Novembre 2012 /218
Novembre 2012 /218

L’ULg participe au plan Wallonie cyclable

L’occasion fait souvent le larron. Il aura fallu que les chauffeurs de bus débrayent pour que Marjorie Lismont (25 ans) embraye sur le vélo. C’est en effet à la faveur d’une énième grève des chauffeurs liégeois des transports en commun que cette doctorante au sein de la faculté des Sciences a décidé d’enfourcher sa bicyclette pour gravir les 3 ou 4 kilomètres d’Angleur où elle réside jusqu’à sa Faculté. Mais, pour tout dire, cette petite demi-heure de grimpette matinale n’était pas rédhibitoire pour cette sportive régulière qui ose même jouer avec le chronomètre pour pimenter ses coups de pédales. Tous les jours, depuis deux ans et demi, elle accroche sa chasuble fluorescente et laisse sa voiture déprimer, seule, devant chez elle. Et snobe le bus. « Cela me prend clairement plus de temps de monter avec le bus 48, glousse notre vététiste, nageuse et joggeuse. Les bus sont tellement bondés lorsqu’ils arrivent près de chez moi que je suis obligée d’en laisser passer trois ou quatre avant de pouvoir monter dedans. De toute façon, ça me permet de rester en forme et d’être en adéquation avec mes convictions écologiques et budgétaires. » Son compagnon part lui aussi travailler en vélo pliable avant de monter dans le train vers Namur.

Tous vélos-actifs !

Velo-FileIndienneLa constance du temps de trajet est l’un des principaux arguments scandés par la vidéo de présentation de “Tous vélo-actifs”, l’une des actions du plan “Wallonie cyclable” pilotée par le Service public de Wallonie et dont l’objectif est d’inciter les travailleurs wallons à effectuer les déplacements domicile-travail à vélo. Depuis le mois de mai, et ce pendant un an, 16 entités pilotes – soit de gros employeurs des secteurs public et privé tels que Swift, GSK, la province de Namur ou Ethias – sont suivies et gratifiées d’une panoplie d’événements à organiser (conférences, petits-déjeuners gratuits pour ceux qui arrivent au boulot à vélo, etc.) et d’outils de communication servant à diffuser l’information au sein de l’entreprise.

Après Gembloux Agro-Bio Tech, c’est l’ensemble de l’université de Liège qui a demandé à rejoindre l’opération. L’une des actions visibles a été la mise en place, à la fin du mois de septembre durant la “semaine de la mobilité”, d’un atelier vélo à l’entrée du domaine universitaire au Sart-Tilman, non loin des homes. Une quarantaine de réparations y ont été effectuées par l’asbl Integrasport (voir en fin d’article), qui proposait également des entretiens, tout en se montrant disposée à retaper de vieux vélos. L’initiative a également généré des demandes pour le covoiturage et le car-sharing, et a convaincu les autorités universitaires de permettre l’installation permanente du même atelier à partir du 23 octobre. Celui-ci occupe dorénavant un vieux bâtiment qui devrait disparaître, à l’horizon 2017, lors de la construction d’un écoquartier respectueux des normes passives.

Les initiatives en faveur de l’écologie peuvent donc apparaître multiples et convergentes, tout comme les aménagements incitatifs et facilitants pour l’utilisation des deux-roues sur les campus. « Nous avons, par exemple, déjà effectué un relevé des endroits où placer des râteliers à vélo sur le campus du Sart-Tilman. Un appel d’offres devrait être lancé prochainement », détaille Bernadette Babilone, conseillère en mobilité (CEM) et membre de la cellule “urbanisme et mobilité” de l’administration des ressources immobilières (ARI ). « Un nouveau cheminement cyclo-pédestre devrait être prochainement réalisé entre la place du Rectorat et la faculté des Sciences appliquées. Un relevé du maillage des liaisons entre bâtiments par modes lents (piétons, cyclistes) et une restauration de l’état des chemins en question sont à l’étude. » Sans compter l’actuelle piste cyclable, jadis financée par l’Europe, qui déroule son tracé depuis la résidence des étudiants jusqu’aux centres sportifs et dont le revêtement a été rendu invisible au fil des frondaisons et intempéries. Presque inconnu du grand public, cet itinéraire de liaison aux camaïeux de bruns mériterait une sérieuse rénovation ainsi qu’une signalétique moderne afin d’être connecté à de nouveaux tronçons.

