Juin 2012 /215

Le projet Phoenix à l’affût des déchets métalliques

Recycler1Actuellement 80 à 85 % des composants de nos véhicules automobiles se recyclent. Mais, directive européenne oblige, l’objectif pour 2015 est fixé à 95 %. Et tout gain de pourcentage supplémentaire exige des efforts importants de R&D. C’est pour grignoter ces quelques pour cents essentiels que le projet Phoenix a vu le jour dans le cadre du plan Marshall. Il associe la société Comet Traitements, un leader européen dans le traitement et le recyclage de déchets métalliques, à plusieurs acteurs technologiques wallons, dont le laboratoire Gemme (génie minéral, matériaux et environnement) de l’UL g. Au sein de celui-ci, un tout nouveau procédé de traitement par biométallurgie des résidus fins de broyage (moins de 1 mm de granulométrie) a été mis au point dans le cadre du programme. A la clé, de nouvelles possibilités d’affiner le recyclage et de créer de nouvelles filières de valorisation des déchets. Une première wallonne !

Presser le citron

Le secteur du traitement et de la valorisation des déchets métalliques (véhicules hors d’usage, appareils électriques et électroniques, ferrailles, etc.) génère des quantités sans cesse croissantes de résidus de broyage, dont dix millions de tonnes environ par an en Europe pourraient faire l’objet d’un recyclage supplémentaire par la mise au point de méthodes alternatives. Le recyclage et la valorisation de ces “gisements de matières” est devenu un enjeu considérable… et une filière économique prometteuse, inscrite dans le développement durable. Les autorités publiques l’ont bien compris et imposent désormais des objectifs ambitieux, qui nécessitent des innovations technologiques.  En Wallonie, les efforts déployés depuis plusieurs années par Comet Traitements ont permis à l’entreprise d’atteindre des taux de recyclage plus élevés que la moyenne de ses concurrents internationaux. Mais pour préserver sa longueur d’avance, et atteindre les exigences européennes, elle a, avec ses partenaires, déposé le projet Phoenix dans le cadre du plan Marshall (6,5 millions d’euros sur trois ans). Une des innovations a été développée au laboratoire Gemme de l’ULg.

Le cortège atypique de métaux présents dans ces concentrés fins issus des résidus de broyage (cuivre, zinc, plomb, étain, argent et or) ne permet pas, au travers des filières métallurgiques existantes actuellement, d’obtenir des taux de récupération élevés pour chacun des métaux. De plus, le bilan énergétique de ces filières pour ce type de produits est décevant. « Le procédé innovant que nous avons mis au point dans le cadre du programme Phoenix pallie ces désavantages », explique David Bastin, ingénieur responsable du projet au laboratoire Gemme. Il s’agit d’un procédé biométallurgique de lixiviation, lequel consiste à traiter le flux de résidus dans un bioréacteur. Au sein de celui-ci, les différents composés métalliques sont extraits sélectivement sous l’effet catalytique d’une solution oxydante générée par des micro-organismes.

Un prototype de bioréacteur a été installé à la faculté des Sciences appliquées. Il traite en flux continu 4 kg de résidus de broyage tous les jours. « Les résultats sont très encourageants », ajoute David Bastin. Le procédé conduit à la production de cuivre et de zinc électrolytiques de haute pureté et à des concentrés plus denses de plomb,  d’étain et de métaux précieux. Cette sélectivité accrue permet de poursuivre la valorisation de ces métaux. « Il s’agit aussi d’un procédé basse température ne consommant pas beaucoup d’énergie », précise David Bastin.

Des lendemains qui chantent

Le succès de l’unité-pilote a déjà entraîné une suite. En 2013, grâce à un financement européen au travers du projet Ecoinnovation Biolix, une première unité industrielle de traitement des résidus de broyage, basée sur le procédé validé à l’UL g, sera installée sur le nouveau site industriel de Comet Traitements à Obourg. Cet investissement de 2,6 millions d’euros, qui assure un leadership belge et européen à l’entreprise, se traduira aussi par la création d’une dizaine d’emplois.

Quant au laboratoire Gemme de l’ULg, il se tourne déjà vers un autre avenir : les méthodes de recyclage des métaux technologiques spéciaux, qui entrent aujourd’hui dans la composition des panneaux photovoltaïques. Les premiers panneaux devront être recyclés dans 10 à 20 ans. C’est dès maintenant qu’il faut envisager les procédés de récupération de ces éléments rares, présents à l’état de traces dans la nature…

Didier Moreau

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