Février 2013 /221

Echo

ArcelorMittal, la lutte finale ?

Les coulées d’acier liquide cèdent la place aux larmes des travailleurs d’ArcelorMittal, à nouveau dépités par l’ampleur des nouvelles fermetures annoncées, cette fois dans le “froid”, par le géant indien. Mittal (…) est le premier groupe international issu de la mondialisation. C’est un cas d’étude extrêmement intéressant et – j’espère – un cas particulier. Sinon, ça laisse présager de bien mauvaises surprises à l’avenir, commente (Sudpresse, 25/1) le Pr Didier Van Caillie (HEC-ULg), expert de la stratégie des entreprises qui surveille de près celle d’ArcelorMittal. Dans L’Echo (25/1), il explique que le groupe ne peut cacher qu’il est dans une situation difficile. Il est sous la surveillance des agences de notation qui l’ont dégradé au regard de sa dette particulièrement élevée (plus de 22 milliards de dollars). Toujours selon lui, un groupe qui paie le prix d’une stratégie de croissance ultra-rapide à l’anglo-saxonne, financée par un endettement élevé.

ArcelorMittal victime de sa propre stratégie : de quoi exonérer les syndicats de toute responsabilité ? Pour le Pr Francois Pichault (HEC-ULg), ils ont joué normalement leur rôle. Ils devaient défendre les travailleurs envers et contre tout, alors que tout le monde savait, surtout dans les états-majors. Il y a eu une sorte de gesticulation tragique (Sudpresse, 25/1). Didier Van Caillie partage le même avis. Ils ont fait preuve de beaucoup de modération (…). Pour comprendre leur position (…) il faut voir l’arrogance de la direction de Mittal. Elle a un style de négociation très méprisant quand on ne sert pas ses intérêts. D’autant que, souligne François Pichault, les interlocuteurs ont mandat avec contraintes de résultats sans pouvoir négocier. Le management liégeois d’Arcelor doit se sentir dans une situation humaine très difficile.

L’annonce de la fermeture est d’autant plus surprenante qu’elle intervient à un moment où toutes les données sont encourageantes pour l’économie européenne et qu’on assiste à une reprise plus forte que prévu, ajoute Didier Van Caillie (L’Echo, 25/1). Cependant, tempère François Pichault, personne n’était dupe après la décision sur le chaud. On savait que le froid allait suivre, la question était de savoir quand et à quel rythme (Sudpresse, 25/1).

Et maintenant ? La nationalisation, option immédiatement avancée de divers côtés, y compris au gouvernement, est-elle une solution raisonnable ? Les observateurs les plus optimistes la disent au mieux semée d’embûches. Le droit européen impose aux pouvoirs publics de se comporter comme un investisseur privé. Justifier un investissement par la volonté de sauver 1300 emplois ne suffira pas. Un investissement temporaire est envisageable mais il faut une justification industrielle, ce qui ne sera pas facile à apporter en cette période de baisse de production, prévient Ann-Lawrence Durviaux, professeur à la faculté de Droit.

Un repreneur ? Mais ArcelorMittal n’est pas vendeur… Dans Trends Tendances (31/1), Didier Van Caillie entrouvre pourtant une toute toute petite porte… Ce n’est pas parce que Mittal répète qu’il n’est pas vendeur qu’il ne vendra pas ! Cela peut être un moyen de faire monter la pression pour négocier dans des conditions plus favorables. Et de gagner du temps : il n’a pas une vision claire de l’avenir du marché sidérurgique.

Mais les travailleurs, le gouvernement, la région ont-ils le temps d’attendre ?

D.M.

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