Professeur au département Argenco – géoressources minérales et imagerie géologique – Eric Pirard est aussi président du conseil doctoral. C’est à ce titre que le 15e jour du mois l’a rencontré.
En plus des étudiants et des professeurs, les campus universitaires abritent une population moins facilement identifiable : les doctorants. Passionnés souvent, créatifs toujours, ceux et celles qui sont inscrits en thèse témoignent de la vitalité de la recherche d’une institution. A l’ULg, ils sont 1800 environ : plus de 400 en Sciences, 300 en Médecine, 220 en Sciences appliquées, 150 en Médecine vétérinaire et en Philosophie et Lettres, etc. Ils et elles travaillent dans les laboratoires, les bibliothèques et sur le terrain sous des statuts très divers : certains ont un mandat d’assistant, d’autres un mandat FNRS ou une bourse de recherche ; d’autres encore sont engagés sur des projets dont la durée varie en fonction du commanditaire.
Parce que la recherche est intimement liée à la créativité et à l’innovation – et participe donc grandement à l’Europe de la connaissance du Traité de Lisbonne –, le doctorat occupe une place majeure dans la réforme de Bologne. A Liège, le recteur Bernard Rentier en a fait une priorité : présenté en 2007, son “Projet” visait notamment à créer un “collegium doctoral” en vue de fédérer les initiatives et de structurer le projet doctoral dans sa globalité.
Depuis lors, de nombreuses initiatives ont vu le jour. A l’initiative des étudiants s’est constitué le “Réseau des doctorants” ; les Docs’café connaissent un réel succès public et la démarche a été saluée par un label européen de la créativité et de l’innovation. Une cérémonie en l’honneur des docteurs est maintenant prévue en même temps que la remise des insignes de docteur honoris causa facultaires. L’an dernier, cette manifestation a été un succès, la prochaine aura lieu le 24 mars 2012. Une newsletter “Doc’notes” est envoyée régulièrement afin d’améliorer la communication entre les collèges de doctorat.
Le 15e jour du mois: Les doctorants sont au cœur de l’Université…
Eric Pirard : Depuis la réforme de Bologne en 1999, le rôle des Facultés s’est recentré sur l’organisation des bacheliers et des masters. Le 3e cycle, pour sa part, échappe à la seule logique facultaire sans être lié de façon univoque aux secteurs de recherche. Il est sans doute le maillon le plus libre de toute l’Université…
Le doctorant est à la fois un étudiant “à part” et souvent aussi un membre du personnel “singulier” : il vit au sein des Facultés et travaille dans des centres de recherches ; ses préoccupations rejoignent autant l’Administration de l’enseignement et des étudiants (AEE) que l’Administration recherche et développement (ARD), etc. Etre doctorant, c’est occuper une place hybride à bien des égards, mais c’est aussi détenir un poste-clé à l’Université.
Très majoritairement, les doctorants sont des chercheurs passionnés par leur discipline et leur sujet. S’ils sont capables d’une grande force de travail et d’une excellente compréhension de leur domaine d’étude, ils ne sont pas, comme on le croit trop souvent, des intellectuels qui collectionnent les “plus grandes distinctions” chaque année. Leur motivation et leur projet de recherche sont les principaux critères de recrutement. Par ailleurs, le doctorant n’est pas seul devant son microscope ni isolé dans sa bulle : il fait partie d’une équipe, il est membre d’un réseau.
En moyenne, 200 personnes sortent chaque année de l’ULg avec le titre de docteur. Est-ce assez ? C’est une question récurrente qui appelle des réponses multiples. Quand on sait qu’il y a très peu d’échecs, force est de constater qu’il y a beaucoup d’abandons, pour des causes diverses… dont l’embauche ! Si le doctorat est une priorité pour notre Institution, sans doute y a-t-il des choses à faire pour que le nombre de ceux qui la préparent augmente.
Le 15e jour : Qu’a-t-on mis déjà en place ?
