Mars 2012 /212
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Etudier et prévenir le stress du cheval

Cheval02Il devient de plus en plus opportun, en médecine vétérinaire, de se préoccuper non plus seulement du bien-être physique d’un animal mais également de son bien-être psychique et mental. C’est pour cette raison que Marie Peeters s’est penchée sur l’“Evaluation du niveau de stress du cheval en compétition et en milieu hospitalier”, thèse défendue en décembre dernier en faculté des Sciences. Pour cette biologiste, les réactions du cheval face à un élément stressant sont encore mal comprises, et donc potentiellement dangereuses. « Etudier le stress chez le cheval domestique, ce n’est pas seulement contribuer à son bien-être, mais aussi permettre une meilleure anticipation des risques, en particulier ceux encourus par les cavaliers et le personnel soignant », explique-t-elle, en référence aux deux volets de sa recherche : l’appréciation comportementale et physiologique de stress chez le cheval en milieu hospitalier et en compétition. « Autant d’occasions pour l’animal de subir un stress », précise-t-elle.

Cortisol salivaire

A défaut de pouvoir interroger directement l’animal, reste à se baser sur des indices mesurables régulièrement associés au stress : des variables physiologiques (dosage d’hormones, mesure des fréquences cardiaque et respiratoire), ainsi que comportementales. « En situation de stress, la réaction du cheval est à la fois comportementale – l’attaque, l’évitement ou la fuite – et physiologique avec, par exemple, une augmentation de la fréquence cardiaque ou de la concentration de certaines hormones. Nous savons qu’à la vue d’un élément stressant, l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien est stimulé et provoque une sécrétion accrue de diverses hormones dont le cortisol. Cette augmentation est observée tant chez l’homme que chez le cheval. » Une partie du cortisol quitte les vaisseaux sanguins et se retrouve dans la salive. « Ce cortisol salivaire, qui augmente d’un facteur 10 dans la salive pour un facteur 1 dans le sang, renseigne précisément sur le timing et l’intensité du stress. Par ailleurs, il est plus facile, notamment lors d’une compétition, d’effectuer un prélèvement de salive totalement indolore,que de conserver des échantillons sanguins. »

Cheval01En concours, le taux de cortisol salivaire augmente significativement chez le cheval et le cavalier, précisément au moment du passage en piste. Lors de sa dernière étude, Marie Peeters a pu constater que c’est chez l’homme qu’il augmente le plus. « Les meilleures performances en compétition ont été obtenues chez les cavaliers dont l’augmentation en cortisol salivaire étaient les plus faibles. L’inverse a été observé chez les chevaux. » Les chevaux, suggère la chercheuse, seraient restés dans un état de stress positif (eustress), tandis que la compétition aurait provoqué un état de stress néfaste pour les cavaliers (distress). « L’étude du tempérament du cheval et de la personnalité du cavalier est également très intéressante et pourrait nous permettre de mieux comprendre les variations de niveau de stress subies par la paire en compétition, ainsi que leur impact sur les performances réalisées. »

Anticiper pour protéger

Lors de l’hospitalisation d’un cheval, quels sont les comportements associés au stress qui peuvent entraîner des problèmes lors des manipulations vétérinaires ? Pendant deux ans, Marie Peeters a suivi 93 jeunes étalons pour tenter de répondre à cette question. Elle les a observés lors d’examens vétérinaires réalisés dans le cadre d’une expertise. « Le transport, les prises de sang, les examens endoscopiques, radiologiques et locomoteurs sont autant d’occasions d’observer des comportements non désirables pouvant être associés à un état de stress et qui rendent les manipulations plus périlleuses : mouvements de tête, tapes du pied, etc. » Parallèlement, l’évaluation du tempérament du cheval à son arrivée en clinique (est-il plutôt timide, anxieux, sociable, mal éduqué, etc. ?) permettrait de prédire d’éventuelles difficultés lors des interventions et d’anticiper les accidents. « De manière générale, l’étude du stress chez le cheval, couplée à l’étude du tempérament, a vocation anticipative : elle contribue à l’amélioration du bienêtre du cheval, du propriétaire et du personnel soignant. » Prévenir, c’est guérir.

Patrick Camal

Article complet sur le site www.reflexions.ulg.ac.be (rubrique vivant/Médecine vétérinaire).

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