Professeur en faculté des Sciences appliquées, Jean Marchal est vice-recteur aux relations internationales. Lancée par le Recteur, sa mission est de positionner l’université de Liège sur l’échiquier mondial afin qu’elle soit classée “parmi celles qui comptent” en Europe et au-delà. “Désormais, l’Université doit déborder de ses frontières” : cette phrase – ce slogan diront certains – réclame l’attention de chacun et celle de l’Institution elle-même. D’où la volonté de coordonner les efforts afin de créer des synergies plus porteuses.
Vu la taille de la Belgique et la nature du savoir, l’accroissement de l’attractivité de l’ULg passe notamment par une plus grande mobilité des enseignants, encadrants, chercheurs ainsi qu’étudiants “in” et “out”. Comment faire ? Le point avec Jean Marchal.
Le 15e jour du mois : L’Université – et principalement ses chercheurs – est, par définition, ouverte au monde. Pour quelles raisons faut-il instaurer une politique institutionnelle dans le domaine des relations internationales ?
Jean Marchal : Les relations internationales sont en effet d’abord basées sur des collaborations bilatérales entre chercheurs ou équipes scientifiques et l’ULg peut s’enorgueillir d’en avoir énormément. Ces collaborations contribuent au rayonnement de notre Université et sont évidemment encouragées par les autorités et bien soutenues par l’administration (AEE-RI). L’Institution est déjà particulièrement performante au niveau européen, en particulier dans les projets Erasmus et Erasmus Mundus. Cependant, la notoriété dont elle bénéficie à l’étranger peut être intensifiée; la mise en place d’une structure plus large de “relations internationales” me paraît de nature à amplifier notre renommée.
Notre volonté est de renforcer les acquis des collaborations actuelles en offrant aux chercheurs, aux Facultés et aux centres de recherche un environnement plus adéquat : l’objectif est d’apporter une aide aux projets et une visibilité plus grande aux actions entreprises qui sont de nature plus globale, pluridisciplinaire et donc souvent interfacultaire. La dimension institutionnelle apporte une valeur ajoutée à la communauté universitaire et implique davantage les Facultés et les centres de recherche dans cette dynamique.
Le 15e jour : Quelle stratégie institutionnelle l’ULg a-t-elle mis en place ?
J.M. : Nos ressources étant limitées, nous avons décidé de réserver nos accords institutionnels aux partenaires de qualité et donc, pour être crédible, de cibler nos actions sur quelques réseaux, pays et institutions, tout en veillant scrupuleusement au fait que la coopération doit être “gagnante” et durable pour chacune des parties concernées. Les actions se focalisent sur des domaines prioritaires du partenaire et de notre région, lesquels peuvent être valorisés par la participation de nos centres d’excellence. Cela nécessite une mobilité maîtrisée d’enseignants et de chercheurs, laquelle peut générer une mobilité bien préparée d’étudiants. Dans cette optique, le Recteur prépare un mécanisme de valorisation des activités des membres de l’ULg dans le cadre des procédures de promotion. Nous voulons impérativement crédibiliser notre démarche, basée sur du véritable partenariat, afin d’assurer un maximum de pérennité aux projets. C’est ainsi qu’en Europe des synergies sont particulièrement recherchées avec les universités de la Grande Région et de l’Euregio, tout comme avec des réseaux européens. D’autres actions sont en cours d’analyse comme, par exemple, la mise en place d’une tripartite avec les universités d’Uppsala et de Cracovie (médecine vétérinaire et agronomie) ou la collaboration avec des universités roumaines.
Le 15e jour : A l’instar de la recherche, l’enseignement et la formation sont également vecteurs de collaboration ?
J.M. : Effectivement. Nous organisons des masters conjointement avec d’autres institutions, notamment dans le cadre des programmes Erasmus Mundus. Pour accroître l’attractivité de l’Institution, je pense qu’il faut poursuivre l’augmentation du nombre de nos programmes d’enseignement de 3e cycle en langue anglaise.
Un vaste programme de formations continuées in situ en partenariat est en développement dans différents continents : une double diplomation est délivrée, à savoir un diplôme de master par le partenaire et un certificat universitaire de formation continuée internationale “Executive Master” par l’ULg dont les crédits obtenus peuvent être valorisés ensuite dans notre Institution. Les meilleurs étudiants sélectionnés ont la possibilité de poursuivre ensuite des études à Liège ou un doctorat, de préférence sous une formule “sandwich” et en co-tutelle : c’est ainsi que des activités de formation peuvent conduire à des activités de recherche et ensuite à du transfert technologique. Au Vietnam, par exemple, nous menons plusieurs collaborations dans les domaines tels que la biotechnologie, la logistique, l’environnement, l’agroalimentaire, le management industriel. En Afrique du Sud (Durban), l’ULg apportera son expertise relative à la gestion intégrée des ressources minières et en fera bénéficier l’université de Lubumbashi en l’associant dans une coopération tripartite. Des projets sont également en cours d’élaboration au Chili et une collaboration tripartite avec le Brésil et l’Equateur, relative à la gestion intégrée d’une zone à haute biodiversité (application à la plaine amazonienne), est en phase avancée de négociation. Bien sûr, la situation n’est pas figée et de nouveaux partenariats bien ciblés peuvent être analysés dans le cadre de notre stratégie institutionnelle, au Nord comme au Sud.
Afin de développer ce volet d’activités, nous avons mis au point un label – le label “Luis” pour Liège University International School – qui sera octroyé aux formations continuées organisées à l’étranger par l’ULg et qui en respecteront les critères de qualité.
Le 15e jour : L’ULg participe aussi à la coopération universitaire au développement (CUD) ?
J.M. : Depuis longtemps l’ULg, à travers le Centre de coopération au développement (Cecodel), gère des projets financés principalement par la CUD. Une multitude de collègues sont impliqués, à divers titres, dans cette coopération au développement à laquelle nous attachons également beaucoup d’importance. Ces projets relèvent du Conseil interuniversitaire de la Communauté française (Ciuf), mais notre politique institutionnelle en tient compte vu notre implication étroite dans l’élaboration des stratégies de coopération de la CUD. Une réflexion est en cours pour ouvrir davantage notre coopération vers d’autres bailleurs de fonds, pour mieux coordonner les actions entre nos différents sites en capitalisant sur leurs performances, celles de Gembloux Agro-bio Tech notamment, faculté particulièrement investie et renommée dans le secteur de la coopération au développement. Enfin, il sera important d’assurer du transfert technologique in situ et de continuer à soutenir nos deux ONG.
Propos recueillis par Patricia Janssens
Photo : J.-L. Wertz