Une vie meilleure Un film de Cédric Kahn, France, 2012.
Avec Guillaume Canet, Leïla Bekhti, Slimane Khettabi.
A voir aux cinémas Churchill, Le Parc et Sauvenière.
Le cinéma peut-il changer le monde ? Grande question, que la plupart des cinéastes se posent, et à laquelle ils répondent souvent par la négative. Quel est donc l’objet d’un film “social” qui, bien qu’il ne soit pas discursif, dénonce malgré tout, malgré lui, une situation, un état singulier de la société ? Derrière son titre candide et peu original, le nouveau film de Cédric Kahn fait d’abord le portrait d’une petite famille rapidement composée qui, aspirée dans l’engrenage de la dette, tente de trouver de quoi vivre, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit : non plus seulement de survivre, mais d’avoir l’audace de décider de son propre sort, de proposer sa propre définition de la vie, dans un système paradoxal où “pour avoir du travail, il faut de l’expérience ; et pour avoir de l’expérience, il faut du travail”.
Par des séquences rapides et elliptiques, le cinéaste dessine les contours d’un projet ambitieux : un cuisinier rencontre une serveuse qui a un fils ; un projet de restaurant prend forme, on fait un prêt, on commence les travaux, on y est presque mais ça bloque ; et c’est là que la crise révèle son identité. Le film et la lutte commencent, et il s’agit pour le protagoniste de ne pas fléchir un instant, et de ne pas même admettre que ceux qu’il aime puissent battre en retraite. C’est peut-être par là qu’on peut proposer une première caractéristique du film dit social : une course poursuite naïve et téméraire qui engage des personnages déroutés sur une double voie, celle du statut socio-économique d’une part, et celle, plus essentielle, du rapport à la vie, au monde et aux êtres aimés.
Une vie meilleure ne cache pas sa dimension mélodramatique que Cédric Kahn parvient pourtant à questionner en faisant jouer à des stars (Canet, Bekhti) des rôles que d’autres cinéastes (les Dardenne, ou Cyril Mennegun, dans Louise Wimmer, pour citer un film produit à peu près en même temps) auraient confiés à des “non-acteurs”. Le cinéaste réussit à transformer les visages de ses acteurs : Canet devient ce petit guerrier, incapable de retenir sa ferveur; Bekhti devient un masque de plastique fondu, dilué dans et par les larmes. Reste le petit Slimane, très probablement authentique dans son rapport au tournage et au monde, insouciant mais pris également dans la logique de la situation, cette logique paradoxale où on n’achète pas des chaussures de sport pour courir, mais le contraire : on court parce qu’on achète. Si le cinéma ne permet pas de changer cet état, il réussit malgré tout à proposer un regard sur cette course. Peut-être manquet-il, dans ce mélodrame militant et sans musique, un peu de poésie et d’images.
Abdelhamid Mahfoud
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