Mars 2012 /212
Mars 2012 /212

Consommons nos fruits sans modération

PommeVoulez-vous connaître une autre raison de l’intérêt de “manger local” ? Spécialiste reconnu de longue date dans les effets du stress oxydant, Joël Pincemail, chercheur au Centre de recherche expérimentale du département de chirurgie cardiovasculaire (Credec), et ses collaborateurs ont étudié les taux d’antioxydants observés dans plus d’une centaine de variétés de fruits produits dans nos régions. Et le constat est clair : “nos” fruits tiennent la forme ! Malgré un ensoleillement moins généreux que sous d’autres latitudes, ils contiennent suffisamment d’antioxydants (polyphénols, vitamines, etc.) pour équilibrer notre alimentation et aider à nous mettre à l’abri de certaines maladies cardiovasculaires et de cancers. Pourquoi alors consommer des fruits exotiques ?

Grappes d’antioxydants

Ces résultats encourageants, qui ont fait l’objet de publications récentes, sont le… fruit d’une collaboration interdisciplinaire entamée il y a quelques années entre le Credec, dirigé par le Pr Jean-Olivier Defraigne, le laboratoire de biologie moléculaire et biotechnologie végétales et le Cedevit à l’Institut de botanique (Pr Jacques Dommes et Claire Kévers). La criée Truval de Saint-Trond, l’une des plus importantes du pays, était associée à cette étude. Ensemble, les deux équipes scientifiques ont également développé et affiné différentes méthodes de tests et d’analyses permettant de certifier les allégations en termes de capacité antioxydante réelle des matrices alimentaires. Elles sont en particulier les premières à avoir modélisé de manière standardisée le fameux test américain Oxygen Radical Antioxydant Capacity (Orac).

Parallèlement, ces chercheurs sont aussi impliqués dans une demi douzaine de projets avec la Région wallonne, mettant une fois de plus en évidence la qualité de nos productions régionales. Ainsi, il est avéré que les méthodes de fabrication et de cuisson du fameux “sirop de Liège” ne réduisent pas les taux d’antioxydants présents dans les fruits au départ. De même, il apparaît très intéressant de constituer une filière de récupération des écorces de son afin d’en extraire les polyphénols et d’en faire de précieux compléments alimentaires. Même le vin importé et vieilli dans les caves de la Citadelle de Namur a fait l’objet d’analyses afin d’évaluer l’impact de la maturation sur son taux de polyphénols…

 

Une véritable expertise scientifique unique en Wallonie s’est progressivement constituée autour du Credec et du Cedevit ; les collaborations avec les pouvoirs publics (notamment dans le cadre du plan Marshall) et les entreprises s’intensifient. Mais relayer les messages de prévention vers la population fait aussi partie des priorités des chercheurs, comme en témoigne l’activité presque militante de Joël Pincemail. Celui-ci multiplie, en effet, les conférences grand public, les cours (à l’école du Barbou notamment), les interventions médiatiques. Il est même parmi les auteurs d’un ouvrage remarqué à sa sortie : Couleur santé : les secrets de la cuisine antioxydante.*

400 g par jour de fruits et légumes

Les antioxydants nous veulent du bien. Leur principal effet est de retarder plus longtemps l’apparition des désagréments ou des maladies liées au vieillissement. Manger mieux pour mieux vieillir… Grâce à leur richesse en antioxydants, les fruits et les légumes sont les meilleurs alliés de l’homme et de sa santé. On connaît l’adage, souvent répété, pas forcément appliqué : manger chaque jour cinq fruits ou légumes. Et si possible de couleur variée, les plus sombres (les fruits bleus, comme les prunes) figurant au palmarès des plus riches en polyphénols. « Ce qui importe, souligne toutefois Joël Pincemail, c’est la quantité ingérée. Selon les normes de l’OMS (s’inspirant du fameux régime crétois), une portion équivaut à 80 g, ce qui veut dire que nous devrions consommer quotidiennement 400 g de fruits et de légumes ». On est malheureusement loin du compte…

Dans l’étude Elan réalisée avec la province de Liège sur 900 personnes, Joël Pincemail a montré que 22% des hommes et 7% des femmes ne mangent jamais de fruits, et que seulement 30% des femmes et 24% des hommes mangent entre deux et trois fruits par jour. Insuffisant ! La situation est pire en ce qui concerne la consommation de légumes…

Enfin, pour doper son capital santé, rien de tel que d’appliquer le concept “0-5-30”, conseille Joël Pincemail. Pas (0) de tabac, 5 fruits/légumes par jour et 30 minutes d’activité physique quotidienne. Allez, vous pouvez arrêter ici la lecture de l’article et enfiler vos baskets…

Didier Moreau

* Avec Françoise De Keuleneer et le chef Jean-Pierre Gabriel. Editions Françoise Blouard, Bruxelles, 2008.

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