Depuis un an, l’université de Liège a entrepris de réformer en profondeur son organisation de la recherche. De nouveaux organes se mettent en place, de nouveaux responsables sont élus. Vice-Recteur à la recherche, le Pr Pierre Wolper a piloté cette réforme importante. L’élection des premiers présidents des conseils sectoriels est l’occasion de faire avec lui le point sur l’état d’avancement de cette mutation.
Le 15e jour du mois : La réforme des structures de recherche était un élément important du “Projet pour l’ULg” proposé par le Recteur en 2009. Où en est-on en ce début d’année 2011 ?
Pierre Wolper : Une première étape a été réalisée avec la mise en place des conseils sectoriels de la recherche qui concrétisent l’organisation de l’Université en trois grands secteurs. Auparavant, il n’y avait qu’un seul conseil de la recherche. Aujourd’hui, dans le cadre de la mise en œuvre du “Projet pour l’université de Liège” du recteur Bernard Rentier, il y en a quatre, trois sectoriels (sciences de la santé, sciences humaines et sciences et techniques) et un universitaire. Rappelons que les conseils sectoriels sont composés de 12 membres qui ont été choisis à partir de listes établies par les départements. Ils sont issus des rangs du personnel académique et du personnel scientifique permanent de l’Université et du FNRS. Jusqu’à présent, phase transitoire, j’assurais la présidence de ces conseils sectoriels, dont je suis le 13e membre. La phase de transition a pris fin ce 1er janvier 2011 et les membres de chaque conseil viennent d’élire leur président : il s’agit d’Alain Vanderplasschen pour le conseil sciences de la santé, de Vinciane Pirenne pour le conseil sciences humaines et d’Edwin De Pauw pour le conseil sciences et techniques. J’assure toujours la présidence du conseil universitaire, composé du Recteur, de moi-même et de cinq membres issus de chacun des conseils sectoriels.
Le 15e jour : Comment fonctionnent ces conseils ?
P.W. : Les conseils sectoriels font des propositions, donnent des avis sur la politique de recherche de l’Université et gèrent les moyens qu’elle consacre à la recherche. Ce sont eux, et non plus les Facultés, qui par exemple sélectionnent les projets à présenter dans le cadre des actions de recherche concertées ou des fonds spéciaux, émanant de la Communauté française, ou encore dans le cadre des programmes mis en place grâce au subside fédéral pour la recherche. Je pense notamment aux bourses de doctorat non Fria qui permettent à ceux qui ne sont pas éligibles aux bourses Fria de poursuivre un doctorat. Ou encore au programme “post-doc IN”, mandats de post-doctorat pour des chercheurs qui, au moment de leur candidature, résident à l’étranger. Cela nous permet d’internationaliser notre recrutement. Ces choix sont ensuite examinés par le conseil universitaire qui les intègre avant de les soumettre au conseil d’administration lorsque la procédure l’exige.
Le 15e jour : Comment s’organise la stratégie de l’Université en matière de recherche?
P.W. : Au niveau de l’organisation de la stratégie globale de l’Université en matière de recherche, nous sommes en train de mettre en place ce qu’on appelle les “entités de recherche”. Jusqu’à présent, l’Université était organisée en Facultés et départements. Les unes et les autres sont largement définis par leurs responsabilités en matière d’enseignement. Les Facultés ont bien sûr toujours joué un certain rôle en matière de recherche, mais les départements ont été introduits avec l’enseignement pour seule mission. Pourtant, une série de ressources attribuées aux départements – le personnel par exemple – sont affectées à la recherche. C’est une situation ambiguë. C’est pour cela que nous avons voulu définir des “entités de recherche”. Le conseil d’administration a adopté cet automne les lignes directrices relatives à la mise en place de ces entités; il en a défini deux types : structurelles et thématiques. Leur formation est en cours actuellement.
Le 15e jour : Quelle différence y-a-t-il entre les deux ?
P.W. : Les entités structurelles sont les entités stables, dépositaires des moyens institutionnels, d’abord ceux à charge du budget ordinaire : les postes académiques, d’assistants et de personnel de support. Chaque personne est attachée à une de ces entités, éventuellement avec une affiliation secondaire mais cela doit être l’exception. Ces entités structurelles peuvent être des évolutions des départements ou même coïncider avec ceux-ci. Mais il existe des entités de recherche qui ont très peu ou pas de rôle d’enseignement; c’est le cas des grands centres de recherche comme le Giga où les chercheurs sont regroupés dans un même bâtiment, partagent des équipements et fonctionnent vraiment en entité structurelle. Une forme particulière d’entité structurelle est ce qu’on appelle maintenant une cellule d’appui et cellule d’aide à la recherche (Care). Celles-ci sont organisées autour de la gestion d’ensembles d’équipements lourds.
Il a également été prévu de créer des entités thématiques afin d’organiser des activités de recherche interdisciplinaire. Elles ont comme objectif de regrouper des chercheurs qui appartiennent à des entités structurelles différentes mais qui travaillent sur un même thème en collaborant. Elles n’obtiennent pas de ressources sous forme de postes institutionnels, mais leur financement est géré suivant les modalités appliquées aux projets et attribué pour une durée déterminée. Elles ne disposeront pas de postes stables à très long terme.
Le 15e jour : Quelles conclusions peut-on tirer de cette première année de réforme qui a constitué une phase transitoire ?
P.W. : Nous nous plaçons dans un processus d’évolution graduelle, en essayant d’introduire des réformes qui fonctionnent. Il y a encore beaucoup de changements à mettre en place, notamment en ce qui concerne les procédures d’attribution de ressources, mais plusieurs bouleversements ont déjà eu lieu. Il y a tout d’abord, je le rappelle, la manière dont les projets de recherche sont sélectionnés : ce sont maintenant les conseils sectoriels qui rendent des avis. Ensuite, lors de la procédure de promotion dans le corps académique, chaque candidat a été évalué par un des conseils sectoriels de recherche, lequel a émis des avis qui ont été transmis aux commissions facultaires. Celles-ci ont alors établi une proposition de classement intégrant l’aspect recherche et les autres facettes de l’activité des candidats. Le fait de passer d’abord devant les conseils sectoriels est une nouveauté importante. Enfin, grâce au travail du vice-Recteur à la qualité, Freddy Coignoul, des procédures d’évaluation adaptées aux entités de recherche ont été définies. L’évaluation a un double but : d’abord aider les entités à prendre conscience de leurs points forts et faibles et à améliorer leur fonctionnement; ensuite, pour l’Université, permettre une gestion plus rationnelle des moyens disponibles dans l’optique d’une stratégie de recherche réfléchie.
Henri Dupuis
journaliste - rédacteur en chef du site www.reflexions.ulg.ac.be
rédacteur en chef du Liège Université (1980 - 1986)
Photos : J.-L. Wertz