Avril 2013 /223

L’ULg s’engage dans une politique environnementale

Parler de l’environnement aujourd’hui n’est plus une mode, c’est un enjeu. S’il est prouvé que notre genre de vie participe à la dégradation de la qualité de notre milieu, on sait aussi que “les petits ruisseaux font les grandes rivières”. Chacun peut dès lors agir positivement, l’Université aussi. A l’initiative du Recteur, une réflexion globale a été lancée sur les mesures à prendre afin que elle s’inscrive clairement sur un chemin vert.

« Non seulement l’Université, en tant qu’employeur, doit montrer l’exemple mais elle doit aussi, dans ses enseignements, ses recherches et les services qu’elle offre à la société former les étudiants et son personnel au respect de l’environnement dans lequel nous évoluons », déclare Laurent Despy, administrateur de l’ULg et initiateur de la récente “Charte de politique environnementale”*. D’emblée, celle-ci postule que “L’ULg, ses étudiants, ses instances académiques, son corps professoral et son personnel d’encadrement s’engagent à jouer un rôle moteur pour la protection de l’environnement (…)”. « L’objectif de cette charte est de faire de l’environnement une priorité pour l’Institution, explique le vice-recteur Eric Haubruge. Notre ambition est de gérer et d’améliorer progressivement les performances environnementales de l’ULg afin de construire une université “durable”. » Un Groupe de réflexion et d’action pour la protection de l’environnement (Grape) pilote le projet dont l’objectif, à terme, est d’obtenir le label “Iso 14 000”, référence mondiale en la matière et qui sera bientôt exigé pour certains laboratoires comme le Centre d’analyse de résidus en traces (Cart) par exemple.

Evaluation

Chaufferie

Première étape : l’évaluation de la situation afin de déterminer les actions prioritaires. Une “analyse environnementale initiale” a été réalisée par une équipe – et la collaboration de nombreuses administrations de l’ULg – sous la coordination de Joseph Smitz, qui a mis en oeuvre les méthodes d’éco-management enseignées tant à HEC-ULg qu’au département sciences et gestion de l’environnement de la faculté des Sciences. « Toutes les activités de l’ULg génératrices d’effets sur l’environnement ont été passées au crible, explique-t-il. Consommations d’énergie et d’eau, déplacements et transports, achats et repas, rejets de CO2 , productions de déchets, biodiversité, etc., ont été évalués puis reclassés pour cinq zones : Liège-centre, HEC-ULg, Sart-Tilman (sauf le CHU), Gembloux Agro-Bio Tech et Arlon. Un Bilan Carbone® complet des différentes activités de l’ULg a également été réalisé, avec des résultats calculés par Faculté ou encore pour les activités étudiantes (ce qui constitue apparemment une première pour une université de la Fédération Wallonie-Bruxelles). Toutes les données ainsi collectées ont ensuite permis de mettre en évidence les impacts qualifiés de “significatifs”, ce qui fournit les points les plus cruciaux à résoudre prioritairement. »

Sans surprise, les déplacements des étudiants et du personnel vers l’Université constituent une source importante de consommation d’énergie et d’émission de CO2. Les situations sont très diverses cependant et il est intéressant de regarder les choses dans le détail. A titre d’exemple, le bilan montre que, à Liège, les déplacements des étudiants pour venir suivre les cours sont une source d’émission de près de 19 000 tonnes de CO2 par an. Quant au personnel, c’est plus de 11 000 tonnes de CO2 qui sont générés pour les trajets domicile-travail. « A Gembloux par contre, la grande majorité des étudiants ont un kot près du campus et se rendent aux cours à pied. Pratiquement aucun rejet de CO2 pour eux ! Ce qui n’est pas le cas des enseignants dont la plupart habitent à la périphérie et viennent habituellement en voiture », précise Joseph Smitz.La consommation des énergies (gaz, mazout, électricité) est aussi en haut de la liste des points noirs. Un échelon plus bas, citons encore les achats, le tri des déchets et la gestion de la biodiversité.

Nouvelles pistes

L’ULg, consciente de son “impact carbone”, a déjà réagi, notamment en remplaçant la chaufferie au gaz naturel du Sart-Tilman par une centrale de cogénération alimentée par biomasse. La nouvelle installation fonctionne en brûlant des pellets de bois, la vapeur produite permettant une production d’électricité “renouvelable” et l’énergie thermique résiduelle alimentant en chaleur tous les bâtiments du campus. Résultat ? Une économie de 8 000 tonnes de CO2 par an, soit environ un tiers des émissions “énergie” de l’ULg. A quand une chaudière de ce type en ville ?

