Septembre 2012 /216
Septembre 2012 /216
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La conférence “SOFT 2012” aura lieu à Liège. Une première en Belgique.

lecomtebeckersJacqueline Lecomte-Beckers est professeur au département d’aérospatiale et mécanique, spécialiste des matériaux métalliques.

Le 27e Symposium on Fusion Technology (SOFT 2012) se tiendra à Liège du 24 au 28 septembre prochain. Cette grande rencontre internationale, qui réunit tous les deux ans scientifiques et industriels concerne la fusion thermonucléaire. A long terme, celle-ci pourrait devenir une solution extrêmement intéressante pour notre approvisionnement énergétique avec, de surcroît, un très faible impact sur l’environnement. Parallèlement à ce congrès, une exposition “Fusion, énergie du futur”, conçue par la Commission européenne, sera présentée au grand public à l’Institut de zoologie jusqu’au 5 octobre. Zoom sur un rêve de physiciens.

Le 15e jour du mois : Existe-t-il une formation spécifiquement consacrée à l’énergie nucléaire ?

Jacqueline Lecomte-Beckers : Il existe un master complémentaire en génie nucléaire – le “Belgian Nuclear higher Education Network” (BNEN) – organisé conjointement par six universités belges* et le Centre d’étude de l’énergie nucléaire de Mol. Ce master s’adresse principalement aux ingénieurs, aux physiciens et aux chimistes. Pour ma part, j’interviens dans ce cursus où j’enseigne les bases des “Nuclear Materials” et c’est à ce titre que je représente l’ULg dans le comité organisateur du BNEN. Mes recherches concernent notamment l’aptitude des matériaux à résister aux sollicitations extrêmes (températures, contraintes, radiations). L’examen des matériaux irradiés nécessite des équipements spécifiques, blindés, dont dispose le Centre de Mol avec lequel je collabore depuis de nombreuses années. A ce stade, je précise toutefois que je ne défends pas nécessairement l’énergie nucléaire. Mais dans la mesure où les centrales existent, j’estime qu’il faut en assurer la sécurité, ce qui rend indispensable la formation de spécialistes et justifie amplement la recherche dans ce domaine.

Le 15e jour : La fusion nucléaire sera au coeur du 27e Symposium on Fusion Technology (SOFT 2012) qui se tiendra à Liège à la fin du mois de septembre.

J.L.-B. : C’est une première en Belgique ! Je suis membre du comité organisateur de cette conférence dont le responsable est Vincent Massaut, du Centre de Mol. C’est un symposium international qui non seulement réunit tous les deux ans des chercheurs de qualité  dans le domaine, mais encore associe les entreprises concernées de près ou de loin par les réacteurs à fusion nucléaire. On attend 1000 personnes et nous avons déjà reçu plus de 700 contributions scientifiques. Le prince Philippe de Belgique rehaussera de sa présence la soirée inaugurale.

Le 15e jour : Qu’est-ce que la fusion nucléaire ?

J.L.-B. : C’est une autre méthode pour produire de l’énergie à partir de l’atome. Les centrales actuelles fonctionnent selon le principe de la “fission” nucléaire, laquelle libère de l’énergie par scission du noyau d’atomes lourds, comme l’uranium principalement. Si elle possède des avantages, cette énergie est également très critiquée, d’une part à cause des déchets radioactifs qu’elle génère (et qu’il faut stocker) et, d’autre part, parce que la radioactivité est dangereuse pour la santé : il faut impérativement la confiner (c’est le cas dans les centrales ou dans les hôpitaux). Par ailleurs, le danger de voir la réaction “s’emballer” est réel : l’accident de Fukushima en est la preuve.

 A contrario, la “fusion” nucléaire – source d’énergie du Soleil – résulte de l’amalgame de noyaux d’atomes légers (hydrogène, lithium, etc.). Totalement sécurisé (la réaction s’arrête au moindre défaut), ce processus permettrait de produire plus d’énergie encore, sans déchets autres que le réacteur lui-même. De plus, la matière première nécessaire – les éléments légers – est inépuisable. Sur papier, l’idée est très séduisante mais elle se heurte, dans les faits, à une difficulté de taille : la réaction de fusion nécessite des températures extrêmes, de l’ordre de dizaines de millions de degrés… A cette hauteur, la matière se transforme en un plasma impossible à emprisonner dans une enceinte matérielle. Il faut utiliser une “bouteille magnétique”: le tokamak. Dans cette installation, il est indispensable d’utiliser des matériaux résistants aux températures ainsi générées.

Le 15e jour : Où en est la recherche à présent ?

J.L.-B. : Depuis plusieurs années, les conditions de fusion de noyaux atomiques légers sont réalisées dans de nombreux laboratoires européens, notamment à l’Institut für Energief-und Klimaforschung (IEF) de Jülich, en Allemagne, qui possède un tokamak. En 1989, les équipes de recherche européennes ont atteint avec le Joint European Torus (JET) des températures supérieures à 250 millions de degrés pendant une seconde. Bien d’autres expériences ont eu lieu avec succès et, aujourd’hui, les scientifiques pensent que la fusion est réalisable. Le projet International Thermonuclear Experimental Reactor (ITER), installation de grande ampleur en construction dans le sud de la France, devrait prouver la faisabilité du concept. Et la communauté scientifique espère, dans un proche avenir, concevoir un réacteur de démonstration (Demo), lequel établirait de manière évidente la possibilité de produire de l’énergie grâce à la fusion. Les plus optimistes pensent que l’on pourrait arriver à une production commerciale aux alentours des années 2050.

Afin de sensibiliser le grand public à cette thématique, la Commission européenne a conçu une exposition “Fusion, énergie du futur”, laquelle sera présentée en marge de la conférence à l’Institut de zoologie.

Propos recueillis par Patricia Janssens

Voir la vidéo sur le site ulg.tv : www.ulg.ac.be/webtv/fusion

* UCL-KUL-ULB-VUB-UGent et ULg.

Symposium SOFT-2012

“Exposition industrielle et fusion nucléaire”

Du 24 au 28 septembre, au Palais des congrès, esplanade de l’Europe, 4020 Liège.

Contacts : tél. 04.233.62.97, courriel info@soft2012.eu, site www.soft2012.eu

Exposition “Fusion, énergie du futur”

Du 19 septembre au 5 octobre, en collaboration avec Réjouisciences.

Ouverture en semaine de 9 à 17h, le week-end de 14 à 18h, à l’Institut de zoologie, quai Van Beneden 25, 4020 Liège.

Informations sur le site www.soft2012.eu/fusionexpo

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