E.P. : Les “collèges de doctorat” ont été mis en place afin de mieux encadrer les doctorants. Aujourd’hui, il y a 33 collèges, soit un par discipline, mais il n’est pas impossible que ce nombre évolue car, me semble-t-il, leur vocation est d’être interfacultaire. Quelles sont leurs missions ? En tout premier lieu, l’admission des candidats. Au collège d’examiner les dossiers et les projets de recherche. A lui aussi de vérifier qu’un promoteur accepte de prendre le récipiendaire dans son équipe et d’examiner les conditions de ressources dont il bénéficiera. Le collège s’inquiète également de la composition du comité d’accompagnement et, enfin, procède à l’évaluation régulière du doctorant.
Le rôle des collèges est essentiel. Pour les aider, Evelyne Favart, en charge des affaires doctorales au sein de l’ARD, a notamment conçu une base de données à leur intention, laquelle répertorie tous les dossiers en cours et facilite ainsi le suivi de chaque doctorant. C’est un outil très précieux.
Par ailleurs, l’ULg a instauré en 2010 le conseil doctoral que je préside. Ce conseil réunit tous les présidents et vice-présidents des collèges de doctorat, une délégation du Réseau des doctorants dont fait partie Marie Steffens, son actuelle présidente. Celle-ci est d’ailleurs vice-présidente du conseil. Albert Corhay, premier vice-recteur, Pierre Wolper, vice-recteur à la recherche, et Monique Marcourt, directrice générale à l’enseignement et à la formation, sont membres de droit du conseil dont le rôle est d’élaborer une stratégie institutionnelle en matière de doctorat.
Le 15e jour : Quels sont les chantiers en cours ?
E.P. : La formation doctorale comporte 60 crédits et recouvre en fait trois activités majeures : une formation thématique directement liée au sujet de thèse, des communications scientifiques et une formation transversale. Le conseil tient beaucoup à ce dernier volet. Cette formation – on dit aussi Soft Skills – vise à apporter des éléments utiles aux futurs docteurs tels que des cours de langue, des techniques de gestion, des compétences interpersonnelles, des aptitudes à la communication, etc. Evelyne Favart est en train de réaliser un catalogue des différentes offres afin d’accentuer la dynamique.
L’avenir des chercheurs est une autre priorité du conseil. Certes la carrière académique est un débouché “naturel” pour les docteurs, mais l’Université ne pourra pas proposer des postes à chacun et chacune. Il faut leur apprendre à “se vendre”. Leur valeur d’un point de vue professionnel est loin de se limiter aux seules compétences scientifiques : leur savoir-faire, leur autonomie, leur capacité d’adaptation, la gestion d’équipe, le sens de la communication, leur maîtrise d’un budget, etc., constituent autant d’éléments intéressants pour les recruteurs. Les entreprises commencent à percevoir la valeur des docteurs. Dans le secteur pharmaceutique, par exemple, ils sont souvent, d’emblée, engagés comme chefs de projet. Les quelques années de doctorat sont donc une sorte de “pars-en-thèse” passionnante avant d’entrer dans la vie active.
Enfin, nous menons actuellement une réflexion sur les indicateurs liés au doctorat. Avec l’aide de la cellule Radius, nous aimerions connaître plus finement les chiffres pertinents pour l’élaboration d’une stratégie à long terme. A l’heure des rankings (dont on pense ce que l’on veut !), cette démarche nous paraît indispensable.
Propos recueillis par Patricia Janssens
Photos : J.-L. Wertz
“En avant la musique ! La musique comme vous ne l’avez jamais entendue” Le prochain Doc’café aura lieu le 15 novembre : les doctorants Julien Osmalky, Pauline Laroouy-Maestri et Céline Lambeau discuteront des nouvelles méthodes de reconnaissance automatique des musiques, de la justesse de la voix et de la dimension musicale de la communication… entre autres. Le mardi 15 novembre à 20h à la Brasserie Sauvenière, place Xavier Neujean, 4000 Liège. Informations sur le site www2.ulg.ac.be/sciences/doccafe/index.htm |