Coup de pouce

Mais d’autres contributions à l’avènement du pédalier font également office de laboratoire. Ainsi en est-il des six vélos que l’administration des ressources immobilières (ARI) met à disposition de ses employés pour les courts déplacements entre les bâtiments. Christian Evens, son directeur, confirme qu’ « ils sont utilisés quand le temps le permet et lorsqu’on ne transporte pas dix dossiers. Mais ils servent aussi de test pour mieux réfléchir à de futures installations comme des parkings sécurisés accessibles à ceux qui voudraient laisser leur vélo sur le campus en faisant le choix d’autres modes de transports pour regagner leur domicile ». Au 20-Août, quelques places réservées existent déjà dans le parking de la chaufferie. « Elles sont sous-utilisées pour le moment, mais on y repensera lorsqu’il sera question du réaménagement de la cour centrale. Les douches, elles, sont déjà bien utilisées », assure le directeur de l’ARI. C’est le cas de Jacques Dusart, employé à l’administration recherche et développement, qui en profite lorsqu’il avale tous les 15 jours la distance entre son village de Bassenge et la place du 20-Août.

Velo-BoisJohanne Huart, assistante au service de psychologie sociale, n’était pas sportive pour un sou avant de se décider à sauter sur son vélo à 5 heures, un matin d’insomnie. Son envie d’améliorer sa condition physique tout en évitant les bus bondés, elle l’a d’abord mise sur le gros pignon et le petit plateau. En partant suffisamment à l’avance et en prenant son temps. Après les lentes avancées à pleins moulinets, sa force de pédalage s’est développée à mesure de l’amélioration de sa forme physique. Pour le Pr Jean-Michel Crielaard, chef du service de médecine physique et kinésithérapie-réadaptation, il s’agit de la bonne attitude : « Il est important d’utiliser le bon braquet sur un vélo adapté à sa morphologie, dos rond. Mieux vaut en effet pédaler plus en forçant moins, lorsque l’on ne pratique pas le vélo à un niveau sportif. Cela, pour éviter les tendinopathies du genou, seuls véritables traumatismes communs qui peuvent apparaître lorsque l’on pédale plus de 30 minutes dans de mauvaises conditions. Dans les grandes côtes, le vélo avec assistance électrique est idéal où, sans entraînement, on risque – en forçant – une angine de poitrine qui peut être un signe prémonitoire d’infarctus. Reste que le fait de pratiquer régulièrement une activité sportive permet également de réduire le risque de maladies cardio-vasculaires. Le vélo, en plus, supporte une partie du poids du corps et soulage les articulations. »

Dans la tribu du vélo, tous ne sont pas donc pas égaux. Pierre Verjans, par exemple, chargé de cours au département de science politique, qui double régulièrement Johanne (tout le petit groupe de cyclistes sympathiques finit par se (re)connaître le matin dans la montée tant redoutée) est équipé depuis peu de l’un de ces fameux vélos électriques. Une aide pardonnable lorsque l’on sait qu’il vient de Cheratte (25 km en tout) et qu’il lui arrive encore de faire le trajet sur un traditionnel deux-roues. Nettement plus frais que ses poursuivants, cet ancien marathonien n’a donc généralement pas besoin d’utiliser la douche dont est doté le bâtiment de la faculté de Droit. Bon prince, il milite tout de même pour la généralisation d’infrastructures sanitaires susceptibles de servir également à ceux qui vont courir sur le temps de midi. Un avis partagé par Jean-Michel Boecker qui, lorsqu’il étudiait en 3e bac ingénieur, empruntait presque le même trajet que lui en venant d’Herstal. Tous confirment : le temps de parcours est inférieur ou identique à celui effectué en bus. Mais caressent-ils le rêve de pouvoir accrocher leur vélo aux bus afin de déjouer l’obstacle des fortes inclinaisons ? « Se retrouver tout transpirant dans le bus, pour ressortir peu après dans le froid, ce n’est pas idéal », rejette Jean-Michel.

