçu le pavillon “Africasylves” et lancé un chantier participatif ouvert aux étudiants et aux curieux des techniques d’écoconstruction, notamment en paille. Cette dernière offre de nombreuses qualités et chamboule les a priori persistants liés aux matériaux naturels. « Correctement mis en œuvre, ces derniers constituent des alternatives séduisantes aux techniques de construction habituelles », observe l’étudiant en travaillant d’arrache-pied au parachèvement de la petite construction-pilote de trois mètres de haut sur 25 m² habitables.

Partenariats durables
Outre sa toiture verte semée d’espères végétales indigènes, le pavillon associe le bois tropical et la paille à d’autres agromatériaux – comme le chanvre – réputés pour la qualité des climats intérieurs qu’ils génèrent. L’on parle d’une régulation plus optimale de l’hygrométrie et d’une meilleure sensation de confort. De plus, la combinaison chaux-chanvre offre une meilleure inertie thermique que les matériaux classiques.

A la fois vitrine de la beauté et de la durabilité du bois tropical et lieu d’échanges, le pavillon met à l’honneur les partenaires de la Faculté que sont d’abord l’exploitant (CIFM) et la scierie (Pallisco) camerounais. Mais une série d’autres partenaires – acteurs wallons en écoconstruction – ont permis d’assurer la qualité technique et scientifique : fabricant de chanvre écologique, argilières, couvreurs, menuisiers, etc. Le pavillon-prototype est en effet équipé de divers capteurs, notamment hygrothermiques, qui permettront de suivre son comportement sous les effets de la chaleur, de l’humidité, du gel ,etc.

Et si la maisonnette de bois n’est a priori que provisoire, Gembloux Agro-Bio Tech planche déjà sur la construction en agromatériaux d’une salle de cours et de logements pour les étudiants. Le projet, sur fonds propres, en est à la phase d’étude et à la définition du cahier des charges. D’ici à ce qu’on tonde la pelouse sur les toitures…

Fabrice Terlonge
Photos : © J.-L. Wertz, Quanah Zimmerman

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