Mars 2013 /222

En marge des comités de baptême, une centaine d’étudiants voit le folklore autrement

CalotteA l’aune des festivités de la Saint-Torè et d’une semaine d’ardentes festivités, du 18 au 21 mars, chacun cherche son charme : le Droit ne jure que par la Saint-Drum’s, HEC-ULg s’éclate à sa Garden Party en plein air et les ingénieurs trépignent avant leurs “4h Trottis”. Toutefois, malgré les 800 baptisés enregistrés cette année, d’aucuns zélateurs du folklore estudiantin se plaignent de l’absence de folklore dans ces événements, vus comme essentiellement musicaux et bibitifs.

Et le folklore dans tout ça ?

Si beaucoup de “vieux”, campant sur leur Aventin, semblent déplorer la disparition des chants – hormis dans certaines Facultés comme celle de Philo –, phagocytés par la musique des haut-parleurs, Philippe Devos, instigateur du premier “char des vieux” du cortège de la Saint-Torè observe le présent d’un bon oeil : « Forcément, c’était toujours mieux avant ! Mais je constate que, depuis deux ou trois ans, les étudiants sont bien. On dénombre moins de comas éthyliques et l’ambiance est celle de réunions entre amis. Tous les 15 ou 20 ans, le folklore change. Et leur folklore à eux, c’est aussi les garden parties, en plein air comme celle de HEC-ULg, ou les 4h Trottis. Un peu à l’américaine. L’on boit moins et l’on vomit moins que lorsque j’étais jeune. Mais finalement, comme nous, ils s’épanouissent, déchargent la pression des études et conservent les valeurs d’amitié et de soutien mutuel. La façon de se les transmettre a simplement un peu changé. »

Mais, cette année, les 30 ans du renouveau de cette guindaille printanière masquent un autre anniversaire: celui de l’Union royale des étudiants catholiques de Liège, qui fête ses… 140 ans. « Depuis l’époque où il s’agissait d’un lieu de débat d’idées pour des étudiants catholiques plongés dans une Université essentiellement libérale, les choses ont évidemment changé et le clivage entre les catholiques et les non-catholiques est dépassé, assure Lionel Leroy, l’actuel président de l’Union. Toutes les confessions sont les bienvenues et nous accueillons, par exemple, des étudiants musulmans qui souhaitent simplement adhérer à des valeurs. » Des valeurs qualifiées de “chevaleresques” par nos interlocuteurs, qui décrivent un univers basé sur la hiérarchie, la fraternité, le respect des serments ainsi que des droits et des devoirs que confère l’appartenance aux multiples ordres qui en font partie. Avec, en outre, des épreuves tenues secrètes mais essentiellement orales, basées sur des connaissances historiques et folkloriques. « Chez nous, des débordements vomitifs comme ceux que l’on peut parfois observer sous le chapiteau au Val-Benoît seraient plutôt mal vus, souligne Lionel. Les activités des comités de baptême ont aussi leur intérêt mais, chez nous, la boisson a moins d’importance et tout le monde reste digne. Certaines activités se font même en costume-cravate. Mais cela ne veut pas dire qu’à la fin, certains n’ont pas un petit verre dans le nez. »

Mais de quoi s’agit-il exactement ? L’Union, créée en 1873, regroupe plusieurs ordres estudiantins (Vaillant, l’Emeraude, Thyrse, Saint-Charlemagne et San Fiche), dont le plus important est l’ordre du Torè. Ce fut son installation rue Léon Mignon [ndlr : le sculpteur qui a réalisé, entre autres, la statue de Li Torè, avenue Rogier] qui détermina le nom définitif de ce qui devint, dès 1935, la distinction officielle de l’Union et le demeura jusqu’à ce que l’élection d’une présidente ne fasse prendre son indépendance à l’ordre du Torè (qui n’est toujours pas mixte, à l’heure actuelle, tout comme la plupart des autres). Nous sommes au début des années 70 et il faudra attendre dix ans pour que le Torè rejoigne à nouveau l’Union.

Pennes et calottes

Les attributs de l’ordre sont réservés à ceux de ses dignitaires qui portent au moins le titre de Chevalier. La cape blanche de cérémonie porte sur le flanc gauche une croix pattée noire, ornée d’un écusson aux armes de Liège. L’on y porte également diverses médailles et la penne est parfaitement admise. Mais c’est plutôt la calotte qui caractérise la centaine d’étudiants liégeois (dont un tiers d’anciens) membres des ordres estudiantins. Bien qu’elle soit surtout portée par les étudiants des universités catholiques dans le reste du pays, les calottes liégeoises sont non confessionnelles. « Ce sont les ordres qui les délivrent, à l’inverse des pennes qui sont données par le comités de baptême. Et chacun des deux couvre-chefs peut être porté dans tous les contextes et même en alternance », souligne Julien Denoël, le président de l’Agel.

Nul besoin d’être baptisé pour intégrer le Torè et ses semblables ; seules une certaine motivation et l’invitation de dignitaires se posent en prérequis. Alors seulement vous plongerez dans le mystère des coronas, tables disposées en “U” et pavoisées de bougies, autour desquelles on écrit, on chante, on rit ou l’on joue des sketches autour d’un thème d’actualité souvent humoristique.

Fabrice Terlonge

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