Shame de quoi ?
Plusieurs observateurs ont pointé la difficulté à trouver une argumentation construite à la manifestation Shame du 23 janvier. Sur son site, Le Soir avait invité les citoyens internautes à poster leurs commentaires dans le “Belgomaton”. A la veille de la manifestation, la rédaction avait demandé au Pr Michel Hermans, politologue à HEC-ULg, de décrypter ces messages. « On veut que tous les Belges se rassemblent pour exprimer leur ras-le-bol, mais il y a cette difficulté d’essayer de comprendre ce que veulent les Belges de l’autre côté de la frontière linguistique. C’est pour cette raison qu’il y a une difficulté d’avoir un objectif dans la manifestation de dimanche, hormis le ras-le-bol par rapport au fait que cela dure tellement longtemps bien entendu. »
Pas d’Etat, pas de problème
Curieusement, quelques jours avant cette manifestation, la rédaction du Soir interrogeait (10/1) le Pr Marc Jacquemain, sociologue des identités, sur ce sentiment étrange que la crise politique perdure sans que cela n’affecte les Belges, restés impassibles. « Parce qu’un phénomène d’accoutumance s’observe », expliquait-il alors. « Pour la plupart (des gens), l’absence d’un gouvernement fédéral n’a pas d’incidence directe dans leur vie. Ils n’ont pas l’impression que cela remet en cause leurs projets personnels et des dispositifs essentiels comme la sécurité sociale par exemple. Ils n’imaginent pas non plus qu’en cas de crise majeure, le gouvernement actuel se lave les mains même s’il est en affaires courantes. L’absence de gouvernement est donc quelque chose d’assez abstrait d’autant qu’ils ont d’autres niveaux de pouvoir qui fonctionnent, ceux de la Région wallonne et de la Communauté française. »
L’union fait la solidarité
Par rapport à cette même manifestation, initiée par une poignée de jeunes dont des étudiants de la VUB, la position d’un jeune étudiant francophone, par ailleurs président de la Fédé de l’ULg, Maxime Coupet, tranche : « Revendiquer un gouvernement pour le prix de l’unité de l’Etat ne suffit pas car celle-ci n’a pas de valeur sans la solidarité entre Régions. Et ce qui nous inquiète le plus aujourd’hui, ce n’est pas tant le triomphe d’une logique nationaliste, mais celui d’une logique néolibérale qui dit que les plus riches n’ont pas à payer pour les plus pauvres. » (Le Soir, 22/1).
Didier Moreau