Avril 2012 /213
Avril 2012 /213

Le département aérospatial et mécanique relève le défi de moteurs hybrides

UrbanConcept2Retranché au dernier étage du B52, où il se fait toujours appeler “LTAS” (son ancien patronyme : Laboratoire des techniques aéronautiques et spatiales), le département aérospatial et mécanique compte, sur notre campus, parmi les structures les plus innovantes. Fondé par le Pr Fraeijs de Veubeke, père de la “méthode des éléments finis” qui a rayonné dans les années 1960 et 1970, ce laboratoire a notamment donné naissance, autour de quelques pionniers, au logiciel Samcef (simulation numérique pour prototypage virtuel de structures aéronautiques), ou encore à Open Engineering, spécialisée dans le calcul de systèmes multiphysiques. Désormais un « consortium énorme » à la suite d’une importante diversification de ses champs d’étude – de la thermodynamique à l’aérospatiale –, le LT AS peut aussi compter sur le dynamisme de son pôle d’ingénierie des véhicules, propulsé par le Pr Pierre Duysinx.

Bientôt les voitures seront vertes

Sa charge comprend des applications strictement automobiles des méthodes de conception par ordinateur – notamment développées au profit des secteurs aéronautique et spatial – ainsi qu’une partie expérimentale qui est, quant à elle, celle de la propulsion électrique et hybride. « Nous capitalisons sur notre expertise en matière de conception assistée par ordinateur, expertise qui converge de plus en plus avec nos recherches dans le secteur de la “green propulsion” », indique Pierre Duysinx. Qui rappelle que la mise au point d’un véhicule environment-friendly aussi plaisant et silencieux qu’un véhicule moderne, véhicule qui jouit d’un haut niveau de satisfaction, relève du défi colossal, le moteur à combustion interne et l’agrément de conduite étant chacun le fruit d’un siècle de développement.

UrbanConcept1Ainsi, si un allègement de 10 % du poids de l’automobile permet une diminution de 6 % de la consommation d’énergie, il faut passer par l’intégration de matériaux neufs comme la fibre de verre et la fibre de carbone, et/ou pousser les matériaux conventionnels comme l’acier à la limite de leurs possibilités. « A l’heure où le poids moyen de la voiture est en baisse après une augmentation constante qui aura duré plus de 20 ans, l’industrie automobile rêve d’une voiture composite à l’instar de l’avion. Les constructeurs allemands annoncent ainsi quelque 80 kg de matériaux composites dans leurs automobiles à l’horizon 2020. Ceci ne va pas sans son lot de problèmes : le défi, c’est le gain d’énergie sans perte d’agrément de conduite, sans parler du bruit de la caisse plus important du fait du faible poids de la voiture. Quant au moteur électrique, il est certes plus silencieux, mais pose par ailleurs ses propres difficultés, parce que celui-ci vibre à plus haute fréquence », explique le professeur, pleinement conscient que, entrant de plain-pied dans une époque particulièrement stimulante, le chercheur fait face à des possibilités réelles de s’insérer dans un changement.

Et le même professeur de poursuivre : « dans une industrie où la moindre erreur peut notamment se traduire par des dommages importants en termes de réputation, nous sommes aujourd’hui face au défi colossal de créer, dans des délais extrêmement courts (Angela Merkel entendait, l’an dernier, multiplier en dix ans, par 400 000 le nombre de voitures électriques en circulation, faisant de l’Allemagne un marché-pilote pour la mobilité électrique), des automobiles hybrides ou électriques dont la fiabilité, la performance et l’agrément de conduite – en ce compris la réduction du bruit – seraient au moins équivalentes à ceux des véhicules thermiques. »

UrbanConcept3Dans ce contexte, il convient de procéder à une nouvelle étude rigoureuse de quantité de phénomènes, laquelle passe inévitablement par de la simulation numérique complexe. Qui est, fort opportunément, au fondement du LT AS dont les logiciels ont été reconnus par le Pr Kikuchi, vice-président du Toyota Central Research & Developpement Laboratories himself pour leur potentiel d’innovation à l’abord de problèmes industriels posés par le développement d’automobiles électriques et hybrides. « C’est lui qui, par exemple, nous a conseillé de nous concentrer sur la simulation des lignes de transmission », ponctue Pierre Duysinx. C’est aussi la multinationale japonaise Toyota (qui a distancé les principales enseignes automobiles européennes en matière de propulsion hybride) que l’on retrouve, à l’ULg, aux commandes d’un programme de financement de thèses de doctorat (trois ans) dans le registre des nouveaux systèmes de traction. Un premier doctorant a entamé sa recherche en janvier 2012. «Au-delà de la contrainte de travailler avec des industriels plutôt que dans la recherche fondamentale, il y a le plaisir de contribuer véritablement à des solutions de demain », estime Pierre Duysinx.

Campus automobile

Le LT AS jouit par ailleurs d’une relation privilégiée avec le Campus automobile (Spa-Francorchamps) qui prend, entre autres options (voir l’article du 15e jour du mois n°212 sur le projet Urbike), la forme d’un Sustainable Automotive Engineering Certificate, formation commune en anglais destinée aux ingénieurs sur le point d’être diplômés ou venant de l’être et qui souhaiteraient effectuer une spécialisation. C’est dans le cadre de cette formation qu’interviennent des professeurs de l’UL g, parallèlement aux séminaires donnés par des industriels – dont Ford Motor Europe. Selon Pierre Duysinx, « l’attrait de Francorchamps, outre le cadre prestigieux du circuit, c’est qu’il tient lieu d’interface entre la culture automobile germanique, fondée sur la robustesse et la fiabilité, et une culture plus latine, marquée par l’innovation et l’audace. »

Patrick Camal
Photos : LTAS

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