Nicolas Lequarré, sous contrat en psychologie sociale des groupes et des organisations, embarque, lui, son vélo pliant dans le bus lors de la montée et profite des plaisirs de la gravité pour son trajet retour. Mais, pour une utilisation quotidienne, cela représente un investissement à l’achat de minimum 500 euros. Reste que les membres du personnel (statutaire ou patrimoine au sens strict) qui se déplacent à vélo, sur une distance d’au moins 1 km et au minimum dix jours ouvrables par mois, peuvent obtenir une indemnité kilométrique de 0,15 euro par km. Ainsi, un cycliste qui utilise son vélo tous les jours et dont le domicile est situé à 5 km peut bénéficier d’une indemnité de 330 euros par an. Ce n’est pas négligeable.

Ecologiquement vôtre

L’été passé, le ministre wallon chargé de la mobilité, Philippe Henry, a commandé une enquête Dedicated Research sur la mobilité des Wallons. Il appert que 24% des Wallons parcourent moins de 10 km par jour, que 66% d’entre eux possèdent un vélo… et que 32% des utilisateurs de voiture disent le faire car leurs trajets sont trop courts. Le cabinet ministériel interprète le paradoxe : “Trop courts pour passer au transport en commun sans doute, mais, du coup, suffisamment court pour envisager le vélo !”. Côté freins, 72% des personnes interrogées citent les intempéries. « Mais, contrairement aux idées reçues, on passe presque toujours entre les gouttes », assure Jacques Dusart (32 ans), même s’il lui est arrivé une fois d’être trempé jusqu’aux os pendant son trajet vers la gare, juste avant de prendre le train pour Bruxelles… et une réunion.

La “petite reine” ne compte pas non plus les années. A 63 ans, Christine Pagnoulle, professeur de littérature anglaise, a besoin de cet exercice quotidien. « J’ai peu de temps. Ce petit effort, bon pour la santé et le moral, vient donc à point, lance-t-elle, enjouée. Et puis, je ne produis pas de CO2. » Dix minutes pour gravir en deux-roues l’avenue de l’Observatoire vers Cointe, c’est presque aussi lent qu’à pied. Mais cela fait 20 ans qu’elle se rend de cette manière place Cockerill, voire de temps en temps au Sart-Tilman. « En grimpant lentement, j’organise mes cours ou je pense aux questions d’examen », savoure-t-elle.

La riposte semble prête puisque les étudiants auront eu, eux, tout le loisir de préparer leurs réponses lors de l’ascension en groupe qu’ils ont organisée le 25 octobre à l’occasion d’une action mobilité proposée par la Fédé (photo). Une bonne heure après leur rendez-vous au 20-Août, c’est autour d’un petit-déjeuner offert au Sart-Tilman que les jeunes participants ont pu seriner, preuve faite, qu’avec un bon vélo… rien n’est impossible.

Page réalisée par Fabrice Terlonge

Atelier vélo

Velo-AtelierOuvert à tous, le nouvel atelier vélo du Sart-Tilman est géré par les deux mécaniciens animateurs de l’asbl Integrasport qui accueille aussi des adolescents de 13 à 15 ans dans une optique d’insertion scolaire et socioprofessionnelle. Un entretien à 40 euros, un réglage du dérailleur à 5 euros ou un dévoilage de roue à 6 euros sont proposés, avec des réductions supplémentaires offertes aux étudiants et au personnel ULg pour tous les petits bobos du vélo.

Des bicyclettes neuves et d’occasion sont également disponibles à la vente entre 50 et 80 euros. « Un entretien annuel est indispensable lorsque l’on roule souvent, insiste André Dereppe. Sous peine de devoir finalement changer le jeu de roues. Tout s’use et une chaîne doit se changer tous les 4000 km. » Vous pouvez également déposer vos vélos en fin de vie. Ouverture les lundis de 8 à 17h et, du mardi au jeudi, de 8 à 18h.

Contacts : tél. 0486.37.89.46
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