L’effort doit maintenant porter sur l’isolation des bâtiments, sur l’optimisation de l’éclairage, etc., car l’idée maîtresse est de réduire la consommation d’énergie. « Toutes ces notions doivent être intégrées dans les nouvelles constructions comme ce fut le cas pour le restaurant du Sart-Tilman, note Eric Haubruge. Je sais que notre commission des bâtiments y veille. Et il faut aussi sensibiliser les membres de la communauté universitaire aux petits gestes quotidiens (la lumière, le chauffage, l’eau, les transports, etc.) qui réduisent notre empreinte écologique et permettent de substantielles économies. Sur le site de Gembloux, nous avons recruté un ingénieur chargé de traquer les gaspillages d’énergie. En un an, il a généré 120 000 euros d’économies ! » Un module de formation aux questions de l’environnement devrait pouvoir être organisé dans toutes les filières d’étude.

RestoSTQue faire, par ailleurs, pour limiter la pollution due aux transports ? L’Université pourrait, pour son propre parc automobile, préférer les voitures hybrides et, pour les déplacements sur le campus du Sart-Tilman, favoriser très activement l’utilisation du vélo. « Elle pourrait aussi, continue Joseph Smitz, veiller à limiter le nombre de déplacements des étudiants. La reconversion des cinémas Opéra est à cet égard un très bon signe puisque les nouveaux amphithéâtres, au coeur de la ville, sont à portée de bus, de trains et bientôt de trams. » Pourquoi ne pas envisager dès lors que les étudiants inscrits en premier bachelier – soit 28% de l’ensemble de la population étudiante cette année – aient cours de manière prioritaire en ville ? Dans le même souci, pourquoi ne pas envisager également des formes de télétravail pour le personnel ? La question a le mérite d’être posée car, là aussi, des économies d’énergie – et des économies financières – sont possibles.

Autre piste : les transports en commun. « Certaines universités – par exemple l’UQAM à Montréal – ont obtenu l’abonnement aux transports en commun à un prix symbolique pour tous les étudiants. L’idéal serait d’obtenir des TEC liégeois une diminution du prix des abonnements de bus – voire la gratuité – pour les étudiants, le covoiturage étant également une solution intéressante pour ceux qui n’habitent pas dans des zones desservies par les transports en commun », espère Joseph Smitz. Produire moins de déchets et mieux les trier constituent encore un objectif à réaliser... et la liste à cet égard n’est pas exhaustive !

Mis en place récemment, le Grape devra mener des actions vigoureuses pour que les principes évoqués dans la charte ne restent pas lettre morte. Le défi le plus important est certainement d’obtenir la participation active de tous.

Patricia Janssens

* Voir le site www.ulg.ac.be/charteenvironnementale

La forêt du Sart-Tilman

HetreRemarquableLe campus de l’ULg, situation unique en Fédération Wallonie-Bruxelles, est implanté au coeur d’un massif forestier couvrant 510 ha, soit les trois-quarts du domaine universitaire. Plusieurs zones composent cet ensemble (les bâtiments occupent 91 ha, par exemple). Implantée sur les hauteurs de Liège, cette forêt périurbaine justifie une gestion multifonctionnelle intégrant la production de bois, la conservation des sites, la protection de la biodiversité et l’ouverture au public.

Pour le Pr émérite Jacques Rondeux (Gembloux Agro-Bio Tech), soucieux du respect de la charte, la gestion globale de cette forêt doit faire l’objet d’une stratégie cohérente et ambitieuse en délimitant des zones aptes à remplir simultanément ou non les diverses fonctions de manière équilibrée. Une sylviculture dynamique et “proche de la nature” pourrait être mise en place sur une zone de 200 ha, soit près de 40% de la surface boisée totale, où on envisagerait à la fois des opérations d’entretien et de régénération et la valorisation de la biomasse à des fins énergétiques. « Il est possible de fournir l’équivalent de 200 000 à 300 000 litres de fuel par an et ce, sans nuire à la pérennité de la forêt en transformant le bois prélevé en plaquettes destinées à alimenter une chaudière au bois », conclut Jacques Rondeux. Par ailleurs, cette zone comporte un potentiel de bois d’oeuvre (usage plus “noble”) commercialisable, correspondant à 30% du matériel ligneux sur pied, soit 110 m³/ha.

Un inventaire par échantillonnage portant sur 240 unités de sondage de quelques ares a révélé que la forêt en place, qui comporte plus de 50 espèces ligneuses différentes, stockerait environ 150 000 tonnes de carbone (biomasse ligneuse et sol, chacun pour moitié), soit l’équivalent de 555 000 tonnes de CO2 absorbé (2% de cette quantité le serait chaque année). Un élément à prendre en compte en matière de bilan carbone, aux dires du Pr Jacques Rondeux. Cette surface bioproductive contribue à la diminution de l’empreinte écologique du domaine, par le fait qu’elle compense partiellement les consommations des ressources et les productions de déchets propres aux activités présentes sur le site.

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