Mars 2013 /222

Le Printemps des sciences se met à l’eau

Il y a quelques milliards d’années, la Terre était complètement sèche. Comment a-t-elle pu finir par hériter de son surnom de “planète bleue” ? Ce serait grâce aux comètes et à la glace que celles-ci contiennent. Tant et si bien qu’aujourd’hui, l’hypothèse selon laquelle de l’eau (et, par conséquent, certaines formes de vie) serait présente ailleurs dans l’Univers n’est plus farfelue…

Elle est partout

Emmanuël Jehin le reconnaît : lorsqu’on lui a demandé d’organiser un colloque sur le thème de l’eau dans l’Univers à l’occasion du Printemps des sciences*, il a eu un instant d’hésitation. Quel rapport entre l’“or bleu” et sa discipline de prédilection, l’astrophysique ? « Ce n’est pas vraiment un sujet que l’on aborde tous les jours dans nos recherches… » Ce chercheur qualifié en faculté des Sciences, spécialiste des comètes, n’a toutefois pas dû réfléchir longtemps avant de trouver un angle à aborder lors de cette conférence du 26 mars prochain. Car le point commun entre les deux est bien plus flagrant que ce que l’on pourrait imaginer au premier abord : l’un ne va pas sans l’autre, tout simplement. « L’eau est une molécule très simple et très abondante dans l’Univers, résume-t-il. On en retrouve partout dans les galaxies, dans le milieu interstellaire et même dans le Soleil ! »

La Terre est cependant le seul endroit connu où on la retrouve sous sa forme liquide. En abondance, qui plus est : 71% de sa surface est occupée par des océans. La planète bleue porte donc bien son nom. Même si, à l’heure actuelle, personne ne sait avec précision comment elle a bien pu finir par hériter de ce surnom. Il y a 4,6 milliards d’années, notre bonne vieille Terre était désespérément sèche. On retrouvait bien, çà et là, la présence de quelques éléments gazeux. Mais de traces liquides, aucune. Comment une planète a-t-elle bien pu passer de l’aridité la plus totale à l’humidité quasi généralisée ? « On pense que ce sont les comètes qui en sont l’origine, explique Emmanuël Jehin. On imagine qu’un jour, elles auraient “attaqué” la Terre. Les cratères que l’on peut observer sur la Lune en seraient d’ailleurs les témoins. Les comètes sont des astres fossiles congelés, qui renferment l’eau originelle du système solaire. » Ceci expliquerait donc cela.

Cette hypothèse, qui s’impose aujourd’hui dans le monde scientifique, a pourtant d’abord été mise à mal suite à l’analyse de la comète de Halley. « On a constaté que le rapport Deuterium/Hydrogène était différent. » En d’autres termes, l’eau contenue dans ces petits corps du système solaire n’était pas la même que celle que l’on retrouve sur Terre. Mais des observations récentes, réalisées par le satellite Herschel de l’Agence spatiale européenne (ES A) ont au contraire montré que ce rapport D/H était bel et bien semblable pour les comètes dites “à courte période”, soit celles qui ont le plus de chance d’entrer en collision avec la Terre. Reste à savoir comment l’eau a fini par ne plus s’évaporer de notre bouillante planète. Ce serait grâce à la gravité terrestre, qui aurait été capable de “retenir” l’atmosphère. Tout le contraire de Mars qui, en son temps, avait elle aussi accueilli de l’eau en son sein.

Traces d’eau, donc de vie ?

L’or bleu ne serait d’ailleurs plus l’apanage de la Terre. Sa présence sur d’autres exoplanètes (des planètes orbitant autour d’un autre astre que le Soleil), situées dans des zones habitables (ni trop proches, ni trop éloignées de leur astre) se révèle de plus en plus probable. Pour l’instant, on recense peu d’exoplanètes de ce type. Mais cela ne saurait tarder, notamment grâce à la prochaine mise en route de télescopes extrêmement puissants. « Il y a 200 milliards d’étoiles dans la galaxie. Parmi elles, une sur cinq ou sur dix possède des planètes qui tournent autour d’elles. Cela offre beaucoup de possibilités ! »

Or, si des traces d’eau sont détectées quelque part dans ce vaste Univers, cela signifierait qu’on pourrait également y déceler des traces… de vie ! Sous quelle forme ? Mystère… Mais l’hypothèse de la présence d’autres êtres vivants capables de respirer devient de moins en moins extravagante. « On pourra bientôt récolter des observations sur ces possibles formes de vie. Même si c’est très frustrant, car on ne pourra jamais se rendre jusque-là… », conclut Emmanuël Jehin.

Mélanie Geelkens

• Du 18-24 mars, le Printemps des sciences sera consacré à l’or bleu.
Il se déclinera en référence à l’Année internationale de la coopération dans le domaine de l’eau proclamée par l’Unesco. Reprenant la formule des années antérieures, des activités pour les classes sont proposées durant la semaine, tandis que les activités du week-end sont ouvertes à un large public familial. Institut de zoologie, quai Van Beneden 22, 4020 Liège.
Des visites de laboratoires au Sart-Tilman, à Arlon, à Gembloux, à La Reid et à Verviers complètent le programme.

Contacts : tél. 04.366.96.96, courriel sciences@ulg.ac.be, site www2.ulg.ac.be/sciences/printemps/printemps2013.htm

• Dans ce cadre, le 26 mars à 20h, aura lieu une conférence sur “L’eau dans l’Univers : un trésor essentiel à la vie” par le Pr Pierre Magain, à l’espace Duesberg , rue des Artistes 2, 4800 Verviers.

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